J'ADORE Terrorizer. Enfin, j'adore ce qu'il était à sa première formation, celle qui a accouché de Nightmares, du split avec le Nausea ci-chroniqué et surtout, surtout, de World Downfall. La résurrection de Terrorizer dès 2006 est un bide artistique monumental, même si le Caustic Attack de 2018 est assez sympathique pour valoir une écoute. Comment, mais ô comment la formation qui a pondu l'un des albums les plus fondateurs du grindcore ET du death metal, au line-up composé de légendes tout aussi fondatrices, a pu se planter autant sur son retour et devenir une telle blague ?
Ben la réponse elle est chez Nausea, en fait. C'est Oscar Garcia. Le chanteur de Terrorizer, qui était aussi son guitariste avant World Downfall, et qui était AUSSI membre de Nausea à l'époque, au point que plusieurs titres de Nausea avaient été retravaillés pour être enregistrés sur World Downfall faute d'avoir assez de titres. Totalement éclipsé par les carrières fulgurantes de ses comparses Pete Sandoval et Jesse Pintado, presque tout le monde a oublié que le VRAI coeur de Terrorizer, c'était Oscar Garcia. Pas juste sa voix, mais son talent d'écriture, qui certes consistait majoritairement à singer Master / Death Strike et à y mettre des blast-beats, mais bordel qu'est ce que c'était EFFICACE. C'était NOUVEAU. C'était inégalé, et ça l'est toujours. La raison principale du succès de Terrorizer, c'était pas juste son batteur de luxe ou le son de Scott Burns, c'était bel et bien les compos visionnaires. Non parce que, vous faites la différence vous entre les titres qui viennent de Nausea et les titres qui viennent de Terrorizer sur World Downfall ? Moi pas, et pourtant je connais les versions originales par coeur !
Après le split de Terrorizer (arrivé AVANT l'enregistrement de World Downfall, on rappelle), Oscar a continué Nausea dans son coin, d'abord dans les 90's où le groupe fut la vraie continuité de Terrorizer après le départ de Sandoval pour la Floride (et Morbid Angel), et il faut l'admettre, les sorties de l'époque n'étaient pas des plus intéressantes (Crime Against Humanity, leur premier album, est d'une molesse triste, et les EP qui suivront pas forcément meilleurs. C'est pas mauvais, c'est juste quelconque).
Ce qui nous amène à 2014 avec seulement le deuxième album de Nausea en presque 20 ans d'existence. Et les choses ont tellement changé dans la scène grindcore depuis : beaucoup plus vaste, beaucoup plus accessible, avec un vivier de musiciens et de techniciens bien plus au fait des codes du genre... Mais aussi plein, plein de musiciens qui ont grandi avec World Downfall et qui comprennent très bien comment ça doit sonner, une compo d'Oscar Garcia.
Et c'est précisément ce qui se passe sur ce Condemned to The Sytem. Oscar est rejoint par des musiciens comme Leon Del Muerte, mercenaire death/grind californien qui a fait ses armes dans des gros noms comme Exhumed et Impaled, et qui comprend parfaitement ce qui doit être faire (y compris quelque backing vocals, histoire de). Et ça donne EXACTEMENT ce qu'aurait dû être un follow-up à World Downfall. Des compos au son, on retrouve parfaitement ce mélange de riffs à la Master / Speckmann et de blast beats, les gros riffs compacts mi-crusty mi-tremolo picking, la voix et le phrasé toujours inimitable de Oscar Garcia soutenu par les cris de banshee de Leon Del Muerte, et cette alternance magique de blast beats et de grooves uniques, qui manquent certes de la fougue que Pete Sandoval pouvait leur transmettre, mais qui sont toujours diablement efficaces autant pour ponctuer le pilonnage que pour faire dodeliner du chef (ou péter des gueules, selon votre personnalité. Moi j'aime péter des chefs.).
Condemned To The System est cependant bien plus crusty que ne l'est World Downfall, laissant une part bien plus grande à des titres binaires Discharge-iens (ou plutôt Disrupt-iens) comme ce Hate & Deception, ou ce Falsely Accused et ses sonirités très british.
Y'a vraiment pas grand chose à dire de plus, en fait, sorti de la contextualisation nécéssaire. Vous avez aimé World Downfall et vous voulez en entendre plus, ou êtes curieux de comment ça aurait pu évoluer ? Bah voilà. C'est cet album qu'il vous faut.
J'aurais comme unique critique à émettre la tendance du batteur à vouloir absolument sonner comme Pete Sandoval, ce qui en soit n'est pas exactement négatif, mais quand certains breaks sonnent directement tirés de World Downfall, l'effet de pastiche est presque désagréable. Mais on oublie très vite ce défaut quand on se retrouve de nouveau confronté au rouleau compresseur.
La sortie de ce Condemned to the System amènera son line-up à créer une version alternative de Terrorizer nommée Terrorizer LA, que je vous invite fortement à aller écouter si vous êtes nostalgiques aussi de World Downfall, cette version là étant beaucoup plus proche de l'originale que ne le sera jamais celle de Sandoval (dont le chanteur n'est pas fichu de se rappeller du titre World Downfall...). Cela résume assez bien cet album, ceci dit. C'est le vrai retour de Terrorizer sous un autre nom.