1984
8.3
1984

livre de George Orwell (1949)

Salut à tous

J' écris une critique de ce livre qui m' a laissé abasourdi quand je l' ai finis. Un livre qui m' a marqué et qui agrandit la vision politique du lecteur quand il le termine. Il y a un avant et un après 1984..... C' est un K.O direct. C' est un cri de détresse d' Orwell !! Bref. C' est un livre à lire et qui est très profond. C' est un livre essentiel pour comprendre les ressorts poliitique d' un système totalitaire. Orwell l' a écrit à la fin de sa vie, en 1948. C' est l' aboutissement de toutes ses luttes, ses idées. C' est un livre testament pourrait-on dire.

Célèbre dystopie, marquée par un profond pessimisme politique, et humain, au lendemain de la 2ème guerre mondiale. J’ai noté quelques idées prodigieuses, non exhaustives :

La principale est bien sûr d’appauvrir le langage pour affaiblir la pensée en créant la Novlangue.
Il y a un passage assez cynique qui retrace le développement des médias comme moyen systématique de manipulation, depuis l’imprimerie jusqu’à la télévision.
Il y a enfin le système de double pensée et le caractère plus ou moins absolu de la vérité, reprenant l’idée selon laquelle la réalité n’existe que dans l’esprit humain, et nulle part ailleurs. Quand on y réfléchit, on se rend d’ailleurs compte qu’on pratique la double pensée plus souvent qu’on ne croit !

Mais de quoi parle ce livre ? "1984" est la vision qu'a Orwell d’un monde futur possible. C'est la dictature la plus puissante jamais créée ! C' est une dérive dont aucuns pays ne peut être à l' abri.... De plus, le télécran est partout maintenant avec l' ordinateur ( sur lequel j' écris cette critique ).

A aucun moment de sa vie le citoyen n’échappe aux yeux et aux oreilles du pouvoir en place. La presse est totalement contrôlée, la radio ne connaît que le poste unique et elle est diffusée partout. Ces deux supports ne font que répandre et répéter à longueur de journée les bases essentielles de " la pensée unique ". Les enfants, embrigadés dès leur naissance, sont les meilleurs espions du parti et de " la pensée unique ". Ils dénoncent leurs propres parents dont ils auraient pu surprendre une conversation. Chaque étape de la vie est contrôlée et la Police de la Pensée règne partout. Le pouvoir s'appelle " Big Brother ". Le monde ne ressemble plus en rien à ce que nous connaissons. Il est divisé en trois grandes parties : il y a l’Europe qui englobe tout depuis la Mer du Nord jusqu’aux frontières de l’Asie. Elle inclut donc la totalité de la Russie. Puis il y a le continent américain dans sa totalité, depuis le sommet de l’Alaska jusqu'au bout de l’Argentine. Le troisième bloc se compose des pays d'Asie. Quant au continent africain il n’est qu'un énorme réservoir de main-d'œuvre occasionnelle pour chacun des trois blocs. De temps à autre, ces blocs se heurtent sur ce continent pour des problèmes de réserves de matières premières.
Le monde est clos, on ne voyage pas d’un continent à l'autre, ni d'un pays à l'autre sans avoir à faire des démarches sans fin. Winston, un jeune homme perdu dans cette masse, tente de penser par lui-même, d'établir des contacts avec d'autres, hommes ou femmes, qui auraient le même désir que lui. Ce qui l’a fait basculer dans une opposition, c'est le fait d'avoir exprimé des idées dans sa tête et surtout de tenir un carnet. Il écrit : " Le crime de penser n'entraîne pas la mort. Le crime de penser est la mort. "
Orwell donne une forme d’avertissement aux populations futures quand il écrit qu’il est très facile d'imposer n'importe quoi à des populations totalement incapables de comprendre ce qu’on leur dit ou leur demande. Une population qui ne connaît pas son histoire, qui ne se tient pas au courant, qui ne suit rien, est une population en danger de liberté ! La connaissance est la meilleure gardienne des valeurs humaines, c’est elle qui empêche d'accepter pour vrai n’importe quoi !.

Mais voilà !! La police de la pensée, le ministère de la vérité, le ministère de l'amour et les deux minutes de la haine sont les piliers de cette société damnée, dans laquelle les êtres ont été déshumanisés. L'obéissance aveugle à Big Brother est absolue, elle passe par la destruction de toute forme de pensée active, les livres non autorisés sont voués aux flammes et l'histoire est réécrite chaque jour afin de mieux correspondre à la propagande du pouvoir qui harangue le peuple, jusque chez lui, grâce au télécran. La suspicion permanente et la délation sont devenus un devoir civique (les enfants, endoctrinés dès leur plus jeune âge, n'hésitent pas à dénoncer leurs parents), quiconque est surpris à mal penser ou à avoir une attitude "non conforme" encourt le risque d'être vaporisé.

Là où toutes les autres formes de dictatures ont échoué, l'Angsoc a su créer une rhétorique simple et complexe à la fois qui alimente son discours : La guerre c'est la paix – La liberté c'est l'esclavage – L'ignorance c'est la force. En effaçant les mots du dictionnaire qui ne sont pas utile et en établissant la Novlangue, le pouvoir anéantit toute velléité de révolte qui à chaque fois trouve son origine dans la discussion contestataire. Si les mots n'existent plus pour formuler une pensée intuitive à même de déconstruire les diktats des élites alors plus rien ne peut entraver l'objectif initial du pouvoir : le pouvoir pour le pouvoir et rien d'autre.

L’Océania, super état totalitaire, est perpétuellement en guerre contre l’Eurasia et l’Estasia. Winston Smith travaille au Ministère de la Vérité. Il est chargé de rectifier et falsifier l’histoire. Mais il se pose des questions. Un jour il met la main sur un livre, La Théorie du Collectivisme, qui explique la naissance d’Océania.

Winston va tenter de se dresser contre ce pouvoir totalitaire, tel David contre Goliath. Pour se sauver de la folie générale et aussi de celle qui le menace en permanence, il se jette dans la gueule du loup en espérant arracher sa liberté d'entre les mâchoires acérées de la bête immonde : Manipulation des médias et des masses, surveillance permanente de la population, contrôle des émotions, vocabulaire qui apparaît ou disparaît, Manipulation de l' Histoire récente ou ancienne, etc ...

Un magnifique roman d'anticipation qui fait froid dans le dos et vous pétrifie d'horreur lorsque vous découvrez l'immense machine de destruction massive mise en place par un pouvoir nécrophage. Roman d'anticipation en 1948, peut-être ? Certains y ont vu une charge contre le système Stalinien, mais cependant il ne cible pas uniquement celui-ci, l'auteur pousse la réflexion bien au-delà de ça en dénonçant toutes formes de totalitarisme quelle que soit l'idéologie qui la nourrit.

Je choisis l'extrait ci-dessous car ce que l'on nous présente comme modernisation de la langue actuellement conduit au résultat indiqué par Orwell.

Page de l'auteur de 1984 concernant la langue :

"La langue ne serait plus en état de permettre la moindre pensée indépendante de la vérité officielle" p. 51, d' où le novlangue....

Ces oeuvres ont une portée bien plus universelle. Ce que n'imaginait pas Orwell c'est que "Big Brother" serait accepté avec le sourire. Il y a une dictature de l'uniforme, d'une beauté stéréotypée voire inhumaine. Celles et ceux qui revendiquent un droit à la différence ne le font que pour se retrouver en communautés tous pareils : par ethnies, origines, goûts sexuels, etc.
La sexualité, dans ce livre, devient une sorte de gymnastique hygiénique indispensable pour se défouler mais sans aucune autre raison d'être, ou presque.

Voici une extrait très troublant (tiré des théories de l’opposant clandestin Goldstein) à méditer et à mettre en parallèle avec les politiques menées depuis près de quarante ans par les régimes successifs de nos sociétés dites civilisées et qui n’ont fait qu’accroître la pauvreté :

« Mais il était aussi évident qu’un accroissement général de la richesse menaçait d’amener la destruction d’une société hiérarchisée (…) Si tous, en effet, jouissaient de la même façon de loisirs et de sécurité, la grande masse d’êtres humains qui est normalement abrutie par la pauvreté pourrait s’instruire et apprendre à réfléchir par elle-même, elle s’apercevrait alors tôt ou tard que la minorité privilégiée n’a aucune raison d’être et la balaierait. En résumé, une société hiérarchisée n’est possible que sur la base de la pauvreté et de l’ignorance. ».

Ce livre est à lire et à relire, car notre propre société évolue, mais l'idéologie présentée par George Orwell est bien présente, même si elle prend des formes différentes suivants les années ou les technologies utilisées ... (novlang ou épuration de la langue, télécran ou l'écran à tout faire, contrôle des médias avec la création des faits, que ce soit des guerres ou des rubriques nécrologiques, la ré-écriture de l'histoire pour les gouvernements, ...).

De toute la littérature, cette oeuvre est pour moi la plus importante, certainement pas pour ses qualités romanesques - après tout, c’est assez lourd et froid – mais plutôt pour l’envergure du message, d' une profondeur rarement égalé en Littérature romanesque, j' entends.

On parle d’anticipation, de récit futuriste. Pourtant, nous ne sommes pas si loin de basculer dans un régime totalitaire tel qu’inventé par Orwell, en raison de deux facteurs a) la technologie b) la déresponsabilisation du citoyen. En effet, les sociétés occidentales, engagées sur la lente pente de la déchéance, ont abdiqué presque tous leurs pouvoirs aux gouvernements. Les gouvernements ont leur nez dans à peu près tous les aspects de notre vie – éducation, santé, travail, finances, entreprise privée, consommation etc.

Quand on demande à la population – Êtes-vous d’accord avec l’installation de caméras dans la ville pour contrôler la criminalité, la population répond OUI – Voulez-vous que le gouvernement s’occupe de nettoyer l’internet, la population répond OUI - Devrions-nous durcir telle ou telle loi, la population répond OUI.

Mais je m’éloigne de 1984, cet exercice prémonitoire absolument fabuleux, traversé de moments de génie. Je pense au boulot de Winston, dont la tâche est de ré-écrire les publications du passé, changer les promesses du parti, pour refléter la réalité du moment. Aussi, à ce personnage de Parsons, fidèle membre de cette société fabriquée, tellement endoctriné que même lorsqu’il est arrêté pour avoir parlé contre le parti dans son sommeil, il croit ferme que sa punition est légitime. Terrifiant.

Non, la menace ne vient pas de la classe politique, elle vient de nous-même! Nous avons toujours les gouvernements que nous méritons.

Sur ces sages paroles, Je vous souhaite une bonne lecture. Portez vous bien. Et, n' oubliez pas : " Big brother is watching you !! ". Tcho.
ClementLeroy
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Créée

le 23 janv. 2015

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San  Bardamu

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