Lundi 13 juin 2016 : 11h du matin. Je viens de finir de trier plus de 2500 mandats de dépenses alors que je ne suis pas réveillé et que je ne pense qu'à baver sur mon oreiller. C'est alors que je reçois un message de mon acolyte Pingouin. Il me dit :
"j'ai mal au pied et je devrais aller acheter des trucs à manger mais
j'ai trop mal alors j'écoute du sympho punk avant-gardiste pour
m'occuper".
Ce genre de messages ne m'étonne plus depuis un moment mais j'ai besoin de me réveiller et comme le café de 9h30 n'a pas suffi, je décide de lancer l'album pendant que je fais des paquets de mandats (on survit comme on peut).
Après 5 minutes d'écoute, je partage mes premières impressions avec mon camarade : "En fait c'est le remake de la souris et l'éléphant dans Dumbo, version musicale".
Et je crois que je ne pouvais pas mieux tomber. Lou Kelly livre un affrontement musical entre musique savante et punk ras des pâquerettes. Le mélange de ces genres diamétralement opposés est d'ailleurs le postulat de départ assumé du projet (“Concert Hall Circle Pit”, ou “Wolfgang's Rotten Recital” étant des parfaits exemples.). Des lignes de trompette schizophréniques se posent sur des rythmiques déstructurées et des riffs bien agressifs. Alors, cela n'étonne plus personne de lire une dédicace à The Dillinger Escape Plan sur la page Bandcamp de l'album. On pourrait se dire que ce n'est qu'une nouvelle expérimentation hybride et inféconde comme il en existe des tas sur les internet, mais Lou Kelly parvient à insuffler une énergie dantesque dans sa musique et la fait résonner comme le curieux ballet cartoonesque entre un groupe de punk débilos et un orchestre classique. En somme, un Igorrr qui aurait abandonné l'electro au profit de power chords et de mosh parts à deux neurones.
Pingouin préférait considérer que l'album "devrait être l'OST d'un cartoon mashup entre Oggy & les Cafards et les Triplettes de Belleville."
A un moment, il lâche même : "Quand tu veux faire du punk, mais que ta daronne t'a inscrit au cours de trompette quand t'étais gamin.”. Et effectivement, l'énergie qui se dégage de cet album évoque quelque peu la hargne et la frustration du petit keupon dans l'âme, bloqué dans sa chambre avec ses partitions et sa sourdine, pendant que ses copains font les 400 coups dans le square d'à-côté. On n'ira pas jusqu'à ressentir de la compassion pour Lou Kelly, qui (nous en sommes persuadés) va très bien dans sa tête, mais il faut admettre que sa musique, bien que déroutante, n'a rien de stérile.
Et c'est à ce moment là qu'on s'est dit que l'année prochaine -que l'on s'apprête à partager sous le même toit-, on allait écouter cet album lors des pires moments de détresse, à 3h du matin, la veille d'un partiel important, après le quatrième thermos de café et alors qu'il pleut dehors.
Lou Kelly, en fait, c'est la bande son foutraque de notre procrastination. La mise en accords du nervous breakdown qui caractérise chaque fin de semestre chez nous. Et c'est bien pour ça que ça peut vous plaire.
Critique écrite en collaboration avec P1ngou1n.
Lien du Bandcamp : https://ltkmusic.bandcamp.com/album/hooligans