La tartiflette, tu sais par avance le goût qu'elle a. Ce n'est pas sorcier, c'est au contraire une recette tout ce qu'il y a de plus basique. Rien de novateur, mais putain, c'est bon.


Dragon Quest VIII, c'est une tartiflette.


Tout y respire le déjà-vu, le classicisme, le bien-pensant et les rebondissements convenus. Tu n'y as pas joué que tu es déjà presque capable de décrire toute la structure du jeu.
Et pourtant, malgré cela, ce jeu est capable de t'émerveiller au plus haut point. Voire même te surprendre. Si, si. Paradoxe, n'est-il pas ? Et pourtant...


La force de ce titre est dans sa finition. Tout est travaillé au possible, léché, détaillé, riche et ne laisse jamais – mais alors jamais – un semblant de goût d'inachevé. Chaque passage de ce titre est creusé au maximum, nous faisant voyager toujours plus loin. Chaque détail, chaque dialogue, chaque quête... Tout est réfléchi, prenant, logique et incroyablement cohérent.
A une époque où on (je) pleure sur la qualité et l'audace – inexistante – du jrpg actuel, il est bon de se replonger dans ce titre. Une sorte de best of de ce qu'il se faisait de mieux. Une véritable ode à l'aventure, à la simplicité, où chaque élément a une raison d'être. Le JRPG dans toute sa splendeur.


Bon, c'est bien joli les superlatifs en pagaille, mais derrière, il y a quoi ?
Une aventure simple, certes. Un scénario basique, mais superbement conté et émotionnellement très bon. Surtout qu'il arrive à nous surprendre avec sa « deuxième aventure » révélant la véritable fin. Les dialogues sont drôles, toujours à propos, jamais graveleux, et surtout, doublés à la perfection par une ribambelle d'acteurs talentueux. Rares sont les RPG à posséder un doublage pareil.
Mais ce que j'ai aimé dans ce titre, par-dessus tout, c'était réellement la manière de nous « offrir » cette aventure. On s'émerveille sans cesse devant chaque nouvel arc. De la remise à pied de notre premier bateau (magnifique envolée céleste) à la découverte de la map du ciel, en passant par les joies de la chevauchée à dos de tigre, tout cela pour aller aider un prince dans son rite d'initiation, ou sauver un roi triste d'avoir perdu sa femme... Puis d'aller dans le terrier de taupes récupérer une harpe en passant par le monde des ténèbres et celeste, péter le derrière à un chien maléfique ou récupérer un Inuk coincé dans une caverne de glace.
Il y a tout. Tout ce dont on peut rêver de manière simple. Et rarement cela a été aussi bien conté.


Point de rythme ultra soutenu, pas de scènes grandiloquentes où tout s'écroule, où les morts pleuvent par centaine. Non, non, non. Ici, tu marches des heures et des heures. Tu regardes le paysage et tu parles aux habitants des villages. Tu vas vite chercher l'auberge pour y dormir un bon coup tellement la traversée a presque fini par mettre tes percos à plat, et tu repars, ton baluchon sur le dos, sauver le prochain village d'une quelconque malédiction.


Porté par une bande sonore magistrale. Aux mélodies certes déjà connues dans la série, mais ici jouées par un orchestre complet. Les virées en campagne à dos de tigre resteront gravées longtemps dans ma mémoire grâce à celles-ci. Malheureusement, leur nombre est très limité. Les thèmes reviennent sans cesse. On aurait tellement aimé en avoir plus...
Et visuellement, punaise. Punaise quoi. Assurément le plus beau cell-shading que j'ai vu jusqu'à aujourd'hui. D'une finesse incroyable, extrêmement détaillé, on s'arrête très souvent pour admirer le décor. Le pire, c'est que malgré que le monde soit très grand, la qualité, elle, est constante. Du début à la fin. De l'architecture à la végétation. Même le nombre de npc différents est tout à fait correct.
Et puis il y a l'animation... C'est surtout grâce à elle que l'ensemble de l'aventure passe aussi bien. Yangus y est génialement animé et son humour passe principalement par là. Tous les personnages ont bénéficié d'un soin tout particulier. C'est vraiment plaisant à regarder – et à jouer – car tu sens, tu le vois, le travail titanesque accompli derrière par toute l'équipe de dev. Un travail qu'on peine énormément à ressentir dans les productions actuelles. Tout semblant tellement basique en comparaison...


Bon et puis il y a les quêtes annexes, nombreuses et longues, la deuxième fin, bien éprouvante, la chasse aux monstres, l'exploration d'îles cachées, des coffres en veux-tu en voilà, un casino qui te fera perdre dix heures de ta vie, la Puff-Puff mania et la verdure à perte de vue.


Une bonne tartiflette vous dis-je. Un condensé de tout ce qu'il se faisait de mieux à l'époque (et même aujourd'hui). Un titre qui vieillit bien, très bien, et qui ne perdra jamais son aura. Trop classique pour beaucoup sur de nombreux points, mais un classicisme clairement assumé, bien construit, intelligent qui nous pousse dans une des plus belles aventures sur PlayStation 2. Incontournable.

imiduno
9
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le 2 juil. 2015

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imiduno

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