Cinq ! Cinq fichus titres dans toute leur carrière : un single et une démo ! Et après ça, Virtue disparut dans l'indifférence la plus totale. Et tout ça à cause d'un manque de moyen financier et d'un label qui retourne sa veste au dernier moment, ruinant tout espoir de production d'un album : un triste sort que connurent, hélas, bon nombre de groupes de la NWOBHM. Après c'est sûr, la qualité de production d'un Iron Maiden ou d'un Def Leppard fait que l'on n'a pas forcément envie de s'attarder sur un vinyle underground imprimé à 200 exemplaires dans une cave londonienne ou je ne sais quoi. Pourtant, c'est comme ça qu'on passe à côté d'un bon nombre de pépites qui n'ont absolument rien à envier aux cadors de l'industrie du metal anglais (que j'adore, hein : ne me prenez pas pour un gugusse qui n'aime QUE les disques pirates et les vieux LP obscurs et poussiéreux distribués sous le manteau). Enfin bref, Virtue fait partie de ces groupes quasi inconnus qui auraient pu voir grand, très grand.
Il y a deux titres dans ce single : We Stand to Fight, qui donne d'ailleurs son nom au single, et High Treason. Deux joyaux d'un heavy metal endiablé, énergique et génialement efficace. Deux bijoux rythmés à souhait qui pètent le feu comme jamais et qui envoient Virtue au panthéon des artistes injustement oubliés. Le premier, We Stand to Fight, démarre de façon quasi anthologique par une introduction épique qui propulse instantanément l'auditeur sur le champ de bataille. Et la tempête continue avec cette osmose de riffs acérés de la part de Matt Sheldon et de Boz Bozlee et avec ces savants martellements sur des tambours du diable domptés par les baguettes de Simon Walters. Quant à Tudor, le frangin de Matt Sheldon, sa voix quasi "Tokyo Bladienne" scande le refrain "We stand to fight, where are the heroes tonight?" avec prodige. Et lorsque que frangin Sheldon tient subitement la note de son refrain, l'orgie de guitares cesse subitement. Mais nos soldats ne déposent pas les armes pour autant puisque de l'accalmie surgit alors une succulente séance de tapping, telle une ultime salve avant un repos du guerrier bien mérité.
Le second titre, High Treason, débute pour sa part de façon beaucoup plus lourde, beaucoup plus doom que son prédécesseur avant de nous resservir un délicieux cocktail instrumental et vocal explosif dont l'efficacité n'est désormais plus à prouver. Et vers le milieu de la piste, un break quasi instantané va engendrer un somptueux solo qui redonnera progressivement au morceau tout son dynamisme avant un ultime (et triste) adieu.
Certes, la note peut de prime sembler un poil excessive, surtout que la qualité de production pratiquement artisanale pourra en rebuter plus d'un, mais je fais le serment solennel que toutes ces étoiles dans la notation sont ici totalement justifiées ! Dans le grand et obscur bazar qu'est la NWOBHM, rares furent les disques à m'avoir autant marqués que le single de Virtue. Bon, OK : je pourrais sans problème citer une bonne dizaine de singles et d'EP tous plus mystérieux que les autres qui peuvent sans le moindre doute prétendre au génie musical incompris. Mais ce qui frappe chez Virtue, c'est cette aura qui déborde de frénésie qui aurait largement pu propulser le groupe vers une reconnaissance mondiale comparable à celle d'un Saxon voire d'un Motörhead. Mais bon, le talent et le brio ne font pas tout dans les méandres d'un monde de la musique très léonin. Aussi, on peut simplement conclure que Virtue est un groupe injustement sous-estimé.
En bref, l'un des plus beaux joyaux perdus du metal anglais !
