Arsène Schrauwen
7.3
Arsène Schrauwen

BD (divers) de Olivier Schrauwen (2015)

Comment raconter au XXIᵉ siècle l’histoire de son grand-père au Congo belge ? Certainement plus comme Hergé dans les années 20. Ici, tout est montré sous la forme de diapositives, bords arrondis, couleurs délavées, comme une soirée « Temps béni des colonies » projetée dans le salon.


Le Congo n’est jamais nommé directement, et les « autochtones » ne sont jamais représentés : un parti pris radical. On les évoque sur le bateau comme des « grands enfants qu’il faut corriger », qu’Arsène imagine alors sous les traits de petits Flamands catholiques. Arrivé sur place, les Noirs deviennent des corps simplifiés, réduits à des bustes avec une boule pour tête. C’est le non-dit central du livre : le Congo comme décor des projets belges, les habitants comme silhouettes anonymes. Radical donc, mais peut-être trop facile : l’éléphant dans la pièce reste contourné.


Publié à l'origine en trois tomes, le récit finit par s’essouffler, notamment dans sa descente conradienne vers la folie. L’auteur conseille d’interrompre sa lecture entre les volumes : un conseil que j’aurais dû suivre. Pourtant, sur le plan formel, l’inventivité est constante. Le rouge et le bleu (couleurs exclusives de l'ouvrage) deviennent langage narratif (colère/joie, homme/femme, intérieur/extérieur, chaud/froid), les bulles se dessinent au halo d’une lampe, une planche sert de fond à la suivante, certaines cases imitent la double exposition. Entre Asterios Polyp et Chris Ware, mais à la sauce flamande absurde. Schrauwen pastiche la ligne claire et le dessin documentaire d’époque pour mieux les déconstruire, en hybridant avec l’esthétique des comics indé.


Un tourbillon visuel fascinant, mais aussi fatiguant par sa longueur, ses obsessions sexuelles et sa manie des pénis, qui finissent par lasser. Inégal, verbeux, parfois brillant : une relecture contemporaine du récit colonial, critique par l’absurde et par la forme, qui épuise autant qu’elle impressionne.



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Floax

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