Le temps détruit tout

Vald c’était un petit con insolent, futé et talentueux.

Vald, dans sa piaule d’ado, en mode branleur, un petit sourire en coin, il éclatait bon nombre de rappeurs labélisés, comme ça sans forcer.

Vald, il jouait au rap, il ne se prenait pas au sérieux, rien à branler.

Vald il avait un timbre de voix particulier qui laissait transparaitre l’insolence du gamin intelligent mais aussi beaucoup d’émotions, la colère, la frustration, l’ennui, le spleen, la désillusion, la rancœur, la nostalgie, toujours avec énormément de verve, de fougue et d’énergie et beaucoup de cynisme.

Vald, comme tout petit con futé, il aimait provoquer et jouer avec les codes du monde qui l’entoure, probablement sans se douter de la fraicheur et de la folie qu’il apportait dans le milieu du rap français. Il ne parlait pas que de biff de taspés et de zonzon, mais d’autisme, de branlette, de drogue, de relation de couple en mode slasher, de buter un ministre et de vie d’ado blazé.

Tout ça c’était le Vald d’avant Agartha son premier album oubliable. Parce que dans ce premier album officiel tout ce que je viens d’évoquer ci-dessus commençait à s’effriter. Ben oui il fallait positionner la poule aux œufs d’or sur le marché, il fallait donc qu’il adopte tous les gimmicks pourris du rap à la mode version skyrock et autotune. C’était encore du vald mais en plus lisse et donc forcément en moins bien.

Aujourd’hui Vald nous pond ce truc : Xeu. Et la y’a carrément plus rien, je veux dire, rien de l’essence initiale du Vald qui a scotché tout le monde en faisant des sons du fin fond de sa piaule d’ado. On discerne ça et là encore quelques fulgurances à l’ancienne, mais on sent que le mec est perdu. Déjà dans les thèmes abordés effectivement il semble paumé. Bizarrement c’est son album le plus personnel, dans lequel il se raconte le plus, ou en tout cas vraiment au premier degré. Mais y’a un truc qui cloche. On dirait qu’il est fatigué, qu’il n’a plus vraiment de foi en tout ça et qu’il se demande s’il n’aurait pas mieux fait de pousser ses études de médecine plutôt que de se lancer dans l’industrie « musicale » du divertissement. Trop tard, il ne peut pas tout lâcher maintenant, y’a des thunes à la clef... Mais clairement on sent qu’il a atteint son but, de vendre et d’être reconnu (disque de platine avec Agartha, marketing bien ficelé et mimétisme des ados pré pubères aidant), et qu’il comprend que tout ça ne lui apporte rien.
Il a beau essayer de se réinventer - sur plusieurs morceaux il modifie sa voix et son flow et semble singer Biffty (c'est-à-dire un des trucs les plus à chier du rap actuel) pour faire le « méchant » – mais tout parait sonner faux et aseptisé.
Aseptisé comme la production qui l’accompagne : aucune couleur, aucune folie, aucune petite mélodie entêtante, un seul unique et ennuyeux beat aux sonorités délavées semble le porter de bout en bout.

Y’a clairement un parfum triste et désespéré dans cet album. Mention spéciale à « devient génial » qui s’adresse à son fils et qui fout le cafard, le cri d’un père désabusé et déboussolé qui a peur que son fils ne soit pas heureux (comme lui ?).

Je pense que lorsqu’il aura fait le bilan de cette partie de sa vie il essaiera de trouver une porte de sortie peut être vers le cinéma…il est trop futé pour s’enfermer dans le rap. Il lui reste quoi ? Un ou deux albums à tout casser avant de se faire remplacer par un autre petit con insolent. Il l’a déjà compris il n’est pas dupe.

Bref Vald le gamin insolent et moqueur n’est plus, fermer le ban. Ainsi va la vie.

Finalement je mets la moyenne parce qu'on peut pas dire que cet album soit mauvais mais aucun morceau n'a la saveur d'un "promesse", d'un "aulney-sous-bois", d'un "infanticide" ou la folie d'un "par toutatis", d'un "shoote un ministre" et de bons nombres de sons de nqntmqmqmb.