Mattis et Hege. Un frère et sa sœur menant une existence solitaire sur les rives d'un lac. Hege a quarante ans, un corps de jeune fille et de longs cheveux qui commencent à grisonner. Du matin au soir, elle s'affaire à son tricot et pourvoit ainsi aux besoins de la maison. Quand vient la nuit, elle pleure sur l'insignifiance de sa vie. Lui ne travaille pas, en est tout bonnement incapable : malgré toute sa bonne volonté, ses pensées l'envahissent, le subjuguent jusqu'à interférer avec l'action de ses mains. Impossible d'apprendre le métier de bûcheron, impossible également de démarier les raves. Pris dans un tourbillon de pensées, il n'est plus capable de rien d'autre, au grand dam de sa sœur.
Car Mattis pense, ne cesse pas de penser : pourquoi ces bécasses passent-elles au-dessus de leur maison ? Pour quelle raison obscure la foudre est-elle tombée sur les deux arbres portant leurs noms ? Qu'annonce la mort de la bécasse, gisant maintenant sous une pierre ? Dans l'univers de Mattis, tout fait sens. Les forces de la nature lui envoient des signes qu'il s'efforce quotidiennement de comprendre, jusqu'à l'ordalie finale. Et quand il se heurte à l'indifférence des « forts et des sages », incapables de saisir la portée symbolique d'une passée de bécasses au-dessus de sa maison, il tombe des nues. « Mais je dis que ça passe maintenant, déclare-t-il à sa sœur. Et tu ne veux pas en être ? Je ne comprends pas comment tu es faite, y'a rien d'important pour toi, alors ? ».
Dans Les Oiseaux s'affrontent et coexistent deux mondes, deux systèmes de pensée. Le premier, celui de Hege et de "tous les forts", un monde où les pensées restent bien à leur place, où l'on ne s'intéresse à la passée de bécasses que par esprit de chasse, où l'on se lève le matin pour aller travailler et subvenir à ses besoins, où il est simple d'apprendre le métier de bûcheron, où les phénomènes naturels sont dénués de dimension symbolique. Le second, celui de Mattis, où l'on flâne à longueur de journée, où les empreintes d'un oiseau forment un message sur le sol, où rien n'advient jamais par hasard, et où l'homme est dominé par des forces qui décident de son destin.