« Le passé revient toujours nous hanter »

Un éminent industriel, Charles Blaine, et sa femme trouvent la mort dans des circonstances troublantes. Ils laissent derrière eux deux enfants, Zach et Mackenzie, aussitôt confiés à Chase, un oncle depuis longtemps perdu de vue. L’homme semble instable et peu désireux de s’ouvrir aux deux adolescents. Il décide de les installer dans la maison familiale de son enfance, à Cape Augusta, ce qui n’est pas du goût du shérif Sullivan, qui lui témoigne son hostilité dès leur arrivée. Les Blaine sont apparemment précédés d’une sinistre réputation : « Tout ce qu’ils touchent se transforme en or. Tous ceux qu’ils touchent deviennent poussière. »


La créature monstrueuse qui a attaqué Charles et son épouse au début du récit suffirait probablement à en attester. Mais ceux qui en douteraient encore pourront porter au crédit de cette assertion les phénomènes surnaturels qui entourent les marécages, les apparitions cauchemardesques dans le manoir ou ces silhouettes menaçantes que l’on distingue à travers les fenêtres. Entre les cadavres emmurés et inexplicablement bien conservés et les troubles qui semblent toucher tous ceux qui approchent les Blaine d’un peu trop près, The Plot prend des atours horrifiques qu’une imagerie glauque et crépusculaire ne fait que corroborer. On doit cette dernière à l’excellent Joshua Hixson, déjà à l’œuvre dans un Shanghai Red pessimiste et sépulcral.


The Plot est fait d’un mystère qui ne cesse de s’épaissir. Et si son récit fonctionne admirablement bien, malgré son observation assez stricte des canons de l’épouvante (les apparitions soudaines, les inserts sur des mains prédatrices, la maison hantée…), c’est essentiellement pour tout ce qu’il conserve loin de notre entendement. Que signifie ce fameux « pour recevoir, il faut d’abord donner » ? Qui est vraiment Chase, présenté comme un « gosse terrifié » ayant fui une famille dysfonctionnelle ? Quels sont ses fameux « cadavres dans le placard » ? L’affirmation de cette professeur d’histoire selon laquelle « le passé revient toujours nous hanter » contient-elle les clefs de cette énigme ? Toutes ces questions demeurent en suspens et irrigueront un second tome logiquement attendu avec impatience.


En attendant de combler les trous, le lecteur n’a d’autre choix que de se laisser bercer par une atmosphère noire et sordide, pâmer d’effroi devant Rose, cette mère démente, ou des enregistrements sonores inquiétants, et se demander dans quelle mesure Chase entend réellement protéger les enfants de son frère. Pourquoi, en effet, les avoir emmenés dans un lieu si lugubre ? Et quid du shérif Sullivan, qui confesse sa jalousie envers les Blaine et semble les honnir à un tel point que cela en devient suspect ? Décidément, nombreux sont les éléments méritant un éclaircissement. Mais Tim Daniel, Michael Moreci et Joshua Hixson semblent pour l’heure surtout chercher à y jeter une ombre épaisse et effrayante, qui pourrait se réclamer, certes à la marge, autant de Psychose que de La Nuit du chasseur…


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Cultural_Mind
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le 4 juin 2021

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