Bon, réglons tout de suite le problème : LE disque indispensable à avoir en concert des Stones, c’est bien entendu le suivant, «Get Your Ya-ya’s Out ». C’est vrai qu’on est dans une autre dimension. Oui, cet album de 1966 est un truc né de la volonté de leur maison de disques, assemblant des enregistrements faits par ci, par là et tentant de faire croire aux fans qu’il a été enregistré au Royal Albert Hall de Londres : il n’en est rien ! Il semblerait (conditionnel, car avec ce live rien n’est certain) que ce soient les concerts de Bristol et de Newcastle pendant la tournée de 1966 qui aient fourni le matériel du disque. En outre, comme souvent à l’époque, ce premier live ne voit le jour que d’un côté de l’Atlantique, aux Etats-Unis, sous la pression du label London Records qui s’occupait d’éditer les Stones au pays de l’oncle Sam. Mais, attention, ce n’est que la partie émergée du bidouillage, voilà la partie immergée : un an plus tôt, en 1965, les Britanniques ont déjà reçu l’offrande d’un E.P live, lui aussi baptisé « Got Live If You Want It! », mais avec une liste des titres tout à fait différente. Seule la reprise de Bo Diddley, "I’m Alright", est commune aux deux versions. D’ailleurs, la version américaine ne la crédite pas à Bo Diddley, Jagger et Richards apparaissant comme les uniques compositeurs de la chanson !!!
Allez, on plonge encore un peu plus profond en sachant que deux des morceaux présents dans la version américaine, "I’ve Been Loving You Too Long" et "Fortune Teller" n’ont pas été enregistrés en concert, mais… en studio où l’on a ajouté quelques bruits de fans hystériques préenregistrés ! OK, ce processus était fréquent voire quasi obligé quand on sortait un live à cette époque mais quand même. On peut même se poser des questions sur les cris des fans, n’auraient-ils pas été augmentés en post-production voire purement et simplement rajoutés pour « faire plus d’ambiance » ?! Quant au son, il est franchement médiocre, les deux derniers titres, "Have You Seen Your Mother Baby, Standin in the Shadow?" et "(I Can’t Get No) Satisfaction" (coupé avant la fin…), sont littéralement noyés dans les grésillements. J’ai dans ma collection, des bootlegs de 1966 et 1967 qui ont un son autrement meilleur, en particulier les concerts à l’Olympia ! On a l’impression que la maison de disques a mis la main sur quelques bandes qui passaient par là et a décidé de les commercialiser vite fait, mal fait. Et pourtant, à ce moment-là, les Stones étaient un p… de groupe de scène avec un répertoire en or, des musiciens gigantesques, dont un Charlie Watts endiablé ! Avec des bandes (bien) enregistrées par les radios, il y avait de quoi faire un magnifique live. Au final, cet album s’écoute mais ne peut tromper personne. C’est un pur produit marketing concocté à la hâte par la maison de disques, histoire de rentabiliser encore un peu plus leur groupe, alors qu’ils allaient se consacrer aux studios pendant quelques années, à l’exception de quelques concerts au printemps 1967. Ils ne reviendront en tournée qu’en 1969. Pas surprenant que Jagger et Richards, qui n’ont probablement pas été consultés, aient depuis quasiment renié cet album.