Hollywood Bizarre
7.1
Hollywood Bizarre

Album de Hollydays (2018)

Si la musique n’existait pas, je consacrerais probablement l’intégralité de mon temps et de ma sueur à ma seconde passion : bitcher. Faisant fi des donneurs de leçons qui s’évertuent à condamner ce noble loisir au nom de je ne sais quelle vertu, je déciderais de m’adonner corps et âme à cette pratique ô combien essentielle à l’épanouissement de tout un chacun.


De manière moins fleurie, on se ferait quand même sacrément chier si on nous ôtait ce droit, que dis-je, ce devoir, fondamentalement humain et démocratique. Au royaume des putes, les bitcheurs sont rois. Bitchera bien qui bitchera le dernier. Bitch is the new black. Bref, vous saisissez le concept…


Exclusivement xénophobe de prime abord, le bitchage se révèle être beaucoup plus autocentré qu’on ne le pense. Car il est avant tout une constante comparaison à soi-même et à son référentiel. Bitcher nous rassure sur notre propre condition, sur nos valeurs, et nous accompagne dans les moments d’alégresse comme dans ceux de doute et de tristesse.


Pas encore convaincu ? Je vous recommande alors de faire comme moi lorsque j’ai le blues, et d’aller au PMU. Non pas pour l’attrait (par ailleurs très limité) du sport hippique, mais bien pour y observer les gens qui y ont élu résidence secondaire. Prenez Roger, par exemple, que l’épreuve du temps (et de l’éthanol) n’a guère épargné, ou encore Jean-Yves, qui vient de dilapider les trois quarts de sa retraite sur une succession de tiercés malheureux. Et je ne parle même pas de Marcel, au nez aussi rouge que le visage de sa « pétasse de femme » (sic.) quand celle-ci a eu le malheur de lui faire le moindre reproche sur son alcoolisme notoire. Bien triste fresque que voilà. Mais à la pitié succède le réconfort. « Je suis né du bon côté de l’histoire, je m’en sortirai » résonnent dans votre esprit, à présent rassuré devant cette misérable vitrine des tréfonds de l’humanité.


Toutefois, malgré cette abondance de différences malsaines, il subsiste un point commun entre ces gens et ma petite personne, autre que mes deux jambes, mes deux mains et ma consommation d’alcool : l’envie de parier sur des couples d’être vivants. Celui sur lequel j’ai jeté mon dévolu répond au nom de HOLLYDAYS. Et comme tout bon parieur arrogant, je suis assez sûr de mon coup : La jockey Elise PREYS et son canasson Sébastien DELAGE (ou l’inverse, on s’en fout) vont percer dans la scène pop française.


(A ce stade-là de la critique, il est à noter que la capillotraction et le sarcasme de cette introduction sont complètement assumés)



Petit canasson deviendra grand



Pourquoi le duo HOLLYDAYS va-t-il percer ? Pour trois raisons essentielles :



  • Ils sont jeunes, ils sont beaux, ils sont cools et dans le vent. Bref, ils sont Konbiny-friendly, le fast and curious devrait arriver pour le deuxième trimestre 2019.

  • La chanteuse Elise PREYS a un organe vocal magnifique et fédérateur, qui saura rassembler à la fois la ménagère fan des chanteurs aux voix exubérantes (pour ne pas dire caricaturales) estampillés The Voice, et les autres personnes qui ne pourront que s’incliner devant le phrasé soyeux et délicat de la parisienne.

  • Leur premier album Hollywood Bizarre est réussi, varié, et les 13 morceaux qui le composent sont excellents.


C’est bien simple, j’ai été scotché du début à la fin : toutes les chansons font mouche, ont un potentiel radio énorme, et se révèlent être des exercices de style passés avec succès. On vogue ainsi de l’ensoleillé Manueta aux rythmiques « synapsonesques » de On a déjà, en passant par les claviers 80s à la Chagrin d’Amour sur Minuit (La Baie noire) ou encore les émouvantes ballades Monsieur Papa et Sensible.


Les arrangements sont simples, les ambiances réussies, la production basique mais soignée, et forment une toile de fond sur laquelle toute la palette vocale de la chanteuse va pouvoir s’exprimer, mêlant la rêverie à la mélancolie, l’obscurité à la légèreté. Instrumentalement, on retrouve également quelques très beaux moments, presque inattendus, sur des morceaux comme Le démon et Le deuxième rang.


Hollydays représente le côté clair de ce terme fourre-tout qu’est l’électro pop française, à l’opposé de l’arrogance insupportable de Thérapie Taxi ou de la naïveté bisounours de Louane, principaux artisans de la connotation fils-de-putière que peut avoir le genre. Hollywood Bizarre est un album à écouter en toutes circonstances, qui se dévore comme un bon roman policier au coin du feu.


Alors allez les écouter, allez les voir en tournée (La Cigale le 13 mars 2019 pour les parisiens), et pariez sur eux au prochain quinté +, c’est un tuyau sûr que je vous offre.



  • En quelques mots : Un quinté + Konbini-friendly

  • Coups de cœur : Sensible, Le démon, Le deuxième rang, Monsieur Papa

  • Coups de mou : RAS

  • Coups de pute : RAS

  • Note finale : 8

JLTBB
8
Écrit par

Cet utilisateur l'a également mis dans ses coups de cœur.

Créée

le 25 janv. 2019

Critique lue 159 fois

JLTBB

Écrit par

Critique lue 159 fois

D'autres avis sur Hollywood Bizarre

Hollywood Bizarre
JLTBB
8

Un PMU nommé Désir

Si la musique n’existait pas, je consacrerais probablement l’intégralité de mon temps et de ma sueur à ma seconde passion : bitcher. Faisant fi des donneurs de leçons qui s’évertuent à condamner ce...

le 25 janv. 2019

Du même critique

Aller-retour
JLTBB
4

Rosé pamplemousse en soirée rooftop

Vendredi 6 juillet 2015, 18h32, Paris XVIème. Jean-Kévin finit d’ajuster sa ceinture tressée autour de son chino pourpre. Une forte odeur de musc imprègne sa chemise en lin blanche, comme pour mieux...

le 14 juil. 2019

25 j'aime

2

Sex in the City
JLTBB
3

Avant, j'aimais bien Lorenzo. Puis j'ai eu 13 ans.

Ce mec, c'est comme ton pote qui te tape sur l'épaule opposée pour te faire retourner dans la mauvaise direction. Ou qui te répète pour la quinzième fois la blague du nain qui prend la tête. Ou qui...

le 28 août 2019

17 j'aime

Music to Be Murdered By
JLTBB
3

Le petit Slim Shady a été retrouvé, il attend ses parents en caisse 18…

Eminem nous fait une Benjamin Button : à 47 ans révolus, le rappeur de Detroit n’a jamais semblé aussi proche de sa crise d’adolescence. Il gesticule, s’énerve, semble en vouloir au monde entier dès...

le 18 janv. 2020

15 j'aime

5