Congratulations
6.8
Congratulations

Album de MGMT (2010)

En 2007, MGMT se fait connaître dans le monde entier grâce au succès planétaire de leur album « Oracular Spectacular ». Porté par le duo Andrew VanWyngarden / Ben Goldwasser, le groupe y impose d'ores et déjà un son très personnel, mélange de musique électronique et de rock psychédélique porté par un sens mélodique affûté et l'omniprésence des claviers. Des titres tels que « Time to pretend » ou « Electric feel », toujours omniprésents sur les ondes, témoignent parfaitement de l'efficacité pop dont est capable la formation californienne.
Cependant, ce succès colossal ne l'incite pas à s'engluer dans une musique commerciale et stagnante ; au contraire, les moyens amassés garantissent désormais aux deux compères une véritable indépendance leur permettant de s'adonner à ce qui semble être leur unique passion : faire la musique qu'ils ont envie de faire. C'est donc dans cette optique – somme toute assez simple – qu'est enregistré en 2010 « Congratulations ».

L'album est au-delà de toutes les espérances. S'il confirme ce que l'on savait déjà – que le groupe est un vrai groupe de pop, au sens le plus noble du terme –, il frappe également par sa dimension atmosphérique, confinant à des ambiances aussi bien psychédéliques que mélancoliques ou froides. Les arrangements frappent toujours par leur richesse, faisant collaborer claviers, guitares acoustiques et électriques, piano, chœurs, harmonica, orgues et encore saxophones, mais bénéficient cette fois d'une utilisation plus « cohérentes » ; en effet, là où « Oracular Spectacular » pouvait s'apparenter à une simple suite d'excellents morceaux, « Congratulations » est l'exemple même de l'album homogène, où les morceaux semblent se prolonger, se répondre et témoignent d'une même ligne directrice musicale – ce caractère de « non-best of » expliquant sans doute que le public ait été moins sensible à cet opus qu'au précédent. Ce qui n'empêche pas l'efficacité pop du groupe de faire mouche une fois de plus ; chaque morceau y est effectivement au moins excellent.

L'album s'ouvre brutalement sur « It's working », morceau d'anthologie effectuant derrière son aspect brumeux une irrésistible montée en puissance, portée par la voix aérienne de VanWyngarden scandant un obsédant « it's working in your blood ». Soutenu par une rythmique puissante, il constitue le titre psychédélique par excellence. Le titre suivant, « Song for Dan Treacy », qui se veut être un hommage à un auteur de chansons, accélère encore le rythme mais laisse place à un chant moins lointain et plus posé, effectuant une nouvelle montée en puissance – cette fois rapidement avortée, nous faisant alors déboucher sur « Someone's missing », morceau mélancolique et éthéré où le poids du vide se fait ressentir. « Flash Delirium », la piste suivante, s'entame comme un chant déterminé, mais tourne bien vite à la logorrhée hallucinée et vire finalement de l'harmonie à la cacophonie sous acides. C'est alors que l'orgue solennel de « I found a whistle » vient nous ramener à des visions plus douces et rêveuses, nous préparant au titre le plus déterminant de l'album, « Siberian Breaks », qui derrière ses douze imposantes minutes dissimule clairement cinq mouvements. C'est un morceau onirique et mélancolique – effectuant chaque transition en douceur – mais également en proie à une certaine froideur, (« wide open arms can feel so cold ... ») plaçant cette douzaine de minutes rêveuses sous une tension omniprésente. Le dernier mouvement, baignant dans un étrange plasma de sons électroniques, clôt le morceau en perdant l'auditeur dans un maelstrom de sentiments étranges et inédits. On revient alors au psychédélisme du première morceau avec « Brian Eno », morceau halluciné et entraînant présentant le célèbre artiste tenant une messe dans une cathédrale. Puis l'énergie onirique du disque se concentre en cauchemar dans « Lady Dada's nightmare », morceau instrumental on ne peut plus glacial, où le souffle du vent s'apparente à de terrifiants hurlements. Heureusement, l'apaisement a lieu avec le beau morceau éponyme, sans doute le plus sobre de l'album.

Ainsi, à travers ces neuf titres, le groupe réussit à concevoir l'album pop idéal – où chaque morceau, intrinsèquement lié aux autres, peut également valoir pour lui-même –, bien que ne répondant pas à toutes les exigences des critères commerciaux. Mais peu importe : MGMT fait désormais ce qu'il veut, succès à la clé ou non, comme le montre leur dernière album en date, sobrement nommé « MGMT » (témoignant ainsi d'une claire volonté de redéfinir la formation), toujours plus tourné vers les expérimentations. S'il ne convainc par forcément, ce dernier opus donne l'image d'un groupe libre sachant où il veut aller ; et, pour ce qui est de continuer à les suivre, il n'y a aucune hésitation.
Trelkovsky-
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le 4 avr. 2014

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