e suis très partagé en ce qui concerne le dernier film en date d'un des fondateurs et des piliers du collectif Kourtrajmé dont je suis en général assez client des propositions, Kim CHAPIRON, co-écrit avec Ladj LY lui aussi membre du dit collectif et dont le travail comme scénariste m'apparait souvent passionnant et dont le film Les Miserables (2019) a été une vraie réussite et un regard sur la banlieue inhabituel en dépit d'une approche qui pouvait paraître cliché.


Nous suivons Ali, un jeune de banlieue que sa maman envoie au pays dans une madrassa en raison de ses tendances au vol - un peu comme si mes parents avaient mis à exécution leur menace de m'envoyer chez les jésuites si je ne modifiais pas mon comportement, sauf que là éducation africaine oblige, la menace devient une réalité - à son retour il est nommé Imam de la mosquée de son quartier.


Kim Chapiron choisit alors de nous offrir à voir un Islam apaisé, un Islam tellement éloigné des tensions sociétales dont il est affublé par nos éditoriaux et une idéologie grandissante qui ne cesse de vouloir enfoncer dans la tête des gens que l'Islam serait incompatible avec les valeurs françaises et occidentales, le geste est beau et j'adhère complètement au projet, j'ai d'ailleurs été à divers instants ému et touché par les prêches d'Ali, me disant que ça fait du bien d'avoir un tel point de vue sur cette communauté et cette religion, même si personnellement je sais déjà que l'image négative qu'on nous renvoie est fausse.

De là découle ma première limite avec le film : A qui s'adresse t'il ? Soyons clairs que le public déjà acquis à Kim Chapiron n'a pas besoin de lui pour intellectualiser l'idée de cet Islam de paix et de tolérance, quant aux idiots congénitaux suintant la haine et aux haleines de hyènes ils n'iront pas le voir. Du coup tout cet arc de narration me parait trop long, trop dilué et finit même par bégayer.


Le film à travers Ali et ses choix, pose la question de l'image de soi, des intentions derrière les actes, de sa quête de pardon maternel et de reconnaissance, mais là aussi l'ensemble qui pourrait être passionnant me semble esquissé, suggéré mais jamais développé, jamais approfondi, comme si mise en scène et scénario n'osaient pas s'y jeter de pleins pieds, mais malgré cette retenue, le film là aussi traîne sur cet axe.


Du coup quand l'équipe réalise qu'il ne reste qu'une demi heure et que le sujet central, les arnaques au pèlerinage à la Mecque, un vrai sujet qui chaque année fait des milliers de victimes dans la communauté musulmane, quelque chose que j'aurais adoré voir développer doit être expédié en deux mouvements, dans un montage où je pense que le monteur était parti dire bonjour à une copine qui passait là et se concluant sans même avoir achevé quoi que ce soit, je sors frustré.


Je reste pour ma notation clément, car les performances des acteurs sont notables, parce que Kim Chapiron sait tenir une caméra et même s'il s'inscrit dans une geste réaliste qui s'abstient de grands effets, on sent quand même qu'on est au ciné et pas dans un reportage france 3, et pour la grande humanité qu'il recèle dans son message de tolérance indiscutable.

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le 4 janv. 2024

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