Véritable artisan de la musique, Winter By Lake revient avec un nouvel album personnel et sensible, entre slowcore et électronica. Ou comment l’introspection permet d’atteindre des sommets.
Evacuons tout de suite ce qui sera perçu comme le bémol – le seul ?- de cet album : oui Nicolas Cancel n’a pas un accent terrible en anglais. Dommage car, par ailleurs, il est totalement légitime que le Français écrive (plutôt bien d’ailleurs) et s’exprime en anglais, tant l’univers de Winter By Lake a été longuement mûri et façonné par des artistes outre-atlantiques. Faisant suite au Stories from Birds and Horses, Wooden Spirits est un album aux atmosphères slowcore, prenant sa source dans une folk électrifiée et une lenteur assumée., Les états d’âme du Français et les manières de les exprimer sont très proches de ceux d’un Red House Painters ou d’un Idaho (old Tree, odd fish ou encore Our Curse). Sur une partie de l’album, la différence ne se fait au niveau des compositions ou des atmosphères mais bel et bien au niveau des arrangements. Dans son travail, le Français est encore plus solitaire que ses (possibles) modèles. Mise à part la dernière étape du mastering laissée à Harris Newann (Constellation records), Nicolas Cancel fait tout tout seul : de la composition au mixage. Un vrai travail d’artisan, patient et orfèvre, amateur de matières différentes et se plaisant à les mélanger dans un souci d’harmonie et de fluidité.
Le nom du disque est d’ailleurs symptomatique de l’approche musicale de Winter by Lake : si une partie des instruments folk ont été rangée au vestiaire – au profit de l’électronique – il en reste des traces profondes dans l’essence même de la musique et dans l’ADN du songwriter. Dès lors, les sonorités de guitares électriques se retrouvent enlacées au milieu des boucles et des couches d’électroniques, faisant naitre une nouvelle symbiose (Wooden Spirits, the war is over). Cet apport électronica (proche d’un Lali Puna par exemple) peut même apporter une ambivalence supplémentaire. Les rythmes entêtants qui tournent autour des mélodies donnent une vivacité nouvelle, là où on ne pourrait ressentir que tristesse nocturne (Night Birds).
Dans son album, Winter By Lake emprunte plusieurs chemins pour nous entraîner au bord de l’ivresse, mais finalement, peu importe le flacon : qu’il y ait ou non des boucles, des programmations, du Fender Rhodes (magnifique sur The War is Over), ou seulement une association de guitares, l’essentiel est ailleurs. Dans cette faculté, permanente de faire résonner en nous une fibre mélancolique qui nous remue profondément.