Journal de mutation - jour 5

---Bonjour voyageur égaré. Cette critique fait partie d'une série de critique. Tu es ici au cinquième chapitre. Je tiens à jour l'ordre et l'avancée de cette étrange saga ici : http://www.senscritique.com/liste/Vampire_s_new_groove/1407163
Si tu n'en a rien a faire et que tu veux juste la critique, tu peux commencer au deuxième paragraphe. Bonne soirée. ---

Je me sens changer. Ces films de vampire à haut débit, la solitude, le froid... Je ressent une mélancolie étrange. C'est certainement le traitement qui commence à faire effet. Je suis soudainement déçue de ne pas avoir fêté Halloween cette année. Ni depuis bien longtemps. Je regarde mon Jack'o lantern triste, que j'ai fais machinalement après avoir cuisiné son intérieur. Et mon vague à l’âme étant le plus fort, j'ai allumé une bougie que j'ai placé en son sein, et c'est à cette lumière vacillante que j'ai pris mon traitement quotidien : Vampyr, ou l'étrange histoire de David Grey. J'ai effectué un petit retour dans la chronologie pour ce film, mais le rire qu'avait suscité en moi le traitement de la veille était un effet secondaire extrêmement indésirable et j'ai décidé de revenir à un traitement plus sur. Carl Theodor Dreyer était le fabriquant de la situation. Et c'est ainsi que j'ai fêté Halloween un 5 novembre, seule avec ma citrouille écervelée et mes démons immortels.
Voila un film bien étrange. J'ai été saisie par la transition brutale d'avec le film de la veille. Je pensais qu'arrivée à ce point, je ne pouvais plus que rire de mes chers vampires, mais je me trompais. Je dois confesser, je n'ai rien compris au scénario. Qui est cet homme ? Pourquoi est-ce qu'il va chez un mec qu'il a vu défiguré dans un vieil hôtel miteux ? Pourquoi ce vieux meurt ? Et pourquoi diable personne ne le met-il a la porte alors que personne ne sait qui il est ? Il y a concours d'incohérence de scénario avec le film d'hier, mais c'est bien là leur seul point commun. Ce n'est pas un problème. Au contraire, ce scénario brumeux est au diapason avec l'ambiance sinistre du film, ses plans confus et instables, son son grinçant et dérangeant. Si l'histoire avait été intelligible, le film n'aurait pas été bon. Je n'aurais jamais cru dire -écrire- ça un jour. Il faut croire que mon traitement porte au delà des frontières que je lui prêtait. Car même en étant constamment plongée dans le brouillard et l'incompréhension, ce film m'a fascinée. Ces jeux d'ombres et de lumière m'ont glacé comme je ne pensait pas un film capable de le faire. Pour d'autres films de cette époque, nous faisons un peu semblant d'avoir peur, d'être surpris. Nous sourions intérieurement de l'effort du réalisateur, tout en se complaisant dans notre présent, qui appréhende bien mieux l'esthétique et la mise en scène de la peur. Ici rien de tout ça. Ce film suinte le malsain et m'a agrippé les boyaux avec sa main gluante et noire. Des ombres difformes se tordant de douleur à la lumière blafarde des quelques scène de jour, bonheur trop entier pour oser durer plus de quelques secondes, en passant par ces textes (qu'on parle du livre ou des cartons) d'une beauté glaçante ou ce son sautant d'un silence de mort à des cris d'effroi saisissant... Je voyais parfois la flamme de ma lanterne vaciller, et moi avec. La scène final n'est qu'un apogée de cet effroi, avec ce montage alterné révulsant, entre le bonheur des uns d'un coté, qui sonne plus monstrueusement encore que la souffrance et la mort qu'on y oppose. La fin tombe comme un pieu dans le cœur, et on en reste le souffle coupé. S'il y avait réellement des vampires, ou si tout ça n'était que notre imagination, nous ne le sauront jamais, et si ce film avait bien sa place dans mon traitement intensif, je ne peux le prouver que par ma conviction absolue et mon cœur qui en est resté glacé.