Il va sans dire que si j'avais vu ce film à 10 ans, la vie de mes parents serait devenue un enfer. J'aurais tout simplement fait la grève de la faim jusqu'à ce qu'ils achètent un zoo.
PUTAIN UN ZOO, MEC ! JE SAIS PAS SI TU TE RENDS COMPTE... UN ZOO !
30 ans plus tard, passés au coeur d'une capitale embouteillée dont les habitants préfèrent se vautrer dans les souvenirs d'une splendeur morte il y a plus d'un siècle, et répéter jusqu'à l'écoeurement "c'était mieux avant" plutôt que de construire un meilleur "maintenant", je me dis que les étasuniens ont au moins ça pour eux : savoir dire avec candeur "why not", croire sincèrement en la possibilité des nouveaux départs...
Oh, bien sûr, ce genre de philosophie de vie ne fait pas de "We bought a zoo" une oeuvre artistiquement impérissable, loin de là. C'est même épatant de se dire que des réalisateurs, des scénarsites, ont le courage de se lancer dans un film déjà fait mille fois, en changeant juste un ou deux éléments (UN ZOO ! NAN MAIS LA, LES GARS C'EST UNE IDEE DE GENIE !).
Evidemment, on préfèrerait que le gentil papa tombe amoureux du garçon de ferme plutôt que de la chouette Scarlett, ou que la jolie cousine de 12 ans initie le joli fils de famille de 14 ans aux joies du sado-masochisme hard core, ça changerait un peu... Non, ne rêvons pas : les ficelles psychologiques ne sont pas fines,les ressorts dramatiques grincent un peu, mais bon, rien de très méchant... c'est comme de se laisser glisser dans un bon bain tiède en sirotant un nectar de pèche pendant que le soleil part se coucher dans une explosion de mauves, de roses et d'oranges : facile, mais agréable.
A tout dire, lourdingue pour lourdingue, je préfère regarder un tâcheron sans génie comme Crowe dévider sa pelote, gentillette et convenue, plutôt que de subir les leçons de morale de Malick, les putasseries de Scorcese, les bons sentiments de Spielberg ou le puritanisme militant d'Eastwood. Les ratiocinations prétentieuses de ces baudruches dogmatiques, qui croient qu'il suffit de s'affirmer artiste pour l'être, sont bien pires à mes yeux que le message de "We bought a zoo", transmis un peu maladroitement, mais dont le fond est finalement inattaquable : le bonheur ne sert à rien d'autre qu'à être heureux, et personne ne décide à la place d'un autre comment y arriver.
C'est finalement une leçon que l'impérialisme yankee, avoué ou latent, politique ou cinématographique, ferait bien de comprendre un jour : il est imbécile et néfaste de vouloir faire le bonheur des autres contre leur gré, sous prétexte qu'on sait ce qui est Bien et ce qui est Mal. Que chacun s'occupe de son propre jardin, c'est déjà suffisemment de boulot pour une seule vie, et si le jardin est réussi, les autres sauront bien s'en inspirer.