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5.4
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Album de Archive (2020)

Dans les couloirs obscurs des Archive

Archive n'en finit plus de fêter ses 25 ans de carrière.
On peut comprendre pourquoi, tant l'existence de ce collectif fondé et fidèlement animé par Darius Keeler et Danny Griffiths a été mouvementée, avec une frontline soumise à de nombreuses évolutions, des brouilles, des départs... Et aussi une évolution musicale souvent surprenante, parfois radicale, qui a déconcerté pas mal de suiveurs du groupe.
Être encore là, 25 ans après Londinium, est donc un petit exploit, qu'il convenait sans doute de célébrer à sa juste valeur.


Après la méga-compilation 25, puis le live qui accompagnait la tournée du même nom, voici en guise de point d'orgue le dénommé Versions. Dix titres, dix reprises de morceaux censés figurer parmi les plus emblématiques du collectif britannique.
Déjà, là, je tique.


Si l'on retrouve sans surprise les deux grands "tubes" d'Archive, "Lights" et "Again" (largement revus et corrigés, j'y reviens ensuite) ; si "Fuck U", standard acclamé en live, est également présent, le reste de la tracklist pose question.
On peut trouver logique de retrouver également "Nothing Else", le tout premier single du groupe extrait de l'album Londinium. Mais la sélection des six titres restants reste étrange. Figurent deux titres de Restriction ("End of our Days" et "Kid Corner"), un de The False Foundation ("Bright Lights"), un de Controlling Crowds Part IV ("Pills")... et trois inédits parus sur la compilation 25.


Cela n'engage que moi, mais je ne tiens pas Restriction et The False Foundation pour des grands albums d'Archive - avis sans doute pas partagé par la bande de Keeler et Griffiths, qui s'affirmaient très satisfaits de ces deux disques à leur sortie - surtout du deuxième nommé, qu'ils présentaient parfois comme leur meilleure production. Mouais...
Quant aux inédits tirés de 25, ils ne sont sans doute pas inoubliables. Leur présence doit sans doute plus au fait que Versions est, comme 25, un prolongement de cette année anniversaire. Ce qui sous-entend un choix plus marketing qu'artistique.
En revanche, qu'il n'y ait aucun titre de Controlling Crowds ou With Us Until You're Dead m'embête un peu plus, tout comme l'absence de "You make me feel", longtemps présenté par Darius Keeler comme son morceau préféré.


Mais bon, bref, tel est le choix des musiciens, faisons avec. Et voyons ce que donne l'album.
De ce côté-là, la réponse est vite donnée : pas grand-chose.
On ne ne peut pas enlever aux Archivistes la volonté de revisiter largement leur héritage. Nous n'avons pas affaire ici à des versions acoustiques, mais à de véritables relectures, assorties de réorchestrations massives, voire de restructurations des morceaux (notamment pour les plus longs, tels "Light" et "Again").


Mais que c'est mou ! Tout a été ralenti, presque entièrement dépouillé de batterie et de percussions (hormis Pills) - alors même que le travail rythmique d'Archive a toujours été un aspect parmi les plus intéressants de leurs compositions, autant par de savants empilements que grâce à l'énergie virtuose du batteur Smiley.
À la place, on a des tonnes d'effets sonores dégoulinants, qui affectent à l'occasion les voix elles-mêmes. Diluée, la saine colère avec laquelle les Britanniques décryptent les dérives de la modernité ; effacée, la rage presque jubilatoire qui soulevait la voix inimitable de Dave Pen dans "Fuck U", remplacé ici par une chanteuse non identifiée (pas Maria Q, c'est sûr, et probablement pas Holly Martin non plus) ; évacuée, la tension, l'inquiétude et la puissance, au profit d'une mélancolie électronique certes très léchée, mais sans âme.


L'ensemble du disque sonne de manière très cohérente, offrant de fait une vision si compacte qu'on pourrait presque croire découvrir un nouvel album. Oui, ces Versions sont d'autres versants d'une même montagne, et il faut reconnaître aux Anglais le travail effectué.
Mais on n'est pas obligé de l'apprécier. J'avoue que c'est mon cas. Cet album ne m'apporte rien de neuf, même si je peux le réécouter sans me hérisser.


Il serait même approprié, tu sais, l'un de ces soirs de pluie grise où tu as envie de te rouler en boule dans un coin, blotti dans ce drôle de chagrin confortable qui te donne envie de rien, sinon d'attendre la nuit et le sommeil en espérant un lendemain de soleil, qui te remettra sur pied et dans le bon sens de la vie...


Mais sinon, c'est plutôt dispensable.

ElliottSyndrome
5
Écrit par

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le 2 sept. 2020

Critique lue 386 fois

4 j'aime

ElliottSyndrome

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D'autres avis sur Versions

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PhilippeAllegre
4

pourquoi pas mais bon !

Ceux qui vont écouter cet album sont surement des fans d'archive, et qu'aime t'on dans ce groupe ? Pour ma part, c'est de mélange de tout, c'est à la fois simple et sophistiqué, un mélange de hip hop...

le 2 sept. 2020

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