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Le réalisateur espagnol est cette fois très critique et il a raison sur le fond : Venise, ce joyau, est devenu un parc d’attractions ; c'est la tragédie du tourisme de masse qui est visé. D'où l'idée de faire de Veneciafrenia, un slasher, ce sous-genre de l'horreur dans lequel le meurtrier, généralement avec des raisons bien fondées pour en être devenu un (ou, du moins, avec une certaine défense pour sa vengeance), tue par les méthodes les plus sauvages des jeunes qui ne pensent qu'à s'amuser, à forniquer, à boire et à se droguer, sans regarder un instant l'environnement dans lequel ils évoluent ni les gens ni les choses qui les entourent. Un slasher qui comme le veut le genre a pour principal but de divertir.

Néanmoins le film n'y parvient qu'à moitié. Le contraste entre la Venise classique du carnaval, baroque, bigarrée et démesurément brillante, et l'attitude vulgaire de cette bande d'Espagnols trentenaires, trois femmes et deux hommes avec des prétentions juvéniles et des bêtises adolescentes, qui tombent sur le pire voyage de leur vie, est trop appuyé pour qu'on y croit. Les notes de Giallo dans le traitement des couleurs et les nuances de certains personnages, conférent une certaine vision fantomatique bienvenue au tout avec la référence évidente au grand "Ne vous retournez pas" de "Nicolas Roeg" de 1973,comme modèle à suivre pour présenter non pas une belle ville sublime , mais une citée qui fait peur, parce qu'elle est vieille, laide et décadente.

"Veneciafrenia" finit par échouer sur les deux fronts : celui de la réjouissance de la terreur, et celui de la vision critique du fait de société qui était pourtant un excellent point de départ. Cela n'empêche pas quelques belles fulgurances comme le générique d'ouverture, vraiment magnifique. La terreur à base d'Opéra avec l'excuse du personnage de Rigoletto s'est bien vu aussi. L'humour noir fonctionne part moment mais s'équilibre mal avec la terreur du Giallo. Tout cela manque de pertinence et d'ambiguïté : le ton général est étrange en raison des différentes parties qui collent jamais vraiment ensemble (entre le slasher gore à moitié drôle et la satire-critique avec un certain message) et une fin décevante.

C'est bien filmé, on reconnaît la patte de "De la Iglesia", mais le film il manque un peu cette frénésie qui, ironiquement, brouille parfois certaines œuvres de cet auteur. Les protagonistes sont des clichés ambulants. Les méchants bien plus intéressants.

Film à peine amusant là où l'on sent bien que "Veneciafrenia" passe à côté de quelque chose qui aurait pu être mémorable.

HenriMesquidaJr
6
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le 6 mai 2024

Critique lue 5 fois

HenriMesquidaJr

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