The Vaselines est un groupe inconnu du grand public, dont le nom évocateur aura certainement achevé de les cantonner à un public indé. Cependant, Nirvana et leurs multiples reprises (citons au passage « Molly's Lips » ou « Son Of A Gun ») ont ouvert une brèche vers le petit groupe écossais.
Fait notable aussi, The Way Of The Vaselines n'est pas un album à proprement parlé, c'est une sorte de compil' à dire vrai. Dum Dum (sorti en 1989) est en fait l'unique album véritable du groupe, mais le disque présent ici regroupant ce dernier plus tout les hits des précédents EP ou live, les fans ont décrété que The Way... serait l'album à avoir chez soi à tout prix. Et on ne peut que leur donner raison.

Au milieu des années 80, la musique commence à suinter sérieusement du fion, à dégouliner d'esthétique dégueulasse et paillettes craignos, et les groupes comme Duran Duran sont légion. Groupe qui sera d'ailleurs bien justement raillé dans la musique « I Hate the 80's » des Vaselines , à leur reformation dans les années 2000. Mais revenons au premier chapitre.
Donc, à ce moment de l'histoire de la musique, le pire n'est pas les chemises à jabots ou les coupes improbables, mais bien le son. Un son immondément sec et plastique qui va jusqu'à pourrir les albums des plus grands, Neil Young, Bob Dylan et un nombre incalculables de faux groupes de New-Wave. En opposition à toutes ces machines qui arrivent –synthé, boite à rythmes..., et toute cette musique déshumanisée, il ne reste guère que quelques indés de chez Sub Pop qui, à Seattle, créent le mouvement grunge. Sous-genre crasseux du punk, s'inspirant notamment de l'ambiance Rage Glory du Neil Young pré-cité. Mais loin de cette noirceur notable, un groupe émerge. Un groupe parfait selon moi, qu'on ne peut pas vraiment affilié au genre grunge, ni même au punk. Certains diront Twee pop.

C'est à vrai dire un mélange de tout cela qui déboule sur les ondes (enfin, manière de parler). Jovial, énergétique et foutrement fatraque, jamais aucun groupe des genres sus-cités ne réussira à avoir une telle aura. Simplement parce qu'en fait, qu'est-ce que les Vaselines ? La quintessence ultime de la pop. La vraie, pas la FM.

J'avais environ 17 ans quand j'ai découvert The Vaselines. Lasse des groupes prétendument sombres ou violents qui habitaient mon lecteur CD, ce fut une révélation. Tout ce que désire écouter la moi du passé était bel et bien présent. L'énergie adolescente du punk, des guitares saturées, du son cradingue et fuzzé à l'excès ; les voix fausses, la percussion binaire... Mais aussi la simplicité d'une musique pop : des chansons courtes et efficaces, parfois avec un seul couplet / refrain répété X fois. Des paroles simples qu'on comprendrait même avec un niveau d'anglais digne d'un président de la république française. Et surtout, ne nous mentons pas, de l'allusion carrément sexuelle à quasiment chaque refrain, assez mignonne pour me faire rougir sans choquer, mais aussi assez érotique pour échauffer les hormones bouillonnantes de l'époque. Oui, quand on écoute The Vaselines, tout jusqu'au nom du groupe appelle le sexe, le cul ; ne serait-ce que les voix masculine/féminine qui chantent à l'unisson à travers le long tracklisting. Quoi de plus évocateur que deux voix à l'unisson, chantant de joyeuses cochonneries –plus grand manque des reprises de Nirvana, au passage.

Quand on écoute The Way Of The Vaselines, on est jeune, toujours. On a envie de prendre une basse à 10$ et de foutre de la disto à tout va, de se taper le batteur ou la groupie, et d'être joyeux, euphorique. Rien n'a réellement de sens profond (« The Day I Was A Horse »), c'est juste la culture du plaisir, musical et physique, pure et dure. On ne réfléchit pas, on bouge, on dessine sur nos T-shirts et on lit des BD's dans un coin d'une chambre ou trainent encore les paquets éventrés de tagada de la veille. En ça, il défie le temps

Aujourd'hui, on a parfois de bons groupes. Certes. Mais aucun n'apporte une telle pêche, une telle fraicheur nihiliste. Je n'ai jamais été très accro au côté politisé du punk, ce qui me plaisait c'était ça : de la musique pour faire au choix du BMX sur des pelouses interdites, aller casser les vitres de la voiture du prof d'histoire géo (monsieur Brugnot, ce chien errant), ou cumuler des histoires de fellations dans l'obscurité d'un cinéma de quartier. Enfin voilà. Pas de révolution ou d'insubordination, juste de l'insolence joyeuse et pas dangereuse. Oui, le « Troll » de l'époque, en version musical, et habillé d'une affriolante culotte de coton.
C'est une référence hors d'époque ; l'énergie, la jeunesse, le cul et les milkshakes à la fraise. Une foutrement bien meilleure idéologie, il faut dire, que le sempiternel Sex, Drugs & Wock'n'Woll.

The Vaselines inspira donc nombreux groupes (Dum-Dum girls pour le titre et le son, les Nirvana assurément, les Vivian Girls certainement, entre autres...). Les mélodies sont réellement étudiées, et belles parfois. Si on aime le punk simpliste des Ramones, on écoutera The Vaselines, mais si l'on aime la pop édulcorée des Beach boys aussi. Si on aime la twee pop, si on aime la pop, le punk, le rock indé, le lofi, l'antifolk même parfois (si, si)... En gros, si on aime la musique dans ce qu'elle a de plus simple, on aimera The Vaselines.

Dire que les Vaselines c'est bien, ça devrait être aussi évident que d'énoncer la beauté d'une fleur. Oui, certes, c'est neuneu, c'est aussi con qu'un ado, mais les deux n'en restent pas moins véridiques. Ce sont des vérités dans leur plus simple appareil.

En simple conclusion, j'aimerai mettre tout le monde à The Vaselines, car c'est le "nous" ado : moche, mal foutu, qui ne ne pense qu'à forniquer gaiement, mais qui a toujours un charme tout particulier que ne confère que l'insouciance de la jeunesse.


Écouter les Vaselines, c'est refuser de porter des cravates grises.
C'est porter un perfecto de cuir par-dessus une culotte « petit-bateau ».
Shyle
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le 4 avr. 2014

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Chlorine Z

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