Des romances à en perdre la tête

* Critique originale disponible sur Duotaku no Sora *

En prenant le train pour aller au lycée, Makoto finit par tomber sous le charme d'une fille qu'il croise dans le wagon chaque matin. Le jour de la rentrée, il se retrouve aux côtés de Sekai qui va découvrir son secret.

Elle se décide alors à aider son camarade Makoto qui fera tout pour sortir avec la fameuse fille qui est dans une autre classe que la sienne, Kotonoha.

La romance multiple

S'il est vrai qu'on a déjà parlé de shôjo sur ce blog, on a généralement parlé d'œuvres classiques avec des codes bien précis qui ont eu tendance à disparaître ces dernières années. Mais aujourd'hui on va parler d'une œuvre qui si elle semble elle aussi très classique à première vue a très vite bouleversé ces codes. Une œuvre qui généralement est soit adorée, soit détestée. Aujourd'hui en ce jour de romance, il est l'heure de parler de School Days !

Âmes sensibles, s'abstenir.

Au vu du résumé, tout ce que l'on peut attendre de School Days est une romance classique qui va nous montrer la relation naissante entre Makoto et Katsura et son évolution… sauf que ce ne sera pas du tout le cas ! School Days commencera de cette manière jusqu'au premier quart de l'anime où l'on suit une romance somme toute basique jusqu'à la fin du cinquième épisode, car les choses finissent par changer avec l'apparition du traditionnel triangle amoureux. Un triangle amoureux qui va bouleverser toute la suite de l'anime puisque celui-ci va envoyer valser tous ces codes pour devenir une romance glauque, sombre et quasi-malsaine jusqu'à la fin qui sera pour le moins… surprenante... On en vient à se demander ce que l'on vient de regarder !

Car en effet, si vous vous attendez à un anime qui conte une romance mignonne avec un couple d'amoureux transis se jurant de s'aimer jusqu'à la mort... vous vous mettez le doigt dans l'œil !

Mais que raconte donc School Days dans ce cas ? Sans trop en dire, disons que vous y suivez un antihéros qui ne sera pas foutu de se remettre en question, qui sans fournir aucun effort va parvenir à se créer un harem et coucher avec plusieurs filles, puis leur mentir et les tromper sans jamais être inquiété, alors qu'à la base la seule fille dont il était réellement amoureux possédait toutes les qualités et demeurait parfaitement proportionnée à la japonaise – en somme une jeune fille qui devrait être pliée en deux avec une scoliose puisqu'elle fait du 90H –.

Ainsi une histoire qui va diviser puisque l'on va suivre un manipulateur pour qui l'expression "Le cerveau au bout de la queue" n'aura jamais aussi bien défini un personnage. MAIS une histoire intéressante malgré tout puisqu'à travers son quotidien, on va voir ce qu'endurent ses prétendantes et les répercussions que leur relation avec lui vont avoir sur elles. La dépression, l'abnégation, le traumatisme d'une première rupture ou encore le harcèlement scolaire, les thèmes traités dans l'anime sont durs. Et ils deviendront de plus en plus sombres, on remarquera bien le changement d'ambiance entre le premier et le dernier épisode dans lequel les personnages feront pitié tant ils n'auront plus rien à voir avec ce qu'ils étaient au début de l'histoire. Et la narration n'aide pas, puisque si l'on retrouvera les traditionnels festival de l'école et autres clichés habituellement mignons, l'histoire elle se se focalisera principalement sur Makoto qui aura des pensées de plus en plus subversives. Et les rares histoires annexes se rapporteront au final toujours à notre anti-héros.

Un trio lamentable

Par ailleurs, parlons-en des personnages qui seront nombreux mais dont au final seulement trois serviront réellement à l'histoire principale. Le premier auquel on va se consacrer n'est autre que Itô Makoto. Si Makoto demeure très lisse au début de l'anime, ne s'accrochant qu'à son amour pour Kotonoha, il va rapidement devenir détestable puisque bien qu'ayant réussi à concrétiser son amour idyllique, il se rendra compte avoir tiré son coup qu'il s'ennuie avec la jeune fille en question. Et à chaque fois qu'on lui demandera de se justifier, notre "héros" sera incapable de donner une réponse ou simplement d'être honnête avec son entourage. Au contraire, il préférera rester muet et ne rien dire, laissant la tempête passer et allant chercher une autre fille en attendant de trouver un échappatoire à sa relation actuelle. Vous l'aurez compris mais le personnage principal demeure vraiment insupportable tant il ne se remettra jamais en question et jettera toutes les filles comme des mouchoirs Kleenex après utilisation.

À ses côtés, on trouvera donc Katsura Kotonoha, la jeune fille qui tombera rapidement sous le charme de Makoto. Kotonoha est une fille timide et renfermée, victime des filles de sa classe qui la harcèle (Pourquoi ? On ne sait pas…) et qui se fera vite tromper par Makoto car il la trouve, je cite, ennuyeuse. En résumé, Kotonoha est une victime qui se persuadera que Makoto s'intéresse à elle et se refusera à croire le contraire malgré les preuves accablantes. Une jeune fille qui évoluera énormément dans la dernière partie et de manière assez surprenante, encore plus quand on recontextualise l'anime à son époque où ce type de personnage se faisait encore plutôt rare. En résumé, un personnage qui fait pitié tant elle en prend plein la face durant toute une majeure partie de l'anime.

Enfin reste Saionji Sekai, la jeune fille qui va chercher à aider Makoto à sortir avec Kotonoha en lui expliquant quoi faire dans sa relation et en lui conseillant de prendre son temps au vu de la timidité de Kotonoha. Des bons conseils qui vous vous en doutez tomberont dans l'oreille d'un sourd. Mais Sekai comme les autres personages évoluera également, passant de bonne poire à fille perturbée à tendance bipolaire dans les derniers épisodes. L'anime nous fera rapidement comprendre l'origine de ce changement qui n'est autre que Makoto. Suite à cela, Sekai deviendra elle aussi une victime, moins passive que Kotonoha malgré tout, mais qui souffrira elle aussi énormément de l'influence que le jeune homme exercera sur elle.

Vous l'aurez compris mais on a affaire à des personnages particuliers qui chacun montreront ce qu'il y a de pire dans l'être humain. Que ce soit la tromperie, les mensonges ou encore la manipulation, aucun des personnages ne sera épargné, et les personnages secondaires qui graviteront autour d'eux n'y changeront rien puisqu'on ne saura finalement rien d'eux.

Et c'est bien normal puisqu'au final l'anime demeure extrêmement rushé. Rien de surprenant puisqu'à l'origine School Days est un eroge dans lequel il existe de multiples routes aux nombreux embranchements, chacun amenant à de bonnes ou mauvaises fin (et diverses scènes plus ou moins érotiques). Cela expliquera pourquoi l'anime peut paraître expéditif avec de nombreuses filles qui tomberont tout à coup sous le "charme" du protagoniste puisque l'anime sera un mélange de toutes les routes possibles du jeu, si bien que beaucoup de personnages ne serviront que de coup facile pour Makoto, et le format court de 12 épisodes n'aidant pas non plus à développer l'histoire.

Pas de fan-service gratuit

Concernant l'animation, on ne va pas se mentir, c'est moche. On ressent que l'anime a eu peu de budget, servant principalement de pub au jeu original. Les chara designs sont grossiers, si bien que dans certaines scènes les personnages sont cubiques. Les décors non plus ne sont pas terribles et les couleurs demeurent très ternes. Cependant on ne peut nier le travail effectué sur l'ambiance qui parvient à devenir réellement pesante au fur et à mesure des épisodes. Le changement d'ambiance entre la première et la dernière partie se ressent énormément et est une belle réussite.

Les musiques elles sont facilement oubliables malheureusement, et l'anime possède également beaucoup de silences, ce qui n'aide pas. L'Opening se veut faussement joyeux et demeure au final assez trompeur, tout comme l'Ending simple et calme qui remplit sa fonction.

Ainsi on est face à un anime assez étrange, voire repoussant tant Makoto est un personnage exécrable, et les répercussions sur les personnages secondaires sont déchirants tant la plupart finissent brisés. Malgré tout, on ne peut nier que le changement d'ambiance entre les premiers et derniers épisodes reste bien mené. De même pour les personnages qui au lieu d'évoluer vont finalement régresser pour dévoiler leurs pires aspects qui les rendront au bout du compte tous misérables. Enfin on peut saluer les réalisateurs car malgré toutes les scènes de sexe suggérées dans l'anime qui auraient été la parfaite occasion pour faire du fanservice facile, il n'y en a quasiment pas en dehors de quelques plans culottes, bien que l'on n’échappera pas à l'habituel épisode à la piscine. L'équipe est donc restée assez propre et on ne peut que la saluer sur ce point !

L'amour vache

Ainsi que dire de School Days ?

Disons-le, cet anime jouera surtout de sa surprise, mais avouons-le, le personnage principal deviendra réellement détestable au final. Malgré tout, l'anime aura su jouer des codes classiques de la romance lycéenne pour les détourner de manière habile. Un joli tour de force pour la période où il a été diffusé où ce genre d’initiative se faisait encore rare !

Ainsi l'anime est fascinant en raison de la déconstruction de ses personnages qui deviennent tout simplement méprisables. Et si je devais en rajouter, je dirai que pour sa fin, l'anime vaut le coup d'œil au moins une fois. En dehors de ça, School Days ne me restera guère en mémoire en raison de sa première partie peu passionnante et de la seconde bien trop rushée pour réellement convaincre. Un anime finalement assez oubliable une fois la surprise passée.