Je discutais avec quelques amis sur ce visionnage, sur ce qu'il apportait en terme de lutte. Hélas peu de choses. Mais je les ai priés de revoir leurs positions, de reconsidérer les intentions véritables de ce métrage d'un des groupes de Medvedkine.

Si l'on s'éloigne quelque peu de l'impulsion de Chris Marker, les ouvriers prennent toutefois pleinement possession de l'outil cinématographique. Ce n'est plus alors un documentaire et pour eux, il est hors de question de faire seulement du témoignage ou du bourrage de crâne avec des grandes théories. On retrouve bien tous les domaines qui animent leur vie, la mainmise de la maison Peugeot sur leur existence, les déviances de paternalisme et du capitalisme.

Ce film se démarque nettement grâce à son ton parfois caustique et pleinement réussi pour démontrer ce qu'ils subissent pour pouvoir travailler et ainsi gagner un peu d'argent. Nous ne sommes pas loin d'un humour grolandais, à la fois satirique et grivois, si je puis donner une image qui soit parlante. En cela, c'est une réussite totale.

Parfois, le ton est plus grave, comme à propos de l'aliénation et de l'emprisonnement.

Par contre, sur sa fin, il est atteint d'un évangélisme qui rend assez idiot et inapproprié tout ce qui a été vu et démontré auparavant, au lieu, comme Marker l'avait fait, de donner rendez-vous. J'ai considéré cela comme fortement pénalisant, même si on se doute bien que le contexte entre 1967 et 1971 a quelque peu évolué.

Si vous vous intéressez à Peugeot, le site de Lutte Ouvrière a mis en ligne un article très clair ce qu'est et a été la famille Peugeot... au fil des siècles. Je pense qu'il est intéressant de démonter un peu tout ce qu'on vous dit sur Peugeot et sa magnificence protégée par les médias et gouvernements successifs : http://www.lutte-ouvriere.org/documents/archives/la-revue-lutte-de-classe/serie-actuelle-1993/article/france-peugeot-deux-cents-annees-d

C'est complémentaire au visionnage de ce film ouvrier, authentique propos de travailleurs qui font leur propre cinéma, dans leur intérêt, avec leur regard consternant et satirique. Le film montre l'exploitation, l'aliénation, le paternalisme asphyxiant de la famille Peugeot et les divisions que le patronat assène dans la classe laborieuse (femme/homme, maghrébin/français, syndiqué/pas syndiqué). Comme si l'humour pouvait leur faire prendre de la distance, c'est toute leur révolte qui s'exprime par cette stratégie.
Et c'est réellement caustique.
Andy-Capet
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le 10 févr. 2013

Modifiée

le 10 févr. 2013

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