La perfection du foirage

Quand on me demande quel est mon groupe/artiste préféré je considère toujours les réponses les plus évidentes, Velvet Underground, Iggy and the Stooges, Bowie, Pavement... mais à chaque fois je finis par faire cette réponse qui suscite des hé? et des hun? dubitatifs. Ok, Fun House est peut-être l'album le plus parfait de l'histoire du rock, Ziggy Stardust mon plus beau souvenir musical de jeunesse, Loaded et Crooked Rain Crooked Rain ceux que j'écoute le plus souvent, mais Fear and Whiskey reste mon album favori et the Mekons le groupe le plus cher à mon cœur.

Fear and Whiskey est un monument au foutoir, un chaos tout juste maitrisé. Il commence comme un hymne de pub anglais et finit comme une chanson de country apocalyptique. Il y a des métaphores socialistes anti-thatchériennes, des riffs cinglants et des visions de cauchemar post-capitaliste, des mélodies d'un violon branlant et des images de guerres gigantomachiques, le tout éructé par des voix d'hommes et de femmes qui se télescopent dans le noir de leur justesse approximative. Les mélodies sont inoubliables comme des rengaines de bar, l'énergie infectieuse comme une éjaculation précoce adolescente et les arrangements jamais entendus ailleurs frisent le génie tant ils sont obtenus à l'arrache. Il y a du punk de bastringue, du folk abâtardi et l'enthousiasme impardonnable de ceux qui n'ont rien à perdre.

J'aime tellement the Mekons que j'ai du mal à parler d'eux. Les mots manquent à mon enthousiasme. Tout ce que je peux dire c'est qu'il n'y a pas deux groupes comme eux. Fear and Whiskey est le monument le plus saillant de leur œuvre, mais leur carrière toute entière mérite les louanges les plus ferventes. Personne n'a plus de plaisir à faire de la musique. C'est pourquoi ils sont le meilleur groupe de rock. Il n'y a pas une ombre de cynisme dans leur attitude et il n'y a au final pas l'ombre d'un doute dans mon esprit.