Toujours plus profond, toujours plus inspirant

6ème album en tant que leader, 5ème album chez Blue Note, Ambrose Akinmusire revient à un formule en quartet en studio, un retour au source dans un regard à la gentrification du quartier d'enfance dans lequel il a grandit.

Après avoir sorti un tour de force incroyable avec "a Rift in Decorum" (2017), double album live au Village Vanguard, après avoir proposer des paysages vers la pop impressioniste "The Imagined Savior is Far Easier to Paint" (2014) ou vers le rap, hip-pop symphonique "Origami Harvest" (2018), le musicien d'Oakland nous surprend encore.

L'album démarre sur "Tyde of Hyacinth", avec une intro improvisé libre puis un thème qui devient le style typique du quartet d'Akinmusire, une liberté de jeu dans l'interplay, des couleurs grinçantes, un solo de piano fou... mais vient ensuite la première surprise de l'album avec l'intervention mystique Jesus Diaz sur des paroles en dialecte Nigerian (?).

"Yessss" montre l'autre facette plus clair d'Ambrose et de son quartet, un morceau teinté de groove.

Puis vient la deuxième surprise de l'album, un duo avec Genevieve Artadi ou Ambrose prend le rhodes. Sur des paroles, dont la signification peut être multiple...

L'album se déroule comme un voyage au plus profond de l'univers du trompettiste non sans émotion profonde ( "An Interlude (That Get' More Intense)" ) ou mysticité ("Moon (The Return Amplifies the Unity)" et "Blues (We Measure the Heart with a Fist)"). Deux hommages à certains de ses mentors "Mr. Roscoe (Consider the Simultaneous)" à Roscoe Mitchell, et "Roy" dédié à Roy Hargrove qui nous a quitté en 2018, dont la simplicité et l'humilité de la composition ne peut que nous émouvoir.

Simplicité, sobriété, c'est propablement ce qu'il faut retenir de cette album, dont le sumum se retrouve dans "Reset (Quiet Victories & Celebrated Defeats)" dont la virtuosité incontestable s'éclipse au profit de la musique.

L'album se conclu sur un morceau ou encore une fois Ambrose Akinmusire laisse la trompette de côté pour le Rhodes : "Hooded Procession (Read the Names Outloud)". Un morceau qui fait echo à certains de ses autres morceaux rendant hommages aux noirs victimes de crimes racistes (notamment policiers), on peut penser par exemple à "My Name is Oscar" ou "Rollcall for Those Absent". Des accords plaqués apparaissent successivement, chacun son tour, comme une énonciation du nom de toute les victimes, le morceaux et l'album finissent progressivement dans l'aiguë sur une quinte à vide comme pour rappeler que l'histoire est toujours d'actualité.

Ambrose Akinmusire confirme qu'il n'est pas là par hasard. Ce disque l'aura honoré d'une nomination aux Grammys pour le meilleur album de jazz instrumental de l'année en 2021 (qui fut donné à Chick Corea et son album "Trilogy 2", probablement un peu à titre posthume), souhaitons de pouvoir encore profiter des pépites et de la générosité de cet artiste encore longtemps.