Une rythmique marteau pilon, des grognements gutturaux en guise de vocaux, des guitares à la grasse pesanteur et un son général monolithique donnant l'impression d’écouter souvent le même morceau. Il n’y a pas de doute, nous sommes bien sur un disque de "metal de la mort". Ce sous-genre du metal extrême obéit à ces règles strictes depuis sa naissance, même dans sa variante "technique". Des commandements qui peuvent lasser rapidement si le talent d’écriture se fait relatif. Ce qui peut expliquer pourquoi il s'est fait supplanter par le Black Metal dans le cœur des amateurs au milieu des années 1990. Un autre genre à l’image encore plus sulfureuse et à la musique plus propice à privilégier les ambiances à la brutalité que ce metal gore né aux États Unis.


Seulement, ce n’est pas n’importe quel album de Death Metal puisqu’il s’agit du petit dernier de Morbid Angel. L’un des fondateurs de ce style très typé et (surtout), son meilleur représentant selon votre serviteur. Le groupe de Trey Azagthoth a bâti une œuvre essentielle et à l’esprit indépendant durant l’âge d’or de cette musique. Osant des expérimentations (interludes atmosphériques et mélodiques, compositions d’une étonnante complexité conservant un sens de l’accroche) tout en restant fermement attachés aux principes de ce metal horrifique à l’impact puissant.


Bien entendu, les fusions improbables dans le death metal se sont multipliées et, désormais, il parait difficile d’être étonné par leurs premiers jets. En fait, ce qui les rend encore remarquables de nos jours, c’est la qualité de leurs compositions et le style des musiciens. Deux éléments importants que nous avons beaucoup de mal à retrouver dans leurs disques depuis un sacré bout de temps. Le départ du controversé David Vincent ayant condamné la formation à un immobilisme artistique perturbant de la part de cette entité ayant fait de l’audace son cheval de bataille durant sa période bénie. En plus, Steve Tucker s’est toujours avéré être un remplaçant professionnel mais dont le manque de charisme n’en faisait qu’un hurleur interchangeable. Bref, depuis Formulas Fatal to the Flesh, Morbid Angel, ce n’est pas terrible et depuis Heretic, c’est carrément nul.


Sachant que David Vincent avait, finalement, fait son grand retour sur Illud Divinum Insanus. Un nanar de compétition digne à figurer dans les Gérards du metal (entre St. Anger de Metallica et Masturbate in Praise of Black Satan d’Apator). Un nanar retrouvant, néanmoins, le culot du combo durant ses premières années. Certes, les compositions étaient désolantes à cause de leur comique involontaire. Toutefois, on ne pouvait pas dire qu’on s’ennuyait sur un tel disque !


Kingdoms Disdained n’a malheureusement pas cette qualité.


Ce dernier né du sombre volatile fait table rase de ce triste épisode (Steve Tucker est de retour derrière le micro) et recule sur la case Heretic. Soit un death metal à la musculature impressionnante, mais à la force émotionnelle absente et à l’atmosphère inexistante. Il est vrai que ce n’est pas forcément ce qu’on attend habituellement de ce metal particulièrement monolithique. Pourtant, c’est bien ces deux traits de caractère qu’on entendait dans le meilleur de ce groupe.


En vérité, c’est très simple, je ne retiens quasiment rien de Kingdoms Disdained. Il aurait pu sortir sous le nom d’une énième bande metal, je n’y aurais vu que du feu. Seul « Declaring New Law (Secret Hell) » fait preuve d’une ambition le démarquant des autres titres avec une introduction privilégiant une montée en puissance à la démonstration de puissance et de vitesse qu’on peut ouïr sur le reste de la galette.


Étrangement, le public metal semble rassuré par cette sortie. Cette dernière confirmant que la bête de Trey Azagthoth en a fini avec les expérimentations de l’opus précédent qui lui avaient coûté sa crédibilité.
Hélas, c’est juste un exemple qui confirme que les metalleux peuvent posséder un niveau d’exigence bien bas lorsque leur genre favori demeure dans sa zone de confort. Car si je veux bien reconnaitre que Illud Divinum Insanus est autant déplorable que le bidule dont il est question aujourd’hui, j’éprouve, à son égard, plus de sympathie. Parce que celui-ci balançait ses envies avec beaucoup d’aplomb, quitte à se planter dans les grandes largeurs, ce qui le rendait mémorable.


Tout le contraire de ce skeud qu’on oubliera très vite et qui a, en prime, le malheur de récupérer des défauts que le death metal actuel se traîne tel un boulet. Notamment ce son trop chromé donnant une désagréable sensation de superficialité à la violence de cette musique. Voilà un album à l’image de sa pochette en somme.


Chronique consultable sur Forces Parallèles.

Seijitsu
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le 17 févr. 2018

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