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Roy Campbell, William Parker, Takeshi Zen Matsuura – Visitation Of Spirits (The Pyramid Trio Live, 1985) – (2023)


Le label « NoBusiness Records » est en train de passer de vie à trépas, comme une truite clapotant dans l’eau devenue rare, il saute et se débat, espérant trouver une flaque qui lui permettra de tenir encore un peu… Tout y passe, jusqu’aux Test Pressing qui sont vendus un par un, histoire de récolter quelques fonds susceptibles de renflouer les caisses pour sortir un album, puis un autre, encore et encore…


Celui-ci fait partie de ces miraculés, alors il faut choyer le client, l’amateur, devenu rare lui aussi, le flatter, lui donner le meilleur, la crème de la crème, pour qu’il rachète et qu’il revienne, et ainsi, peut-être, sortir un nouvel enregistrement, une nouvelle perle, dénichée on ne sait où, une merveille de plus…


Celui-ci fait incontestablement partie de cette catégorie, c’est l’enregistrement d’un concert donné le vingt et un février quatre-vingt-cinq au « Joint », au Centre estudiantin, à la « Brandeis University » de Waltham, dans l’état du Massachusetts. Ce concert est, parait-il, de temps en temps retransmis sur une radio communautaire, par là-bas, à partir d’un vieux bootleg, le voici désormais à notre portée, et avec un son formidable, s’il vous plaît !


Celui qui lead c’est l’exceptionnel Roy Campbell, je l’ai découvert assez tard, on n’en parle quasi jamais, son nom est rare dans les magazines, même les spécialisés, et sa musique n’est pas diffusée dans nos régions, je n’ai aucune souvenance, même lointaine, d’un souvenir radiophonique. Par bonheur, je l’ai souvent entendu aux côtés de Jemeel Moondoc…


Sur le moteur de recherche du site, son nom apparaît sept fois dans cette rubrique, la dernière fois pour « Akhenaten Suite » de deux mille huit, je confesse être à la recherche de ses enregistrements, n’ayant jamais été déçu par ses prestations musicales souvent extraordinaires, comme ici…


Il est l’auteur des cinq pièces de l’album, chacune prend son temps, un quart d’heure en moyenne, entre neuf et dix-huit minutes pour être plus précis. Du véritable bon jazz, à trois, avec William Parker à la basse et Zen Matsuura à la batterie, Roy joue de la trompette, du bugle et de la flûte. Il aime prendre son temps, trouver le thème et broder autour, il aime également asticoter la mélodie, en tirer le maximum, son jeu est aisé à suivre, il ne vous perd jamais et sait trouver les notes qui vont, celles qui sont justes, surprennent, et en même temps ravissent.


Il y a également beaucoup de clarté dans sa sonorité, très droite, claire, il nous parle et joue à la façon d’un mystique, il croit aux esprits et les côtoie, les fréquente, et sa musique est une prière. C’est ainsi qu’il improvise, avec son âme et son cœur, nous emmenant, à travers son chant, en des territoires musicaux profonds et émouvants, avec naturel et simplicité, en nous prenant par la main…


Ses deux partenaires sont exceptionnels, William Parker est grandiose et Takeshi Zen Matsuura le batteur idéal pour une telle musique. D’ailleurs ils renouvèleront la formule et d’autres albums sortiront…


Je suis vraiment heureux d’entendre ce jazz sincère, et je pense à ceux qui l’ont fait vivre, au loin, à travers les ondes, pour que cette musique jamais ne meurt, le vieux « boot » à fait la place, grâce à un label qui lutte encore pour sa survie, là-bas à Vilnius… Place à la sœur de Roy qui confia aux membres du label (Valerij Anosov) : « Roy spoke to me in a dream years ago and said, it’s all about the music ».

xeres
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le 1 août 2025

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