Le jeu-film qui te pousse vers les crédits

S'il y a un truc qui me rend fou quand je joue à un jeu vidéo, c'est de regarder un film. J'ai été servi avec Max Payne 3... A vue de nez je dirai que j'ai passé 50% de mon temps de jeu comme spectateur plutôt qu'acteur. Même les interactions les plus basiques comme ouvrir une porte ou grimper à une échelle sont l'occasion de perdre la main sur l'avatar. La sur-narration dans son horreur la plus totale. Le pire, c'est que malgré cette débauche de moyens, le scénario ne fait pas honneur à la licence, souvent vulgaire (merci Rockstar), toujours trop proche du nanar (merci Rockstar, même pas un niveau psycho-trip dans la tête de Max).

Quand Rockstar nous laisse jouer, c'est pour nettoyer une arène de jeu entre deux portes. Sur ce point, le contrat est respecté, on retrouve le core-gameplay de Max Payne : la plongée en bullet-time et les gunfights explosifs face à 5-6 adversaires. Les sensations de jeu sont là, le level design est maîtrisé, indéniablement la partie réussie du jeu.

Pourtant, la volonté de faire un jeu-film a des conséquences gravissimes sur le plaisir de jeu : pour que le titre ait une temporalité proche du film, linéaire, Rockstar nous pousse vers l'avant tout au long de la partie. Exit la sauvegarde rapide qui permet de gérer sa progression, elle est remplacée par un système de checkpoints qui empêche tout retour en arrière. Tout est fait pour enchaîner, avaler les arènes de jeu sans frustrer le joueur, quitte à ruiner la notion de challenge. En cas d'échecs successifs, le jeu a l'obscénité de nous remplir la vie voire de nous offrir des pilules (!!). Le mode difficile n'en a que le nom tant le challenge est revu à la baisse. Je me suis senti émasculé, moi qui aimait gérer ma progression dans les Max Payne, refaire 10 fois un même passage avec 15% de ma vie et avoir la satisfaction de trouver le moyen de finir de nettoyer la salle sans mourir.

Je finis sur un truc qui m'a fait rire : il y a un cover ! Je vois mal feature plus inutile dans un Max Payne (AKA l'homme qui plonge en bullet-time). J'ai bien ri. Heureusement, on peut finir le jeu sans l'utiliser. C'est juste une feature inutile visant à rassurer les gens qui ne savent pas s'adapter à un gameplay. Quelque part, c'est pour moi le symbole de mon désamour pour ce Max Payne 3 : il fait tellement de concessions vers le grand public (cinéma, cover-FPS, manque de challenge) qu'il en oublie les joueurs, les joueurs de Max Payne.