En 1854, nous sommes en pleine guerre de Crimée qui opposa au vil Empire Russe, comme vous vous vous en souvenez certainement, une alliance virile entre notre superbe armée second-impériale, une Albion un peu moins perfide qu'à l'ordinaire, la Sardaigne (allez savoir pourquoi) et la force Ottomane, histoire de rajouter un Empire de plus, et concernée en premier chef par sa position géographique...

Gustave Doré est encore dans la fougue de ses 22 ans, il est déjà largement reconnu pour ses talents de caricaturiste, vient d'illustrer Rabelais avec le génie qu'on lui connait et s'enflamme tellement pour ce que nous avons coutume d'appeler la première guerre moderne qu'il décide de lui consacrer un petit ouvrage dont il serait à la fois l'auteur et l'illustrateur.

Cette bande dessinée, puisqu'il faut bien l'appeler par son nom, présente sur une centaine de pages l'histoire de la Sainte Russie, des ténèbres de l'antiquité aux événements les plus récents. Pas de phylactère, le texte en-dessous des cases, mais une utilisation particulièrement moderne de l'art séquentiel.

Outre le trait merveilleux, le livre regorge de trouvailles hilarantes, de calembours plus ou moins honteux et d'innovations de toutes sortes. Attention aux âmes sensibles cependant, l'ouvrage est d'un gore assez rare et le Russe n'est peut-être pas présenté ici sous son meilleur jour, le knout représentant un peu la partie douce des scènes décrites... La sarabande continue des Tsars sanguinaires finissant tous leurs jours dans des coliques meurtrières après avoir vainement tenté de prendre Constantinople est parfois un peu longuette, mais souvent jubilatoire. On se retrouve parfois un peu dans la dernière partie d'Astérix chez les Goths, avec les guerres intestines d'accession au pouvoir... D'ailleurs, au vu du genre de jeux de mots utilisés et en se rendant compte que le duel des avocats des Lauriers de César est aussi très inspiré par ce livre, on peut légitimement se demander si Goscinny n'avait pas tout simplement l'ouvrage sur sa table de nuit dans son enfance...

A noter que dans ma version des années soixante-dix, Alain Maylan se charge de compléter l'histoire Russe sur une vingtaine de pages superflues qui ne servent qu'à prouver une de fois plus quel gouffre insondable existe entre le pur talent et le reste.

Sinon, pour rassurer les plus ignares d'entre vous, et ce même si ça dépasse la temporalité du livre de Doré, à la fin, les méchants barbares sanguinaires perdent la guerre, c'est la Crimée châtiment pour avoir massacré la charge de la brigade légère...

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le 29 sept. 2012

Modifiée

le 29 sept. 2012

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Torpenn

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