Que pouvait bien faire Lana Del Rey après le chef-d'œuvre NFR! et surtout après six albums en dix ans d'une carrière jusque là sans aucune fausse note et ayant toujours su surprendre ? Eh bien, la chanteuse à décidé de prendre du recul sur cette réussite en sortant un disque clairement plus dépouillé encore que le précédent. Ce qui ressort instantanément de ce disque est qu'il est très intime. Sa voix y est mise en avant plus que jamais.


En témoigne le titre d'ouverture, White Dress où elle nous surprend en montant dans les aigus comme jamais auparavant. Les textes sont aussi plus personnel encore. Sur ce premier titre, elle nous parle de la nostalgie de l'époque où elle n'était qu'une serveuse, de la simplicité des choses à ce moment là. Le tout sur une production minimaliste. Mais c'est aussi pour cela que ce titre touche autant. Cette production minimaliste nous rapproche de l'artiste. Et là, alors que l'ont a déjà prit une grosse claque avec ce premier titre, nous ne sommes pas au bout de nos surprises. Le second, Chemtrails Over the Country Club nous envoute encore davantage par sa douce mélodie folk et ses paroles comme un échappatoire. On poursuit avec Tulsa Jesus Freak où l'ont commence à mieux retrouver la prod de Jack Antonoff. la chanteuse mêle les thèmes de la religion et de la sexualité d'une façon qui évoque les États conservateurs de la Bible Belt. Elle y emploi pour la première fois l'auto-tune qui appuie le côté mystique du titre. Del Rey évoque Prince sur Let Me Love You Like a Woman lorsqu'elle chante « on pourrait se perdre dans cette purple rain ». Si cette ballade à la texture assez classique est le morceau le moins surprenant du disque, elle y adresse néanmoins un message important : Le fait de vouloir être aimé pour qui elle est. Des paroles qui viennent en réponse à ses débuts où certains médias la prenaient pour un personnage fabriqué. Chose pour laquelle, elle a de toute évidence, prouvé le contraire depuis bien longtemps. Sur Wild at Heart, Lana chante l'amour sauvage, le vraie, l'amour passionnel et c'est juste fort émouvant et surtout d'une grande authenticité. L'amour, toujours, celui qui nous fait grandir, qui nous élève, il en est question sur Yosemite : « You make me feel I'm invincible / Just like I wanted / No more candle in the wind », évoquant ainsi au passage, Elton John. Le titre de la chanson évoque les grands espaces de Californie sur un rythme lancinant de folk aux racines américaines traditionnelles.


Mais le sommet de l'album, c'est Dark but Just a Game. Placé au milieu du disque, le titre bénéficie pour le coup d'une production assez complexe, mais qui retourne littéralement l'esprit. Elle y évoque l'envers du décor de la célébrité, qui fait perdre la raison pour certains « The best ones lost their minds » et nous annonce un peu plus loin que pour sa part, elle reste la même malgré la célébrité : « So I'm not gonna change / I'll Stay the same » et ça, c'est quand même fort. On redescend un peu sur terre avec le doux Not All Who Wander Are Lost où là, elle sort le jeu de la séduction et invite à contempler le moment : « The thing about men like you / Is you got a lot to say / But will you stay? ». Breaking Up Slowly est une ballade aux accents country sur la difficulté d'oser rompre pour se retrouver mieux seul. Les voix de Lana et Nikki Lane sur ce titre se marient parfaitement bien. Dance Till We Die introduit des cuivres jazz. La chanteuse y affirme sa personnalité unique dès les premiers vers : « I'm coverin' Joni and dancin' with Joan / Stevie's callin' on the telephone ». Laquelle ne l'empêche pas de se sentir parfois seul (« But sometimes this ranch feels like my only friend »), trouvant cependant la solution dans le refrain : « And we won't stop dancin' 'til we die ». Enfin, après avoir chanté qu'elle reprenait Joni, c'est exactement ce qu'elle fait avec le dernier titre de l'album en reprenant For Free de Joni Mitchell. Une superbe reprises avec un piano langoureux en trio avec Weyes Blood - la grande révélation de 2019 avec son album Titanic Rising - et **Zella Da**y, jeune chanteuse de pop-indé américaine. Il est ici question d'une comparaison entre une star qui joue ses morceaux « pour les fortunés » – et une musicienne des rues qu'elle voit jouer « très bien » et pour « aucun argent ». À nouveau, Lana Del Rey semble se demander si elle n'était pas « mieux » avant d'être célèbre.


Difficile de trouver défauts à cet album. Chemtrails Over the Country Club contient beaucoup de moments mémorables. Certains titres le sont moins, mais il n'y a aucun moment faibles. Et si la succession de NFR! pouvait s'annoncer difficile, il n'en ai finalement rien. Lana Del Rey, qui comme elle le chante, ne se laisse pas emporter par les méandres de la célébrité, continue à produire la musique qu'elle aime. En continuant à explorer de nouveaux styles - ici la folk et la country - elle reste toujours bien ancrée dans ses racines, dans ce qui fait qu'un album de Lana Del Rey reste un bijoux très personnel et incomparable.

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le 12 avr. 2021

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