John Coltrane And Paul Quinichette – Cattin' With Coltrane And Quinichette – (1957)
Paru en cinquante-neuf, cet album co-dirigé par les deux saxophonistes a été en fait enregistré dès mai cinquante-sept, dans les studios Van Gelder. Il y a cinq pièces au total, mais John Coltrane ne joue pas sur le troisième titre de la face A, « Exactly Like You ». Trois sont signés par Mal Waldron qui joue également du piano.
Cette session, la dixième pour ce qui concerne John Coltrane est assez curieuse, car cette réunion n’a rien d’évident, bien que les deux saxophonistes aient un grand respect l’un pour l’autre. Paul Quinichette est surnommé « The Vice-Prez », lui qui joue en droite ligne dans l’esprit de Lester Young. Ainsi il s’intéresse avant tout à la mélodie, au son doux et diffus, à l'horizontalité, tandis que Coltrane, lui, est un grand spécialiste de l’harmonie, qui l’intéressera toute sa vie, son style est vertical, intense et puissant.
Pourtant cette disparité n’est que richesse et participe à l’intérêt de l’album qui verra les auditeurs identifier qui joue quoi, et à quel moment, l’exercice est plaisant et, disons-le, pas trop difficile lors des solos, tant les personnalités sont différentes. « Cattin’ » de Mel Waldron ouvre l’album et c’est bien Coltrane qui lance le premier solo au ténor de ce blues, ensuite Quinichette répond, on sent la coolitude du suiveur de Prez, élégant, au toucher délicat, Coltrane revient pour terminer la pièce, et les deux finissent en chorus.
La seconde pièce est « Sunday », l’un des morceaux favoris de Lester Young repris ici à l’instigation de Paul Quinichette qui régale encore, en alternance avec Trane qui envoie également. « Anatomy » est également signé par l’impeccable Mal Waldron, avec Trane qui commence et Paul qui suit, puis c’est Mal qui s’exprime en solo, soutenu par le contrebassiste de la session, Julian Euell, et le batteur métronome, Ed Thigpen.
« Vodka » est à nouveau une compo du pianiste dans la ligne de « Yesterday », non seulement Mal est un homme discret et efficace, mais sa plume est habile et ses compos simplement magnifiques comme ici. Cette écriture participe également à la belle mise en valeur de Paul Quinichette qui signe par ici un de ses meilleurs enregistrements, en compagnie de celui qui, petit à petit, deviendra le musicien « phare » du jazz, on pourrait voir ici une sorte de « passage de témoin » entre une figure du passé et une autre, emblématique du futur, qui met à l’honneur les deux musiciens.