Marathon
6.3
Marathon

Album de Santana (1979)

Le saviez-vous ?
Sri Chinmoy, le fameux gourou indien installé à New York dès 1964 et adepte de la méditation pour gogos, euh pardon, pour toutes les personnes qu'il pouvait attirer dans ses filets, était un mordu de marathon. Un athlète accompli dans cette discipline depuis son plus jeune âge. Une passion qui ne le quitta pas puisqu'il en vient à créer en 1977 une équipe pour qu'elle puisse concourir partout de part le monde.


Et donc Santana sort en 1979, un album nommé... Marathon.


Original me direz-vous.


Cela l'est moins quand on sait que Carlos Santana tomba justement dans les filets de mister Sri peu après Caravanserai (1972) qui marquait ouvertement un (superbe) virage plus mystique. Carlos se fit alors appeler Devadip. Carlos Devadip Santana. Et sépara alors les oeuvres du groupe Santana (jugées trop "commerciales") d'oeuvres solo signées de son nouveau surnom. Sauf que les disques en solo aussi bien que les oeuvres sous le groupe portant encore son nom restaient alors jusqu'ici d'un haut niveau.


Sous son pseudo Devadip on eut droit à des collaborations passionnantes avec Alice Coltrane (album Illuminations) ou John McLaughlin (tombé aussi sous la coupe du même gourou au passage - album Love, devotion, surrender que j'aime assez d'ailleurs au passage (1)). En tant que groupe, l'entité Santana, malgré de fréquents changements de personnel alors, délivrait de sublimes disques comme Borboletta ou Welcome. Amigos en 1976 annonçait une volonté de retour au Santana des débuts (2) et même à moitié réussi (3), il y avait du bon et du très bon (Europa, par exemple. Un des titres les plus magiques au monde).


C'est à ce moment là que le niveau baisse d'un coup.
On ne sait pas ce qui se passe vraiment mais il semble que Carlos Santana (le guitariste donc) se désintéresse un peu de la musique de son groupe, laissant grandement les rênes à ses musiciens. Depuis longtemps, le guitariste ne s'occupe pas du chant on le sait, quand à la composition, il n'est en fait pas un compositeur à titre principal, chez lui la musique a toujours été un travail collectif. C'est de cet ensemble entre plusieurs styles, plusieurs personnalités, plusieurs genres musicaux que Santana dès le début se frayait un chemin, de la rue vers les stades.


A la fin de la décennie 70's donc, Santana décide de suivre les modes plutôt que de surfer dessus. Il y avait des ouvertures prog et musique du monde sur Borboletta et Welcome mais le groupe et l'artiste ne reniaient jamais leur musique, l'enrichissant à un niveau incroyable, faisant des ponts avec ce qui avait déjà été (ainsi l'ouverture et la fermeture de Borboletta est un sacré clin d'oeil au début "émergeant" de nul part de Caravanserai), quitte à réaliser une synthèse purement déchaînée et quasi fusionnelle (le live Lotus en état de grâce quasi permanent).


Et donc avant Marathon, Santana (le groupe, vous suivez ?) sortait Inner Secrets en 1978 avec des incursions en territoire ....disco. Pas un mauvais album au fond, le groupe se réservant comme à chaque fois ses petites fulgurances qui en font tout le sel. Mais pour parler crûment, on se faisait aussi pas mal chier à d'autres moments hein. C'est joli de sortir les percussions pour montrer qu'on a gardé la patte, ça tombe un peu à plat sur une musique toute mimi-guimauve-pour-montrer-que-les-gens-y-s'aiment-et-que-l'amour-c'est-bôôôô. Pardon. LOL hein. (4)


Puis il y a Marathon, le disque, en 1979. Alors que le gour...le maaAAÎÎÎîître, pardon a initié un marathon juste avant. Ouais, ouais, ça fait un peu opération promo dans le fond. Avec un texte signé Sri Chinmoy dans le livret/pochette du vinyle, c'est presque ça. Bon, bon, penchons nous sur la musique avant qu'on dise que je suis médisant.


Ben la musique est pas mal... pour peu qu'on aime le rock FM et le soft-rock de la côte Californienne, voire la soul-pop (le titre Stay (beside me)). Santana relève la tête, ou plutôt les musiciens du groupe, quitte à se faire plaisir sur un ou deux titres où l'on sent une vraie passion de jouer. On se demande si Devadip aussi joue pleinement ou s'amuse juste avec le groupe pour toucher son pognon et retourner ensuite méditer tranquillement. Lightning in the sky, You know that i love you.... C'est clairement qualibré pour la radio, à fond. Mais y'a du savoir-faire, si, si, c'est bien foutu, pas de la soupe donc. Et oui, ça passe assez bien. Mieux qu'une bonne partie de Inner Secrets à vrai dire. On tente même un peu de hard rock sympa avec Hard Times.


Et comme souvent avec Santana on a droit à la perle, le titre qui tue. C'est un instrumental qui détonne presque avec l'ensemble du disque, le génial, magique et incroyable Aqua Marine (5)... qui justifie presque l'écoute de cet album, voire son achat, oui. Enfin si vous êtes fan hein, je ne force personne moi.


Au final ? Un album bien plus potable qu'il en a l'air. Le dernier bon disque de Santana en fait ?


======


(1) Chroniqué d'ailleurs avec amour par moi-même. Oui, beaucoup d'amour. Peace and love frères et soeurs.


(2) En mettant même une mise en abîme sur sa pochette : Ce que l'on voit en haut à droite que tient le petit singe... c'est justement la pochette du premier disque de Santana !!! Si ça c'est pas un message direct à l'auditeur ! Cliquez chez Discogs pour voir en plus grand : https://www.discogs.com/fr/Santana-Amigos/master/31602


(3) Cela n'engage que moi mais le problème d'Amigos est que les morceaux sont volontairement trop étirés. Et l'on sent comme une grosse impression de déjà vu même si ça reste appréciable. Un bon album mais y'avait de la place pour des titres en plus et plus inspirés encore qu'une petite partie de ce qu'on a déjà. Enfin, c'est que mon avis hein. :)


(4) J'ai l'air méchant comme ça mais je reviendrais probablement sur Inner Secrets parce qu'il y a quand même 2,3 trucs forts sympas. Mais bon le niveau faiblard du disque m'embête toujours autant.


(5) Cadeau : https://www.youtube.com/watch?v=zU8b6AxUDbs

Nio_Lynes
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le 9 oct. 2018

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Nio_Lynes

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