Scott Lobdell arrive sur Darkness et se motive pour redonner du panache à un titre qui commence déjà à se répéter. Pour cela, Lobdell s'intéresse surtout à une chose, à peine évoquée jusque là : la rédemption de Jackie Estacado. Lobdell s'intéresse aussi à temporaliser les aventures d'Estacado qui ont désormais lieu 1 an après le début du récit. Du temps s'est donc écoulé depuis le précédent tome.


Jackie Estacado est gravement blessé. Il s'est fait tirer dessus et doit être soigné de toute urgence, les darkis, petites démons l'amènent alors dans la demeure d'une belle doctoresse. Celle-ci, dépravée sexuellement, est une ancienne victime de Estacado, qui lui a fait subir un viol. Mais, le possesseur du Darkness a tout oublié et ne comprend guère pourquoi celle qui l'a sauvé (sous la contrainte avec des menaces assez horribles), lui en veut autant.
Encore plus préoccupant, entre temps, un double de lui a pris sa place auprès de oncle Frankie. Et ce double attend avec impatience que Estacado revienne pour enfin le tuer.
Et comme si ça ne suffisait pas, l'Angélus est de retour, l'ex-femme d'oncle Frankie est bien décidé à tuer son ancien époux ainsi que son neveu. En sommes, pour le Darkness, ce n'est pas vraiment la meilleure période de sa vie.


Cette première histoire est très bien gérée, il faut l'avouer. Visuellement plutôt agréable, sans être fou, c'est surtout la capacité de Lobdell à rendre les darkis et Estacado intéressants et profonds qui plait. Le personnage gagne en profondeur et son pouvoir prendre une envergure émotionnelle plus que mystique. Le Darkness représente un pouvoir total. On a vu sa toute-puissance, on a vu son histoire, on voit maintenant la force des créatures qu'il invoque.
Le gros problème de cette histoire est la très mauvaise gestion du psyché post-viol, un peu traité par-dessus la jambe et sans profondeur. On remarquera combien, en 15 ans, le sujet a gagné en complexité et on peut s'en réjouir. Mais, en 1999, Lobdell traite ça rapidement comme quelque chose de mineurs mais ayant des proportions étranges, prêtes à affoler les lecteurs les plus pervers. Heureusement, outre cela, la question de la sexualité de Estacado est bien évacué et le sexe reste, principalement, montré comme un péché dans ce tome. Amusant de voir la différence avec les débuts de Darkness.
On appréciera également la réflexion de Estacado, qui se développe ainsi que tout le petit groupe autour de lui qui donne un dynamisme réel et appréciable, rendant la lecture très agréable.


Un cross-over avec Batman coupe le tome en deux. Loin d'être inintéressant, cette histoire survole un peu le personnage de Bruce Wayne et rend Estacado un brin fade mais permet de dynamiser l'idée de rédemption du personnage. L'opposition à Batman est bien écrite et la différence entre la mafia traditionnelle et la ville de Gotham est amusante. Chaque méchant a le droit à son cross-over en plus. Notons également que graphiquement, on est sur la meilleure partie du tome.
Cela dit, on est très loin d'une bonne production de Jeph Loeb, qui occupe pourtant le scénario avec Lobdell.


Cela permet cependant d'amener la troisième partie du tome : le cross-over avec Witchblade. Les deux armes se retrouvent mêlées pour affronter une race antique, basée sur l'orgie sexuelle. Violence (sexuelle) au programme, dégoût, haine... Estacado, présenté jusqu'à présent comme un assassin et le mal incarné prend ici des allures de rédempteurs, offrant la paix aux autres malgré son âme empli de haine.
A l'inverse, Sara, possédant la Witchblade se laisse aller à la violence.
Si ce cross-over peut être parfois un peu dur à saisir de par certains passages de Witchblade, l'histoire reste plaisante. Il faut dire que le déclencheur est une vengeance d'une femme qui a tout perdu à cause d'Estacado. L'idée de ramener des détails du premier tome est très bonne. De plus, cette capacité à tout sacrifier par vengeance fait hésiter le lecteur entre la compassion et le mépris pour ce personnage.
Enfin, toute cette histoire s'inscrit dans la volonté de Jackie de trouver la paix, en acceptant ses péchés et les péchés de la famille. On est dans une logique du semi-pardon. Estacado ne demande pas pardon mais est prêt à payer et à faire payer ceux qui tuent les innocents. Idée intéressante. Estacado est-il prêt à trahir la famille ?


C'est en tout cas cette question qui vibre dans le crane du lecteur, une fois le tome refermé.


On voit donc que, globalement, Lobdell fait du très bon boulot. Sans faire de miracle pour autant, il parvient à dynamiser la série, il y ajoute un petit renouveau sans la travestir. Il ramène quelques personnages, en efface certains, en ajoute d'autre. Bref, sans en faire trop il modifie un peu l'univers histoire d'amener de nouvelles histoires et nouvelles tendances très agréables.
Mais est-ce qu'un Estacado gentil peut fonctionner ? Grande question.
De plus, et malgré le cross-over avec Batman, le changement du personnage a du mal à convaincre de par sa vitesse et sa « gratuité ».
De la même manière, l'histoire avec Witchblade est parfois brouillonne, voir bâclée sur des détails … Là encore, il faut voir où ça va mener.


Ce tome remet cependant en confiance pour l'avenir, lumineux, du Darkness.

mavhoc
7
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le 7 nov. 2015

Critique lue 233 fois

mavhoc

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