Deuxième film de François Truffaut, Tirez sur le pianiste se situe entre les 400 Coups et Jules et Jim, deux grands succès à l’inverse de ce film. Or, après l’incroyable succès de son premier film qui reçut le prix de la mise en scène à Cannes, on imagine naturellement la pression de Truffaut, parce qu’on attend toujours au tournant le prodige qui met dans le mille dès son premier essai. Tirez sur le pianiste fut un échec public et critique.
Au début, une course-poursuite dans la nuit nous fait croire que nous allons regarder un film noir, un film de gangsters. La scène qui suit, complétement différente ne laissera pas de nous désorienter, c’est du Truffaut et il faudra s’y faire. Truffaut ne s’adapte pas aux genres, il fait son propre cinéma, lui qui écrivait lui-même ses scenarii. Le film continue de nous surprendre parce qu’il y a aussi des scènes comiques assez singulières dans l’œuvre du maître, notamment ces tueurs plus idiots que méchants.
Le héros du film c’est Julien Kohler joué par Charles Aznavour dont c’est sans doute, pour moi, le meilleur rôle au cinéma. Ce personnage, Aznavour l'enfile comme un gant. Le visage dur de Kohler dissimule les souffrances, les peurs du personnage. Sa façade est celle d’un homme impénétrable et taciturne. Kohler est un mystérieux pianiste de bar qui fait la connaissance d'Hélène (superbe Marie Dubois) dont il tombe amoureux. Hélène est un soleil à côté de la lune qu’est Kohler, son armure va se fendre au contact de la jeune femme et soudain Kohler est intimidé, sa personnalité change. Hélas, Kohler va être mêlé aux affaires de gangstérisme de son frère et voir sa vie menacée.
Pour moi tous les films de Truffaut se valent. Il n’a pas un genre de prédilection mais plusieurs qu’il façonne à sa manière en y imprimant sa marque. Il en sera ainsi pour tous ses films et bien entendu celui-ci. Film tantôt noir, romantique surtout et parfois un peu burlesque, Tirez sur le pianiste est pour moi une œuvre essentielle du cinéaste.