Tantôt adulé, tantôt détracté par les journalistes, Peter Doherty n'avait jamais vraiment fait l'unanimité à ce jour. Certains lui vouent un culte, d'autres ne veulent pas en entendre parler, Junk Do par ci, Doherty par là: il a été le musicien le plus médiatisé dans notre petit monde de briques et de rock au début des années 2000. Comparé aux grands poètes pour ses paroles travaillées et aux icônes rock des temps passés parfois sans discernement pour son comportement irrémédiablement ingérable, son talent, lui, n'en finit pas de surprendre, comme aujourd'hui. Combien de fois pourtant l'on pût lire ses déboirs alcolisés dont la presse people fût très friante comme ses énièmes retours en cure de désintox ou ses annulations de concerts de dernière minute. Seulement ici, après la dissolution des Libertines avec son ami Carl Baràt (parti entre temps former son propre groupe: The Dirty Pretty Things) et ses aventures de Babyshambles, Doherty, en 2009 avant une probable reformation des Libertines (chose faite aujourd'hui), se consacre à lui-même et son premier album solo.
Album par ailleurs très surprenant, même si l'on connaissait son goût très sûr et pointu pour l'acoustique, celui ci est d'autant plus affirmé dans ce premier album dors et déjà placé sous le signe de l'intimité. Ici, point de guitares saturées brouillones, pas de Pete vociférant "Arbeit Macht Frei", pas de calvacades garage et pas de Libertines ou de Shambles somme toute. L'on découvre un Doherty à fleur de peau, mélancolique mais toujours doué.


Je dois l'avouer, moi aussi j'étais sceptique au départ. A l'époque n'ayant pas apprivoisé le personnage génial un soir et minable l'autre, Peter, capable du meilleur comme du pire (oserai-je citer ici que "c'est dans le pire qu'il est le meilleur"), nous propose ici le tout meilleur. Avec un artwork signé de sa main, le disque se révèle sympathiquement folk, lancinant et teinté d'une rythmique jazz sophistiquée et élégante. Invitation à la ballade donc, Arcady ouvre l'album avec légéreté pour une quarantaine de minutes. On y retrouve des chansons définitivement folks comme I Am The Rain, 1939 Returning ou Arcady, des chansons plus jazzy comme Sweet By & By et son duo piano/cuivres ou la douce Sheepskin Tearaway, une très jolie ballade accompagnée par la chanteuse Dot Allison, et se termine surtout sur cette magnifique dernière piste qu'est Lady Don't Fall Backwards.
Grace/Wastelands, sans réelle faiblesse et où les arrangements de Graham Coxon (Blur) brillent pour le soin tout particulier qu'il y a apporté, est un petit bijou précieux légué par un Doherty en pleine grâce. On y découvre les autres facettes de ce trentenaire sur le retour pas tout à fait comme les autres, qui fait désormais pâlir la presse avec cette superbe expression de son immense talent. Sans grande prétention pourtant, flegmatique, mélodieux, cet album est recommandé à tous, sympathisants ou déçus de Doherty, parents ou enfants.
Un album agréable donc, salué par la critique, à écouter en soirée histoire de bien décompresser de ses dures journées. Simple et inspiré, et c'est bien là tout ce qu'on peut attendre d'un album de ce calibre.

Albion
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le 30 août 2015

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Albion

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