La restauration est un monde à part, similaire à l’instruction militaire. Il y a des brigades, des petites mains, des fourmilles ouvrières qui sont toutes entièrement dévoué au Chef de cuisine qui a toute autorité qu’il est d’ailleurs raison ou tort. On a dit de The Menu qu’il avait tendance à faire dans la caricature, mais c’est effectivement de cette façon que sont régie les rapports dans la haute gastronomie comme dans la petite où certains se prennent pour ce qu’ils ne sont pas. J’en ai connu un vraiment con, malhonnête, fourbe, pervers, narcissique, et alcoolique. Le mal à l’état pur, son seul regard suffisait à insuffler le malaise et la peur. C’était un rustre violent qui possédait un bureau 3 fois trop grand qui lui servait de garçonnière pour ses soirées entre copains. Il y avait un minibar qui ne manquait jamais de rien, une grande table de réunion, une télévision avec les caméras braqués sur nous à la réception pourvu du son afin de savoir ce qui se disait à son sujet, et il y avait une photo de lui trônant fièrement avec son fusil près d’une carcasse de sanglier qu’il n’avait sûrement même pas tué, comme ces fameuses photo de safari. C’était surtout un menteur arrogant qui prétendait être diplômé de l’institut Paul Bocuse ce qui n’était évidemment pas le cas. Son incompétence et ses tentatives de harcèlement sur le personnel de salle et de cuisine auront finalement précipité le restaurant à la fermeture, mais je n’y étais malheureusement pas pour y assisté, faisant partie des victimes collatérale de son régime après m’y être mainte fois opposé. On ne peut pas toujours gagner, cela m’aurai demandé d’être au moins aussi con et vicieux que lui pour y arriver.


A force d’expérience dans le milieu, j’ai préféré me diriger sur l’hôtellerie en 3 étoiles, où la clientèle est d’avantage issue de la classe moyenne, authentique, accessible, sympathique. Ce n’était pas le cas en 4 étoiles ou dans un autre restaurant guindé que j’ai connu. La clientèle été déconnecté de la réalité, leur quotidien n’avait aucun rapport avec le nôtre, ils tenaient des propos naïfs et vulgaire à la fois, étaient issue de confrérie sectaire franc maçonnique, prenez le « petit » personnel pour des esclaves. Il y avait beaucoup d’œnologue du dimanche aux airs supérieurs qui faisait mine de de s’y connaître et d’attribuer des goûts et senteurs qui n’avait absolument rien à voir avec la piquerette qu’on leur servait parfois ce qui avait souvent le don de me faire rigoler. Certain n’aurai même pas sût faire la différence entre un Pinot Noir et un Cabernet Franc. Voilà en somme ce que constitue le gratin de la société comme l’Elysée que j’ai servi durant le centenaire de la Grande Guerre et l’exigence fantasque et absurde de certains ministre, des suites loués au prix fort sur le compte du contribuable et qui n’était même pas occupé, des mets qu’ils croyaient « raffinés » mais ne l’était pas et venait de la boulangerie local ou d’un paquet Lustucru. Une belle hypocrisie pour laquelle j’éprouve beaucoup de rancoeur et d’amertume.


Cette véhémence c’est aussi celle qui caractérise The Menu avec ce Chef suicidaire et mégalo qui souhaite régler ses comptes avec ce monde élitiste de Nantie issue de la Bourgeoisie. Pour éviter de me gâcher le plaisir de la découverte, je n’avais pas regardé les bande annonces (je ne le fais d’ailleurs jamais), par conséquent je m’attendais à un drame dans le milieu de la restauration. Hors il s’agit en réalité d’un jeu de prédation au coeur d’un dîner mondain, orchestré d’une main de maître avant que ça ne finisse par tourner en eau de boudin à cause d’un cheveu sur la soupe. Ne jamais oublier que ce milieu fourmille d’imprévisibilité ce que n’avait de toute évidence pas anticipé le Chef Slowik suite à une invitée de dernière minute. La perfection vers laquelle tend l’antagoniste est aussi incohérente que les comportements irrationnels de la clientèle. Le spectateur aura tôt fait de se heurter à la suspension consentie de l’incrédulité et ce qui peut considérablement gêner l’expérience de visionnage voir pas mal irriter d’autant que le film souffre clairement de son déséquilibre entre premier degrés et humour noir d’où les avis parfois très tranché de la critique. Mais c’était sans compter sur le fait qu’on nage en pleine satire sociale assez virulente et que de ce point de vue-là, la dose est au moins aussi caustique que le repas est avare en effet sanguinolent. Ne vous attendez donc pas comme moi à un régime anthropophage. Par ailleurs toute l’artificialité du milieu est dépeinte par une représentation assez hautaine, des choix de mise en scène pompeux et classieux ainsi qu’une tonalité très formelle et aseptisés excepté lorsque le récit bascule définitivement dans une « folie » somme toute modérée.


Les plats du menu ne sont donc que des démonstrations nombrilistes associés à des souvenirs personnels qui visent à légitimer une punition expéditive à cette clientèle antipathique et agaçante au possible. Finalement notre plus grand tort sera surtout de les condamner pour ce qu’ils font plus que pour ce qu’ils sont. Des riches se vautrant dans le luxe sans y prêter la moindre reconnaissance sauf lorsque cela peut flatter leur propre égo. On va manger au Hawthom non pas pour ce qu’on nous offre dans l’assiette mais bien parce qu’on peut se le permettre et que cela constitue la distinction ultime parmi le club très fermé de cette frange de la population qui devient d’ailleurs depuis quelques temps la cible par excellence sur laquelle nous déversons toute notre haine et frustration. Pourtant ces personnes ne sont finalement pas si différent des êtres que nous sommes, surtout si on considère l’arnaque que constitue l’exclusivité de manger des tartines sans pain, sorte d’assortiment de condiment se dégustant avec une spatule en bois à défaut d’un quignon de pain réservé aux prolots, un peu comme le fruit d’arbre à pain qui n’était utilisé que pour gaver les esclaves d’Afrique noire. Ce concept culinaire résume à lui seul toute l’hypocrisie de la démarche et de ces comportements médisants et paradoxales qui anime actuellement le cinéma Hollywoodien (Glass Onion en tête).


On distingue bien évidemment une parabole grossière sur notre propre rapport au cinéma, nos analyses et signes que l’on veut bien lui attribuer sans jamais profiter pleinement (ou bien rarement) de l’expérience qui nous est proposé. Car au final, il s’agit surtout de tendre un miroir déformant au spectateur se gavant de cinéma d’auteur parfois très chiant, s’extasiant sur des œuvres auxquelles les critiques prêtent des interprétations souvent grotesque, à défaut de retrouver son innocence et de profiter simplement du spectacle proposé comme l’on déguste un cheeseburger bien gras ou une série bis ou B sans grande prétention ou fioriture. Le message pourrait se résumer à celui-ci : Sachez au moins apprécier ce que l’on vous offre au lieu de cracher continuellement dans la soupe comme vous le faite bande d’ingrats.

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le 2 janv. 2024

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