Ah qu'il est drôle le petit Kenny. Mmmm mmmm mmmmmm. Il a toujours le mot juste au bon moment à chaque galère qui se trame à South Park.


Mais laissez-moi vous parler de Keny, avec un seul 'n' : Keny Arkana.


Keny est une gonzesse. Eh ouais, une gonzesse. Pourquoi a-t-elle choisi un nom de scène comme ça ? Eh bah j'vous le demande !
Est-elle fan du gosse au blouson orange de South Park ? Non, faut vraiment être débile. Manquerait plus qu'il existe un humoriste qui s'appelle Cartman.
Est-elle fan de Kanye West ? Non, pour aduler ce mec faut vraiment être à l'ouest.
Je vois qu'une seule hypothèse restante, elle est fan de la race Keni-Boules, digne chien de garde du cassos' qui habite près de chez toi :
< http://www.elevage-des-keni-boules.com >
Ouais c'est sans doutes ça, car sinon je ne vois pas l’intérêt d'avoir un blase aussi naze. Keny bordel. Une meuf qui se fait appeler Keny. Kenny Arkana ! Quand à Arakana, je sais pas d'où ça peut venir. Et je ne vais pas faire de recherches supplémentaires dessus, que nenni sur Kenny.


Sinon son vrai nom est Onora Dafor. Proportionnellement, son nom de scène n'est pas si pourri que ça au final.


La marseillaise sort en 2006 une sardine qui en aura bouchée un coin à tous les porcs du rap game. Pourtant, comme le vin de Bordeaux, 2006 est pour le rap français une année superbement frais et expressifs, mais sans être saoulant. Bien loin du délire de Booba avec son 'Ouest Side', de l'album-concept inspiré du film noir d'Oxmo Puccino 'Lipopette Bar', du victorieux de la musique 'Gibraltar' d'Abd Al Malik, du puérile et déjanté premier disque du Klub des 7. N'oublions pas le carton phénoménale de Diam's qui aurait mieux fait de rester dans sa bulle. Plein de bonnes choses aux goûts variés et fruités cette année là. Ce n'était pas l'année 62 où le Rock'n'Roll venait d'ouvrir ses ailes ou que Cloclo chantait "Belle, belle, belle", mais c'est déjà ça. Eh bah, je crois que nous avons là, un album intelligent et conscient qui semble être un des meilleurs crus en matière de 'peurah'. Wesh.


Elle annonce la couleur dès le début de son oeuvre en faisant référence à Victor Hugo - alias 'VH' dans le game - avec "Les pieds bétonnés dans le ciment, le regard vert l'infiniment grand". Elle est pas là pour raconter des conneries la Keny. Elle va pas nous déblatérer des sottises comme quoi elle plane après un pét' en se payant des putes, la schneck dans le champagne. D'ailleurs elle se caractérise elle-même comme n'étant pas une rappeuse, mais comme une contestataire qui fait du rap. Ce n'est pas du lourd ça ma gueule ? Une contestataire, ouais, ça va barder.


Celui-ci, c'est un album personnel avec un fil conducteur chronologique, semblable à sa vie. C'est l'album de sa vie. Elle nous raconte sa jeunesse dans les premiers morceaux avec "Le missile suit sa lancée" et "J'viens de l'incendie" après une intro' bien classe. Ces morceaux me déplaisent. Ouais c'est bizarre, je fais son éloge depuis tout à l'heure, et direct' les deux premiers morceaux me gênent. Mais le reste de l'album est plus homogène. Tant mieux. Elle démarre avec un rythme et un ton hardcore digne d'un thon à ressorts. Et chez moi ça ne passe pas. Trop violent pour une petite biche, vu ce qu'elle nous raconte, ces interprétations m'ont peu convaincus.


Puis vient le morceau type ballade, qui donne envie de marcher, puis danser comme un connard en sifflant : "Je me barre'.
Ah non, non, je ne pars pas. Je reste ici. C'est juste le titre de la chanson : "Je me barre".
Keny adopte un ton extrêmement naïf avec "Ma liberté, a rendu verts les hommes en bleu, cage d'escalier comme logis, j'change de maison quand j'veux. J'change de ville quand j'veux, élue sans domicile. J'vagabonde les yeux ouverts, l'enfant des rues est en visite, me méfiant de l'adulte comme de la peste". C'est à la limite du dérangeant de faire l'éloge du mode de vie SDF. Le texte est super bien écrit, mais on a envie de crier à la stupidité. M'enfin c'est son point de vue et c'est brillamment transmis par un son aussi jovial qu'un été à Disneyland.


Enfin ce n'est sans doutes pas son point de vue actuel, mais son point de vue de l'époque des débuts qu'elle vivait ça. Car s'en suit ce qui sera sans doutes son plus gros succès public, "La mère des enfants perdus". Elle adopte, non pas un chinois, mais un point de vue particulier. Elle se met à la place de La Rue. Ouais mon gars, pas bête la bête, au lieu de pleurer sur son sort de meuf de cité, elle a l'intelligence de jouer le rôle du méchant, de la cité. Putain que c'est trop bien. Ça fait grave plaisir d'avoir un texte brillant sur les problèmes de la rue, trop racontés par certains de ses compères. Ça paraît dur et à la limite de l'éloge de cette mère affreuse, mais derrière se cache une critique triste et réaliste, mais avec un côté loin d'être dramatisant et on observe même un brin d'humour.


L'album a vraiment commencé, c'est du lourd.


On connaîtra de longs moments d'émotions aussi. Je suis tout émoustillé rien qu'en entendant la musique de son "Entre les lignes : clouée au sol" où elle nous livre une leçon. Pas ton exercice d'anglais où tu dois conjuguer au Present Perfect tous ces verbes imprononçables sans postillonner sur ta copie. Une leçon de vie, mon gars, une belle critique du monde. Changer le monde commence par se changer soi-même. Puis y a l'autre partie qui vient plus tard : "Entre les lignes : une goutte de plus". Une goutte acide qui ronge mon petit cœur, qui prolifère quelques gouttes dans les yeux parfois. Rien que ce son d'orage et de pluie annonce la triste tempête racontée de façon si belle.


C'est pas une fille facile la Keny. Faut pas la croire démoralisée à chaque fois en écoutant ses chansons tristes. Des fois elle gueule. Et quand elle gueule, bah elle gueule. Toi ta gueule. Quoi ma gueule ? Qu'est-ce qu'elle a ma gueule ? ... Ok je ferme ma gueule.
Le morceau qui choquera Maman, c'est bien sûr le virulent "Eh connard". Elle accuse la maltraitance morale subit dans un établissement pour enfants, foyer ou je ne sais quoi. Où elle pointe du doigt un directeur, un soi-disant connard sans âme. Putain que c'est jouissif. Enfin son ton un peu hard arpenté au début de l'album est justifié. On peut être vulgaire et faire passer un bon message. Ça m'emmerde les gens qui crient au texte de merde parce qu'il y a des gros mots. Bande de cons.


Après... après... après. En fait non, j'arrête là.


Y a plein d'autres morceaux trop cool, je pourrai vous parler de "Le Fardeau" ou de "Cueille ta vie", mais non. Même si l'album peut paraître lourd à écouter... bah c'est du lourd. On notera quand même un fin d'album où elle radote avec ses chansons révolutionnaires, c'est triste. Mais écoute, ça te changera des musiques sans queue ni tête qui n'ont pour but que de te faire trémousser et à rentrer un refrain dans ta tête. Même si le côté révolutionnaire peut faire peur, le peaufinage de ses textes fait passer n'importe quel message, et ses messages se doivent d'être écoutés même si l'on est pas toujours d'accord. Le capitalisme c'est pas si mal hein, putain d'anarchistes de merde, vous plaigniez pas de vous faire assommer à coup de lacrymogène si vous foutez la merde pour un rien. Même si certains sujets nous tiennent pas à cœur, on ne peut qu'admirer le talent de cette contestataire et cette vision de vie. Comme une petite référence à Gandhi, elle dit "Changer le monde commence par se changer soi-même", donc ayez un avis positif sur le rap français, genre que trop excluent à tord.


En fait, je crois que si elle a choisi un nom de mec en guise de pseudonyme, c'est sans doutes parce qu'elle a bien plus de couilles que n'importe qui.
...
Ah bah c'est malin, j'imagine Keny Arkana à poil, avec 14 paires de couilles. C'est fâcheux.


Si j'ai bien un plaisir aujourd'hui, c'est bel et bien celui de remonter de l'université à chez moi le soir, écouteurs en activités avec cet album tournant en boucle, les mains dans les poches, regardant vers le ciel, en étant subjugué par ces mélodies, entre ciment et belle étoile.

Alex-La-Biche
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le 21 nov. 2014

Modifiée

le 22 nov. 2014

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