Danse quand la lune chante, et ne regrette pas ce qui n'est pas encore arrivé


Il reprit et inspira profondément tout en me considérant de ses yeux à peine plus foncés que la neige :
- Tu te souviens, j'ai toujours dit que les loups-garous n'étaient pas très différents des autres grands prédateurs ? « Ils sont comme le grand requin blanc ou le Grizzly », disait-il.
- En effet, répondis-je.
- Les grizzlys n'attaquent pas les membres de leur famille, Mercy. Ils ne sont pas sans cesse affamés de sang et de violence. (Il ferma de nouveau les yeux.) Il y a quelques jours, j'ai failli tuer ma fille parce que je n'étais pas d'accord avec ce qu'elle disait. Si Brad n'avait pas été dans le coin... (Il secoua la tête d'un air désespéré.) Je suis devenu un monstre, pas un animal. Je ne pourrai plus jamais pratiquer la médecine vétérinaire. Et ma famille ne sera pas en sécurité tant que je serai vivant.
Ce dernier mot raisonna dans le silence qui s'installe entre nous deux.




N'affame jamais un loup-garou, où il voudra t'avoir à dîner



Mercy Thompson, tome 1 : L'appel de la lune, est le premier volume d'une saga littéraire écrite par Patricia Briggs. Un bit-lit dans lequel l'on suit Mercedes Athena Thompson, alias Mercy Thomson, une mécanicienne à son compte spécialisée dans les Volkswagen située dans les Tri-Cities (qui rassemblent les villes de Kennewick, Pasco et Richland), dans l'État de Washington où se côtoient dans l'ombre un univers fantastique composé des loups-garous, des vampires, des sorcières et autres créatures des ténèbres. Mercy est une changeuse de peau capable de se transformer en coyote. Une orpheline élevée par l'une des races les plus instables, dominantes et dangereuses : "les loups-garous", qui l'ont durant un temps imparti "accepté" dans la meute malgré ses différences jusqu'à ce qu'elle soit en âge de vivre seule. Une particularité qui fait le caractère bien trempé de la jeune femme qui se révèle être un personnage principal attractif et savoureux. Mercy est indépendante, têtue, sarcastique, douce, dure, sensible, courageuse, râleuse... Autant de qualités et de défauts qui en font un personnage complet que l'on prend beaucoup de plaisir à suivre. Une femme avec du répondant qui n'attend pas après les autres pour agir, ni pour être sauvé de situations périlleuses, sans pour autant être une tête brûlée vu qu'elle a parfaitement connaissance de ses limites. Des compétences non négligeables puisque Mercy est un véritable aimant à emmerde malgré une vie routinière qu'elle chérit plus que tout. Une routine qui va être ébranlée lorsqu'un jeune loup-garou apparemment en fuite lui demande du boulot dans son garage, entraînant avec lui son lot d'embrouilles.


L'appel de la lune se présente comme une enquête fantastique où se mêle plusieurs sous-intrigues s'articulant autour d'une intrigue principale réfléchie savamment agrémentée en mystère, en action, en drame, en humour, en tension et partiellement en romance. Une histoire intrigante racontée du point de vue de Mercy. 16 chapitres que l'on parcourt avec facilité à travers une écriture fluide et dynamique qui ne commet (presque) pas l'erreur de plomber le récit en sous-intrigues inutiles. Parvenant même à s'émanciper du triangle amoureux quasi obligatoire pour ce genre de roman. Seul le chapitre 8 tombe dans une gratuité inutile totalement pardonnable autour d'une romance gay interdite entre un loup-garou et un humain. Je suppose que c'était le petit fantasme de l'auteure qui voulait se faire un petit kiff. À mesure que l'on tourne les pages on se laisse transporter dans l'univers de Mercy où va se jouer un complot intelligemment construit autour d'une menace qui trouvera son origine sur un élément tragique grandement dramatique, injuste, réfléchi et astucieux. Une écriture qui va avec ingéniosité échapper aux clichés pour surprendre le lecteur avec une approche inattendue de l'action qui amène son lot d'originalité dans les confrontations même si sa manque d'un peu de folie.



« Tu aimeras ton ennemi », disait la Bible. Ce à quoi ma mère adoptive ajoutait toujours : « Ou, au moins, tu seras polie avec lui. »



La richesse de ce premier tome réside dans l'élaboration du loup-garou. Que ce soit dans la structure d'une meute, le comportement de prédation, jusqu'à la transformation, l'exposition dramatique est gravement conséquente. Être un lycan, ce n'est pas si cool. Une description engageante sur une mythologie savamment orchestrée et entretenue par le biais d'une créature complexe évoluant au sein d'une meute rassemblée autour d'un Alpha. L'organisation sociale des loups-garous est ingénieusement encadrée par une approche qui ne manque pas de surprise avec un leader qui chapeaute tous les Alpha : «le Marrok». Le Marrok prend toutes les grandes décisions pour les meutes d'Amérique du Nord, laissant les Alpha gérer le reste. Avec les loups-garous tout est une question de contrôle et de rapport dominant-dominé avec des moeurs bien précises où la faiblesse se paye chère. Un enjeu constant de pouvoir avec lequel Patricia Briggs va parfaitement jouer par le biais de deux lycanthropes : ''Adam Hauptman'', Alpha de la meute des loups-garous de Tri-Cities ainsi que du bassin de Columbia, et ''Samuel Cornick'', Alpha au service de son père Bran qui n'est autre que le Marrok et partiellement le père adoptif de Mercy. Deux Alpha puissants liés à notre coyote qui va devoir composer avec eux pour pouvoir survivre et résoudre l'enquête. Une tâche difficile où Mercy Thompson se retrouve plongé dans une lutte de pouvoir intense et dangereux entre les deux mâles qui la voient comme un trophée d'appropriation à la gloire de la dominance bestiale des lycans. Un océan de testostérone dans lequel notre mécanicienne va devoir s'imposer, mais pas trop, sous peine de se faire dévorer.


Côté vampires, là aussi la surprise est de guise avec des suceurs de sang bien flippant. Des créatures qui n'ont rien à voir avec celle de Twilight, offrant un portrait dangereux encore secondaire pour ce premier tome mais qui je n'en doute pas trouveront plus de place dans les suivants. Un chapitre entier est dédié au vampire par le biais d'un périple glauque frissonnant où Mercy se retrouve plongé dans un essaim confiné sous terre face à Signora Marsilia, maîtresse de l'Essaim du Mid-Columbia auquel obéi Stefan, le seul vampire avec qui Mercy est plus ou moins lié. Un vampire qui n'est autre qu'un client de son garage avec son mini-van faisant un clin d'œil à Mystery Machine de Scooby-Doo. Une allusion bienvenue qui sera suivie de quelques autres comme par exemple avec Buffy contre les vampires. Une belle palette de personnage organisée autour de la géniale Mercy Thompson à travers une conduite d'écriture fonctionnant dans une logique stabilisatrice servant de base solide aux autres tomes à venir. Une première construction qui de manière générale parvient à poser son contraste, son environnement et ses personnages par le biais d'une enquête efficace où le folklore et le réel se conjuguent pour un résultat divertissant.



CONCLUSION :



Mercy Thompson, tome 1 : L'appel de la lune, de Patricia Briggs, est un premier volume efficace qui pose les bases d'une saga littéraire comptant un des personnages féminins les plus savoureux : Mercedes Athena Thompson, alias ''Mercy Thomson''. Accompagner des deux loups-garous Alpha ''Adam'' et ''Samuel'', Mercy va vivre un périple haletant où les enjeux de pouvoirs primaires et bestiaux des lycans vont s'ajouter à la difficulté de son enquête périlleuse. Difficile d'être une jeune femme affriolante au milieu de deux lycans territoriaux qui ne rêvent que de s'accoupler avec notre coyote qui montre elle aussi les crocs.


Une introduction efficace pour un résultat convaincant : ça commence bien !



Les loups-garous mettent jusqu'à un quart d'heure à totalement changer de forme et le processus est très douloureux, ce qui est bon à savoir. Les loups-garous ne sont déjà pas les plus aimables des animaux, mais quand ils viennent de se métamorphoser, disons qu'il vaut mieux ne pas les asticoter pendant un moment. La métamorphose des changeurs est instantanée et indolore, enfin, la mienne, en tout cas, vu que je suis la seule changeuse que je connais. À un moment, je suis humaine, et la seconde d'après, hop, magique ! Je suis un coyote. Je passe d'une forme à l'autre aussi facilement que d'une pièce à l'autre.


B_Jérémy
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le 5 août 2022

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