Dan Fante est un fils de. Chance ou malchance, le débat est ouvert. Manque de bol ou de jugeote, le petit a choisi d'emprunter une voie strictement similaire à celle de Papa, ce "fils de pute sublime" à qui il dédicace son roman. Alcoolisme, délinquance et écriture, le cocktail explosif de l'Amérique mal dans sa peau. L'héritage est lourd à porter. L'ancien est un précurseur en la matière, une sorte de génie adulé par une génération entière, le grand Bukowski en tête. Une gageure donc, un défi peut-être.

L'alter ego de Dan, Bruno, est alcoolique dans la cité des anges. Il vit de petits emplois sans avenir, essentiellement taxi dans cet ouvrage. Il écrit pour exorciser les démons de la boisson, pour crier au monde son mal-être et son rejet d'une société prude et bien pensante. A l'occasion il se bat. Parfois avec un stylo. Il "passe jours et nuits seul si possible à boire, lire et écrire, ou juste boire".

Ça vous rappelle quelqu'un?

Il est dès lors acquis que Dan Fante ne recevra pas ce jour la palme de l'originalité. Toutefois, l'absence d'originalité n'empêche pas l'inspiration littéraire. Et de ce côté là, le bougre tire clairement son épingle du jeu. A croire que le talent est inscrit dans les gênes. On retrouve avec plaisir le verbe si imagé du père, si riche, si vivant. Le tout remis au goût du jour et agrémenté de la touche personnelle de Dan bien sûr. Faut pas exagérer, on est bien loin du plagiat. Le paternel a visiblement transmit à son rejeton le don pour les belles phrases qui le caractérisait. Tout comme lui, Dan Fante parvient systématiquement, avec l'air de ne pas y toucher, à nous en mettre plein la vue. Bêtement, en mettant les bons mots au bon endroit. L'écriture primitive.

Oui, John Fante a ouvert la voie. Il l'a même balayée de long en large. Oui, Dan innove peu ou pas. Oui, la perpétuelle et inévitable comparaison avec son père terni l'image de son œuvre. Oui, Dan se veut cru et l'est parfois trop, se faisant alors tristement vulgaire.
Mais son talent pour l'écriture fait oublier tout ça.

Ces nouvelles, si superficielles et dépareillées qu'elles puissent paraître, sont pourtant porteuses d'une idée d'ensemble. Ce livre est un manifeste. Le manifeste d'un homme en colère qui peine à trouver sa place et nous offre ses pensées, ses idées. Bien après la dernière page, Dan Fante, comme son père avant lui, nous amène à réfléchir sur ce que nous sommes, sur nos actes, nos choix.

Heureusement qu'il existe encore des écrivains de cette trempe.
-IgoR-
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le 10 févr. 2014

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-IgoR-

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