Pour parler de sa musique, un groupe français, depuis disparu, trouva il y a quelques années la formule de « popcore », un concept proche de la power pop mais à la sonorité aussi explosive et légère que du popcorn. Belle trouvaille que Décibelles pourrait reprendre à son compte. Le petit mot accompagnant le disque précisait d’écouter le disque « très fort », ce que, un peu naïvement, je fis. Sur la déflagration introductive Pedro Joko avec force guitare et rythmique de fer, je faillis donc perdre l’usage de mon oreille droite, la gauche jouissant de cet assaut puissant. Sur la foi de ce début tonitruant et du morceau que le suit (The end of Reign), on pourrait ranger un peu prématurément, ce trio féminin dans la case des Riot Girls ; la sauvagerie sexy ayant migré de Babes in Toyland aux Décibelles, de Mineapolis à Grenoble, fief du trio. Cela suffirait déjà à notre bonheur mais les Françaises ont d’autres aspirations.
D’où le terme ressuscité de « popcore » : les guitares sont abrasives mais il y a aussi de vraies mélodies chantées par deux voix féminines entre douce ingénuité et agressivité (Vampires ou Fur, love and Taxidermy). Le genre d’alchimie sucré-poivré que l’on avait connu avec les anglais de Lush et que nos petites Françaises réussissent parfaitement. Sur Bill Murray et Bloody bloody whiffy scuzzy toute basse dehors, la rythmique se fait post-punk et permet de rendre ces titres diablement efficaces. Mais c’est sur Sunday feelings que Décibelles fait la preuve de son talent : un titre mettant la distorsion en sourdine pour une mélodie irrésistible qui voit le mariage heureux d’un gimmick à l’orgue et d’une basse entêtante. Les voix, parfaites dans l’exercice, font le reste. Au-delà du jeu de mots un peu facile, le nom est donc parfaitement choisi : il y a là des décibels et une beauté forte en goût.