Un camarade trop curieux, une vidéo découverte et c'est le drame pour Tasuku. Que faire alors ? Mentir pour protéger sa réputation ou assumer ce qu'il ressent ? Et si le mensonge à soi-même était pire que le regard des autres ? Rentrons dans ce premier volume pour voir d'un peu plus près de quoi il retourne.


Hasard


Hier se tenait sur France Inter une émission portant sur les ados et la pornographie. Deux éléments ont attiré mon attention : les ados interviewés ont facilement accès au porno' ; à la puberté, les jeunes sont souvent seuls face à cette évolution. Pas de rite de passage, pas forcément d'interlocuteur pour en parler, trouver des réponses, comprendre ce qui se passe...


Ces deux éléments sont précisément ceux qui interpellent dès que l'on commence Éclat(s) d'âme. Á deux jours des vacances d'été, Tasuku voit un recoin de sa vie déployée par un de ses camarades. Une vidéo porno gay sur son smartphone ça fait mauvais genre. Les garçons ont parfois la cédille qui s'évapore, et y vont de leurs regards et petit couplet sur les "pédés", "tapettes" et autres formules bien insultantes et stigmatisantes quand ils ne versent pas dans les analyses comportementales...


S'accepter


La première réaction de Tasuku consiste à essayer d'éteindre l'incendie. Ensuite c'est l'appel du vide, l'envie d'en finir. Envie qui ne se concrétisera pas, Tasuku voyant une jeune fille sauter dans le vide... et en ressortir vivante. Il va la suivre et apprendre l'existence d'un club de discussion. L'occasion de rencontrer des personnes qui ne le jugent pas. La parole pour (se) libérer. Mais plutôt que d'échanger dans une pièce, Tasuku va participer à leurs activités : réhabiliter des maisons. Déconstruire pour reconstruire, la métaphore est installée.


Tout ne sera pourtant pas simple. Le lendemain de l'incident du smartphone, alors qu'il espère que rien n'a changé ses camarades s'en donnent à cœur-joie et derrière l'humour gras, les insultes et un climat général insupportable (malgré quelques filles qui protestent), Tasuku craque : les mots sortent, les lignes se distendent (le fond rejoint la forme), moment d'oscillation frénétique où le jeune garçon part et trouve refuge au club de discussion. Le volume sert alors au héros à accepter ce qu'il ressent, à ne pas réprimer ce que son cœur lui dit. De quoi aller plus loin par la suite ?


Parle avec eux


Mais le coming out est loin d'être aisé. Haru, jeune femme membre du club de discussion le montre. Elle a quitté son ancienne vie où le fait d'être lesbienne était mal vue. Redémarrage à zéro du côté de Onomichi, la petite ville où se déroule l'histoire. Si elle vit avec Saki, qu'elles s'aiment, cette dernière ne l'a pas officialisé pour le moment. L'acceptation sociale de l'homosexualité est loin d'aller de soi. Alors il faut faire avec, se disputer parfois, espérer toujours. La suite nous montrera sans doute quel avenir se dessine pour les membres du club de discussion et leur hôte.


L'hôte n'est autre que la jeune fille aperçue par Tasuku. Personnage mystérieux, androgyne, sorte de version féminisée du garçon dont Tasuku est amoureux il introduit une sorte de distorsion dans l'espace et les propos de Haru à son endroit sont assez énigmatiques. Affaire à suivre...


Le garçon qui ne voulait pas être coupé en deux


Avec son titre qui interpelle, Éclat(s) d'âme s'offre un premier volume abouti graphiquement, Yuhki Kamatani offrant un graphisme qui s'adapte parfaitement aux situations tout en proposant des moments d'évasion/d'explosion très réussis (voir notamment les fins du chapitre 2 et 3). Le contenu tient la route. Côté traduction, Aurélien Estager livre une bien belle copie, où on ressent à la fois les différences de registres (entre les élèves, les adultes...), l'intensité des propos, leur ton (méchanceté, bienveillance...) : on lit sans s'arrêter. Le début est donc réussi, reste à voir si la suite modifiera le schéma général, presque un peu trop sage pour le moment.


Le second tome devrait sortir en mai.


Avis illustré à retrouver par ici.

Anvil
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le 22 févr. 2018

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Anvil

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