Pertinent, colérique et même un peu rigolard

Curieusement, j'ai lu ça et là des gens qui accusaient Neil Young d'enfoncer des portes ouvertes en attaquant Monsanto sur sa politique des semences et sur son impact dévastateur sur la planète, tant socialement qu'écologiquement ! Pour n'être pas d'une originalité folle, la rage (comme toujours tangible, malgré la fatigue des années) du Loner me paraît pourtant bien nécessaire, Monsanto étant bien loin d'avoir perdu la partie alors que j'écris ces lignes... Mais intéressons-nous plutôt à la musique, puisque les tentatives précédentes de Neil Young pour créer de la polémique ou seulement de la réflexion, ont été assez irrégulières de ce point de vue : d'un côté il y a les albums, moyens, que sont "Old Ways", "Living with War", "Fork in the Road", mais d'un autre il y a des "Ohio", "Southern Man", "Rockin in the Free World", et bien d'autres chansons qui sont passées à la postérité. "Monsanto Years" voit Neil Young recrutant la fratrie Nelson pour les transformer en un clone à peine plus jeune de feu-Crazy Horse, et cette lourdeur obsédante, cette danse monotone sur place de musiciens dévoués à la "cause" de leur leader et à ses déchirures électriques, ce retour à l'essentiel dirait-on sont évidemment la première bonne nouvelle de l'album. La seconde est que Neil a pris le temps d'écrire des chansons, qui s'avèrent moins bâclées qu'à l'habitude, voire même parfois accrocheuses (sans compromission, on s'en doute), comme si Neil avait réalisé que pour que son message passe, il fallait quand même caresser son public dans le sens du poil, pour une fois. Pas de vraie merveille malheureusement dans "The Monsanto Years", mais du Neil Young de bon niveau, ce qui nous change de toutes ces dernières années. Bien sûr, il y a le chant, cabossé et basculant souvent vers le faux (mais de "Time fades Away" à "Tonight's the Night", on a pris l'habitude, non ?), qui est à la fois une sorte de preuve de l'urgence de "l'opération anti-Monsanto", mais aussi la limite d'un album qui peinera forcément à recruter parmi les "non-croyants". En tous cas, réjouissons-nous de cet album pertinent, colérique mais aussi rigolard, heureusement, qui tranche salement sur le reste de la production musicale de 2015 ! [Critique écrite en 2015]

EricDebarnot
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Cet utilisateur l'a également mis dans ses coups de cœur et l'a ajouté à ses listes Liste chronologique des concerts auxquels j'ai assisté [en construction permanente] et Promenade sur les traces d'un géant : Neil Young

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le 23 juil. 2015

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Eric BBYoda

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