666.667 Club
7.6
666.667 Club

Album de Noir Désir (1996)

Noir Désir, chapitre 4 : « 666,667 club »

Considéré comme le meilleur album de Noir Désir par de nombreux fans et comme un grand classique du rock français…666,667 club (quel nom étrange quand même!) est bel et bien un des réels chefs d’œuvres de la discographie de Noir Désir…Il s’agissait en tout cas bel et bien là de l’album de la reconnaissance artistique et commerciale pour le groupe à l’époque, et ce, grâce à des tubes imparables et nombreux!


En effet, avec des titres comme « Un jour en France », « L’homme pressé », « A ton étoile », « Fin de siècle », « Comme elle vient » l’album ne pouvait que fonctionner… 5 tubes c’est un record pour un album de Noir Désir…eux qui n’en contenaient jusque là que deux ou trois grand maximum! Mais 666,667 club n’est pas qu’une usine à tube, c’est également un disque fabuleux où le groupe prend la peine de ne reprendre de Tostaky que les meilleurs côtés (un son lourd, légèrement urbain et ne lésinant pas sur le blues) et abandonnant ce qu’il pouvait encore y avoir (rarement) de maladroit dans celui-ci (des rythmes pas toujours efficaces, et des mélodies parfois trop discrètes…). Quant-au son, il est nettement plus « propre » que sur l’album précédent, plus fin, plus soigné, moins bordélique….la production (sans atteindre les sommets olympiens de l’album suivant toutefois) est véritablement réussie : elle met toujours en avant les grosses guitares et embellie la touche « hard-rock » (encore assez présente) du groupe sans jamais la trahir.


Ainsi, « Fin de siècle » après un morceau-titre d’ouverture intéressant (où le saxophone et des influences légèrement jazzy font surface) dévaste tout sur son passage avec un riff de guitare très rentre-dedans et un Bertrand Cantat dont le chant demeure hargneux mais semble avoir légèrement gagné en précision…le tout est ponctué par des envolées vocales et guitaristiques régulières lorsque Cantat se met à parler du « ciel » ou des « cieux » (bien vu). « Un jour en France » synthétise assez bien la nouvelle tournure que prend la musique du groupe ici : engagée comme jamais, ils assassinent ici le fascisme et la montée du FN sans la moindre vergogne avec quelques calembours assez amusants (« On avait les polémiques et on pouvait discuter mais c’est Mickey qui a gagné » « FN…souffrance » « c’est l’heure de changer la monnaie ») sans parler de ce riff de guitare culte et majestueux, et de ce rythme lourd comme le plomb qui semble aussi lourd de sens que les paroles. Pour ce qui est du fameux « Homme pressé » qui demeure à très juste titre un des morceaux les plus connus du groupe, c’est une sorte d’hommage à leur (« camarade ») PDG et de façon générale à tous ces hommes de pouvoir ambitieux et corrompus jusqu’à l’os où sur un rythme funky Bertrand Cantat déverse un flow avec une énergie et une rigueur époustouflante sur les couplets et des montées de voix ahurissantes sur les refrains…une tuerie! « A ton étoile » joue la carte du rock mâture et apaisé, plein de poésie et de tendresse, tandis que « Comme elle vient » se la joue cavalcade rock, épique, et juvénile et démontre par là-même que Saez doit énormément à Noir Désir…


Hormis ces singles majestueux, l’album se permet des efforts de recherches musicales qu’il ne se permettait pas à ce point jusqu’à présent. Le morceau-titre d’ouverture (déjà évoqué plus haut) qui demeure le seul morceau instrumental du groupe à ce jour est un bon exemple d’innovation avec ses cuivres et ces incantations vocales de Bertrand Cantat qui semble faire intervenir de façon subtile des influences de pays lointains. C’est même l’orient qui semble convoqué sur le superbe et lancinant « Ernestine » (avec des montées dans les aiguës d’un Cantat frôlant le génie), sans parler des « Persiennes » dont les paroles et l’ambiance semblent clairement évoquer les mille et une nuits, l’usage des cuivres est par ailleurs parfaitement réussi et n’est pas sans rappeler les grandes heures du rock du début des années 70 (sur l’album « Fun house » des Stooges).


Les deux morceaux chantés en Anglais sont plutôt bons (surtout « Lazy ») bien que je ne sois pas trop fan de l’accent du père Cantat sur « Prayer for a wanker » qui est, il faut bien le reconnaître, ultra « frenchy ». L’album se conclut sur deux chansons douces et gracieuses…la seconde « Septembre, en attendant » très intimiste est d’une beauté assez peu commune, Bertrand y atteignant des sommets en terme d’écriture…je met au défi n’importe qui de me trouver en France un aussi bon parolier que lui à l’heure actuelle! La piste « cachée » (« Song for jlp ») est une sorte de blues acoustique et torturé sur lequel Cantat se bousille les cordes vocales sans trop nous bousiller les oreilles…intéressant!


Dépourvu de réelle faiblesse, bourré de qualités, riche tant dans sa volonté d’éclectisme que dans ses paroles qui sonnent plus justes que jamais, « 666,667 club » est un classique du rock (pas seulement français) qui se doit de figurer dans toute discothèque d’un amateur appréciant le style… Ce n’est pas le premier chef d’oeuvre du groupe, « Veuillez rendre l’âme » 7 ans auparavant ayant déjà bien marqué les esprits, mais c’est assurément le premier (et seul) album du groupe absolument irréprochable dans une veine rock « musclé ». Si « Tostaky » n’était déjà pas loin de la perfection, « 666,667 » la caresse de très très près…il suffira d’entendre l’album suivant (le dernier malheureusement) pour se rendre compte que…oui…aussi incroyable que ça puisse paraître le groupe pouvait aller encore plus loin en dépassant les frontières imposées par le rock…

Venomesque
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le 4 sept. 2017

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Venomesque

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