Dylan avait repris les tournées en 1974 avec The Band, après plusieurs années d’absence, ce qui avait donné lieu à un excellent double live (« Before the Flood »), dans lequel il mélangeait ses grands classiques, en acoustique et en électrique. En 1975, il part à nouveau sur les routes dans ce qu’il a appelé « The Rolling Thunder Revue », une sorte de cirque itinérant assez foutraque auquel de nombreux musiciens ont participé suivant les dates ; cette tournée a vu le retour de Joan Baez, évincée sèchement en 1966 mais aussi Roger McGuinn…la direction musicale et la guitare étant assurés par Mick Ronson. Le concert qui a fourni le matériel à ce « Hard Rain » a été enregistré le 23 mai 1976 au Hughes Stadium de Fort Collins, Colorado, ce concert fait partie de la seconde moitié de la tournée qui a sillonné uniquement les États-Unis. Dans le répertoire resserré (50 mn), les anciens morceaux sont laissés au placard au profit de titres bien plus récents et surtout à haute teneur en électricité ; on a l’impression que les amplis ont été volontairement poussés à fond.
Les versions jouées différent aussi beaucoup des morceaux originaux et sont parfois difficilement méconnaissables. La troupe est d’entrée très énergique, ça s’entend dès le « Maggie’s farm » en ouverture. Et le rythme ne faiblit jamais, par exemple sur « Shelter From The Storm », magistral. Bref, une débauche d’énergie assez brute mais maîtrisée car on a ici affaire à un groupe fabuleux (T. Bone Burnett, Gary Burke…). Cet album a été très critiqué à sa sortie, et l’est encore aujourd’hui, justement pour ce côté foutraque, un peu « fanfare » jouant dans une joyeuse cacophonie. Cet album gagne en maestria ce qu’il perd en perfection formelle. Tout au long de ce concert, chaque morceau semble à chaque instant sur le point de s’écrouler, arrivant on ne sait trop comment à se terminer autrement que dans le chaos le plus total. Certains fans le considèrent comme son meilleur live. Ça n’est pas mon cas, je préfère le Live 1966 et le « Before the Flood » mais celui-ci est un concentré d’électricité et ça fait toujours du bien aux esgourdes. De toute façon, Dylan s’en moque, il n’a jamais fait que ce qui lui plaisait !