Écrit trois ans avant sa mort, je devine le récit d'un esprit en fin de vie. Par ses longs atermoiements sentimentaux, et sa fin abrupte qui tranche avec le rythme du roman, on retrouve la formule stendhalienne typique : celle des passions torturées, des âmes prises au piège, des instants de bonheur fugaces au milieu de tant de doutes, d'incertitudes. Cette formule a fait ses preuves, c'est toujours une expérience particulièrement émouvante de se plonger corps et âme dans un de ses récits. Il excelle dans l'art de décrire les pensées parfois si contradictoires de ses personnages, dressant une véritable cartographie des coeurs, en plus parfaitement ancrée dans l'époque.
En effet, on a encore droit à beaucoup de repères historiques, géographiques, avec des descriptions assez poussées et des intrigues secondaires qui font office de trêves respiratoires au milieu des passions suffocantes. Alors je ne mets que 6 car j'ai l'impression que le roman aurait pu être élagué, qu'il tourne presque trop en rond, comme une caricature de son style. C'est peut-être sévère et, au fond, cette histoire m'a touché et j'en garde des images marquantes : la comtesse face au temps qui passe, face à la mort des passions, Fabrice au comble du bonheur en prison, etc. Il y a quand même plein de passages que je garderai en moi.
Mais bon, après avoir plus ou moins fait le tour de Stendhal, difficile pour moi d'être transcendé outre mesure, j'ai l'impression d'avoir été tellement marqué par Armance que rien de ce qu'il a écrit ensuite n'a réussi à venir s'ériger au-dessus. Bref, je suis quand même content d'avoir bouclé la boucle, et je ne doute pas du potentiel du roman à s'inscrire sur la durée dans mon esprit, quitte à pourquoi pas en relire des chapitre entiers un jour !