On dirait le sud.

Coucher de soleil,ou Coucher de soleil et autres croquis de la Nouvelle-Orléans (ou encore *New Orleans Sketches*dans la douce langue d'Andrew Jackson , comprendra qui pourra ) est un recueil de nouvelles écrites et compilées par William Faulkner en 1958.Faulkner fait partie de ces auteurs classiques que les petits américains , de Chicago à la cambrousse du Nebraska , apprennent très tôt à connaitre et reconnaître-comme Racine , ou Hugo chez nous.Plus comme Zola ou Pagnol , en vérité ; j'ai d'ailleurs toujours surnommé Faulkner "le Pagnol américain" car il y a dans ses récits un élan régionaliste , un élan de ce terroir si particulier qui s'étend sous la ligne Mason-Dixon.
Dans ces croquis , on est propulsé dans la poisse ambiance de la Louisiane avec ses marécages , ses coupes-gorges transcendés par l'étuve tropicale , ses collines où subsistent des communautés recluses et son racisme ambiant.Et de racisme , il en est souvent - très souvent - question dans les œuvres de William Faulkner.
Oui,plus ou moins car que dire de Coucher de soleil ? Ce n'est certainement pas l'oeuvre majeur de Faulkner , mais elle possède en elle tout le sel de cet auteur si particulier.On retrouve Willy dans quelques détails : l'ambiance en général , l'aspect toujours plus misérables de ses protagonistes et surtout-sinon ce ne serait pas du Faulkner-cette pluralité de points de vues , et de philosophies qui classent ces récits , ces croquis , dans la droite lignée des œuvres complexes où s’entremêlent différents personnages , plus ou moins viciés , plus ou moins rêveurs.Coucher de soleil , c'est la démonstration en à peine 112 pages du talent schizophrénique , ubiquiste , qui pondait en 1929 Le bruit et la fureur.
Certes ici pas de continuité , pas de logique entre ces portraits multicolores dressés dans ce séchoir à âmes qu'est la Nouvelle-Orléans et ses environs (et ses latitude , pour ce qui est de Yo Ho et deux bouteilles de rhum , dernier récit de l'oeuvre se déroulant en Asie du sud-est) mais une sacralité hors du commun qui rend toutes ces vies-dont Faulkner est le spectateur direct,parfois-bafoués comme l'a été le sud.
La nouvelle qui donne son titre à ce recueil fut la plus incroyable de ma lecture.Parfois , j'avais la sensation d'avoir sous les yeux un court-métrage stylisé.L'ambiance qui y régnait etait unique , et le message loin d’être univoque.Car,encore aujourd'hui,Faulkner fait débat.Surtout de ce coté ci de l'Atlantique , je vous l'accordes-surement parce qu'on a rien d'autre à foutre que donner des leçons à la culture "évidemment suprématiste et raciste" des Etats-Unis.On reproche à Faulkner ce que l'on ne devrait pas lui reprocher : traiter de préjugés , et définir une atmosphère où la dignité de toute une caste périclitante s'effondre sur les communautés qui remontent la pente.Voila de quoi parle Faulkner , d'une Dixie plurielle où noir , blancs , immigrés européens et jaunes se côtoient de manière houleuse , autant que de manière totalement désintéressé.Il y a de cela aussi chez Faulkner.Du désintérêt. Et c'est bon à lire.
Pour ma part , je vous conseille vivement ce petit recueil. Et si vous désirez une démonstration plus large traitant de cette contemplation détaché des anciens Etats-Confédérés je vous conseilles le génial Sartoris du meme auteur.Il y a du Zola chez Faulkner , comme il y a du Pagnol et du Maupassant.Si vous avez votre compte niveau rudesse littéraire Française , rabattez vous donc là dessus.