Dante Terrell Smith le 11 décembre 1973, MOS DEF grandi dans les quartiers de Brooklyn, New York. Ses parents sont séparés, Sheron Smith, sa maman, élève ses 12 enfants dont Dante est l'aîné, son père, Abdul Rahman, est un membre actif de la “Nation of Islam”, et apporte à son fils quelques enseignements religieux. En 1992, Mos Def a 19 ans et se converti tout naturellement à l’Islam. Il changera même de nom pour Yasiin Bey fin 2011.

Dante a commencé à lâcher des rimes dès l'âge de 9 ans mais prend le Hip-Hop vraiment au sérieux vers ses 14 ans. Puis il forme son premier groupe, Urban Thermo Dynamics (UTD), avec son frère DCQ, et sa sœur Ces, ils sortent un single “My Kung Fu” en 1994. Il est, par la suite, invité à rejoindre le collectif Native Tongues fondé par Afrika Bambaataa, qui inclut A Tribe Called Quest et De La Soul. Il fait ensuite des apparitions sur le single “Big Brother Beat” de De La Soul et “Love Song” des Bush Babees et sort son propre premier single solo "The Universal Magnetic" sur le label indépendant phare Rawkus Records en 1996 puis un autre, "Body Rock", avec Q-Tip, a suivi en 1998.


Talib Kweli Greene, lui, est né le 3 octobre 1975 à Brooklyn. Il est élevé dans un milieu plus aisé que son futur compère dans une famille très instruite à Park Slope où ses deux parents sont respectivement professeurs d'anglais et de sociologie.

Son frère cadet, Jamal Greene, est actuellement professeur à la Columbia Law School.

Enfant, il a été attiré par des rappeurs afro-américains tels que De La Soul, qu'il a rencontrés au lycée. Il a étudié à la Cheshire Academy, un internat du Connecticut et a également étudié au Brooklyn Technical High School.

Il s'inscrit ensuite à l'Université de New York, où il étudie le théâtre expérimental.

En 1995, il fait une apparition sur l’album “Doom” du groupe venant de Cincinnati, MOOD. Il y rencontre DJ Hitek avec qui il va collaborer et sortir quelques titres en 1997 sous le nom de “Reflection Eternal” avant de revenir à New-York.

Il signe chez Rawkus Records, il y croise Mos Def qui, comme lui, a des envies d’album solo. La rencontre humaine, intellectuelle et artistique est évidente.

Ils décident ensemble de repousser leurs projets personnels, d’emporter avec eux Hitek, de se nommer BLACK STAR et mettre sur pied un album qui va marquer le Hip-Hop.

Dans ces années 90, le genre s’est imposé comme une forme d’art concret avec plus qu’assez de substance pour justifier son existence. Il a toujours eu tendance à écrire sur lui-même, à réfléchir à ce qui se passe au sein de sa propre communauté, et Black Star n'a pas fait exception. Mais au lieu de reproduire le style gangsta qui régnait, ils se sont concentrés sur ce que signifiait être un Afro-Américain dans le monde. Même leur nom était une déclaration : Black Star était la compagnie maritime lancée par Marcus Garvey, l'homme politique jamaïcain dont la philosophie panafricaine a inspiré le mouvement rastafarien.


Voilà un album chargé, à la fois lyriquement et socialement. Et bien qu'il y ait des chansons sur la violence de la rue et la valeur de l’argent, Talib et Mos ont plutôt critiqué leurs glorifications et leurs représentations. Et même sur des titres où ils commentent et condamnent une société injuste ou sur d’autres où ils tournent en dérision le matérialisme, ils présentent toujours un remède à ce malaise de l'auto-défaite.

Def et Kweli assument ici un rôle de prophètes de rues, établissant les raps le plus critiques et sensés de la décennie.


Après une intro dans laquelle ils annoncent leur projet d’éduquer et d’informer, et déclarant que Black Star a l'intention de faire briller une lumière dans les ténèbres, le duo est tout de suite incroyable avec “Astronomy (8th light)” Il utilise le mot noir comme un terme d'affection plutôt qu'une limitation. Le titre contient des cordes de guitare lourdes et funky, un rythme qui claque et des flows impeccables de Def et de Kweli. Le 1er balance le refrain avec de subtiles back-up du 2nd, vous avez devant vous l'équation pour le reste de l'album.

Sur le single "Definition", le discours d'introduction de Mos Def regorge de ces brillantes rimes internes et rimes douces tandis que Kweli est plus sujet aux flux excessifs et aux allusions manifestes. Nous avons là deux rappeurs qui parle du ghetto et comment les jeune peuvent en sortir, plutôt que de simplement réfléchir à leur éducation difficile.

"One, Two, Three / Mos Def and Talib Kweli / We came to rock it on to the tip-top / Best alliance in Hip-Hop". Tellement vrai! Je n'ai pas encore entendu un duo hip-hop dépasser la chimie palpable entre ces deux acrobates verbaux (Mobb Deep peut-être, dans un autre registre).

Leurs analogies saignent la sagesse de deux gars qui pourraient passer leur vie à livrer des sermons sur le hip-hop, "Me n’ Kweli close like Bethlehem and Nazareth."

Tout au long de l’album, chaque partie du duo a son propre talent pour créer des paroles intelligentes. Parfois, la livraison de Mos Def ajoute une précision percutante à son débit de jeux de mots. Et même si leurs styles lyriques sont distincts, leurs sensibilités communes fusionnent en un ensemble saisissant. Le va-et-vient entre les deux MCs échangeant des lignes et complétant les paroles de l'autre est assez sidérant, comme s'ils étaient des médiums.


Les 6 minutes de “Respiration”, avec Common livrant le 3ème couplet, montre clairement toute l'étendue des talents de ces rappeurs. La chanson, échantillonnant la superbe mélodie de “Theme from The Fox” de Don Randi, est une visite fascinante de la réalité urbaine de Brooklyn, avec plus de détails que vous pouvez imaginer. Idem "Thieves In The Night" qui sample le pianiste Bill Evans, fourmille de lignes fortes en balançant multitudes de vérités.


Produit par Hi-Tek, le producteur a soufflé la poussière du boom-bap, lui donnant une nouvelle couche de fraîcheur. Sa combinaison de guitares basses grondantes, de rythmes vifs et d'autres sons graves enracine le son du projet dans les années qui l'ont précédé mais sans paraître daté ou vintage.

Le style coloré et ludique des 80’s très Eric B et Rakim est ressuscité sur "B Boys Will B Boys". L’ode à la femme à la peau brune “Brown Skin Lady” échantillonnant un air doux de Gil Scott-Heron, est logiquement très rétro Soul et il y a des visions futuristes qui s’infiltrent dans les synthés hautement électroniques sur “Hater Players”.


Il faut savoir qu’à la fin des 90’s, beaucoup disaient déjà que le Rap était mort, oui oui, vous avez bien lu! A ce moment-là, la course au succès avec des albums solo remplis de hits pour la radio régnait.

La fusion des puissants Mos Def et Talib Kweli a remis l'accent sur la réalisation d'un album de qualité avec une résonance sociale et créative du début à la fin.




Black Star n'est pas d'abord un disque socialement responsable et un album agréable ensuite ou vice versa ; c'est un album agréable ET socialement responsable.

Il a été salué comme un chef-d'œuvre, et à juste titre, c'est l'un des grands albums hip-hop influents sortis au tournant du siècle.


Mos Def et Talib Kweli ont tous deux grandi à partir de la scène underground, ils avaient l’attitude et l’influence de celle-ci. Ils portaient en eux des éléments de style libre, une variété de thèmes différents remplie de métaphores qui confère à cet album une gamme formidable en termes de concepts lyriques.


“... Black Star” a des similitudes et des différences avec ce que Puff Daddy a fait lorsqu'il a sorti l'album “No Way Out” un an avant, La similitude est que les deux LP essayaient de se débarrasser des paroles liées aux thèmes et à la culture gangsta. Mais à la différence de ce qu’a fait Puff Daddy, “Black Star” se concentrait davantage sur la durabilité des cultures noires. Mos Def & Talib Kweli ont livré couplet après couplet des paroles avec une approche fluide et agressive, en utilisant l’argot des rues mais pas que. Pour que le sens de chaque parole puisse être transmis directement sur la cible.

“Mos Def & Talib Kweli Are BLACK STAR” est un album confiant mais incertain, doux mais percutant, souriant mais triste, détaillant le pire mais y trouvant de la positivité.


13 chansons qui ont attisé la flamme du Hip-Hop, lui permettant de briller et de briller encore aujourd’hui.

CLASSIQUE


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le 22 juin 2022

Critique lue 14 fois

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