Présenté comme le précurseur de "l'essai romancé économico-policier", appuyé par des encouragements qui ne tarissent pas d'éloges "Lire John Marcus est un acte citoyen du monde" (rien que ça ?) et armé d'un titre idéal... L'homme qui rêvait met en condition son lecteur dès la 4e de couverture, et le laisse en droit d'attendre beaucoup. Une campagne marketing intéressante, mais peut-être trop osée.

John Marcus a fait le pari qu'il était possible d'associer librement les genres, l'assume et le revendique. Mais lorsque le tragique de nos quotidiens intervient dans la fiction, que reste-t-il au lecteur pour s'évader de la réalité ? Car L'homme qui rêvait n'est pas du Zola : il ne choisit pas d'encrer des comportements et des injustices dans une existence fictive mais, au contraire, il livre des réalités économiques et sociales sans prendre la peine de les rattacher au récit. L'auteur aborde tant de soucis économiques, de drames politiques et de mythes d'un autre âge qu'il oublie que donner une âme à ses protagonistes est la première règle de la fiction ; et ce n'est pas l'humour un peu potache, simplet, voire provincial (les surnoms, la tomme d'Aubrac, les blagues-clichés entre policiers, le public hilare à chacune des interventions du sénateur Aristote) qui permet d'insuffler la vie.

Paradoxalement, L'homme qui rêvait fait de l'économie son cheval de bataille et prend largement le pas sur le reste du livre. Car avant d'être un roman policier, l'auteur se donne la difficile tâche d'expliquer le monde dans lequel nous vivons, ses ressorts et ses crises d'une manière suffisamment simple pour qu'elle soit compris par tous. Et il semble désirer ce discours si limpide et compréhensible qu'il est omniprésent, comme si le programme présidentiel du sénateur Aristote résumait l'homme ; dont l'assassinat, qui fait pourtant office d'élément perturbateur, n'est quasiment pas abordé...La légende du roi Midas, la sociologie du travail, le totalitarisme rouge, les tribulations du FMI (demandez donc au peuple grec), "400 personnes s'approprient 50% des revenus annuels de l'humanité"... sont des faits rabâchés durant la scolarité ou dans les médias, quotidiennement.

En conclusion, il me semble donc que L'homme qui rêvait, malgré certaines remarques fines et intelligentes, se perd dans les banalités économiques, en fait souvent trop ("Nous ne devions rien attendre de l'Histoire parce que, en réalité, l'Histoire attendait tout de nous", par exemple) et oublie que la notion de "romancé" nécessite avant tout de fournir au lecteur un univers solide auquel il s'attachera.

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le 21 mai 2011

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