Vorace
7.2
Vorace

Film de Antonia Bird (1999)

Un capitaine américain, couard, parvient à s’emparer d’un poste mexicain, après s’être fait passer pour mort dans une bataille où ses compagnons sont décimés. Empilé parmi les cadavres, il parvient à s’échapper et à surprendre les ennemis.
Cette prouesse n’abuse cependant pas son supérieur qui le mute dans un fort perdu au fin fond de la Californie. Là-bas, il tombe sur une petite garnison de bras cassés, tuant leur spleen dans l’alcool et les drogues. Pourtant, ce quotidien morne va être perturbé par le pasteur Colquhoun, arrivant affamé et frigorifié. Sauvé par la garnison, il leur conte son histoire. Il appartenait à un convoi de colons qui a fini par se perdre, s’entredéchirer et avoir recours au cannibalisme pour survivre. Une équipe se met donc en marche pour sauver d’éventuels autres survivants…


L’action, durant la guerre américano-mexicaine, sert surtout de toile de fond pour dénoncer la soif sanguinaire du genre humain. Une revisitation du mythe de « Dracula » mais dans un style léger, où l’humour noir et l’ironie prédominent. Dans cette optique, les personnages sont volontairement clichés, pour créer un décalage burlesque avec le dramatique de la situation.


Croisement improbable entre pamphlet contre la guerre, satire et fable horrifique, « Vorace » se révèle une expérience fascinante. Antonia Bird, la réalisatrice, a rondement mené sa barque et passe d’un style à l’autre avec la dextérité d’un funambule. Une performance tout à fait remarquable car les films multigenres sont réputés casse-gueules, souvent faute de maîtrise des différents registres abordés.


La bande originale, signée Damon Albarn (leader de Blur) et Michael Nyman, n’est pas non plus en reste et contribue à renforcer l’atmosphère insolite du film. Alternant hymnes campagnards et musiques plus dramatiques, on nage souvent en plein surréalisme. Car on passe sans prévenir d’un ton complètement décalé à des thèmes beaucoup plus inquiétants, surlignant eux le drame en cours. Mission donc parfaitement remplie par les deux compères, assurant d’interloquer le spectateur et de lui faire traverser tout le spectre des sentiments.


Au-delà d’une simple dénonciation de la guerre et de ses horreurs, son propos plus global explore la noirceur humaine dans ses ultimes tréfonds. Une vision très pessimiste qui n’annonce aucune rédemption, l’homme n’étant, en définitive, qu’un loup pour l’homme. Ce nihilisme total est heureusement édulcoré par un assemblage truculent de personnages hauts en couleurs et de situations carrément burlesques. Tout cela évite une lourdeur excessive et consacre une œuvre hors du commun, sortant des sentiers battus, osant une nouvelle forme pour ne pas rabâcher un sempiternel même canon. Une œuvre rafraîchissante, anticonformiste, qui secoue et brinquebale tout le médium, pour le plus grand plaisir du cinéphile en mal de sensations nouvelles.

JackBarron
9
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le 9 févr. 2018

Critique lue 276 fois

JackBarron

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