Trois personnages de BD, ni jeunes ni beaux, discutent, voire polémiquent sur la manière d'améliorer leur look afin de captiver davantage l'attention d'éventuels lecteurs. On choisit d'abord de prendre l'aspect de jeunes premiers de luxe, puis de jouer l'érotisme, puis le mélo, puis la néoténie, puis les mangas... Bon, tout rate, bien sûr...

Le charme de cette oeuvrette tient d'abord dans la brisure des conventions: le personnage de BD est son propre critique, et souvent virulent. Ce détournement des démarches attendues n'est pas sans rappeler l'usage subversif que l'on faisait d'images de BD dans les fanzines et affiches soixante-huitards, approche renforcée par le côté caricatural des personnages, l'usage du noir et blanc, l'affleurement de prétentions "progressistes" (planche 31) et le côté un peu ridicule de tant d'intellectualisme.

Car les personnages en connaissent un rayon sur les procédés et ressorts de la BD. Rien que la première planche est un détournement d' "On a marché sur la Lune", et la 9e fait intervenir Largo Winch; on nous parle en terme académiques de l'ellipse temporelle, de sémantique, de codes graphiques, de scénographie, de spécularité, de champ iconique, de transfert, de stéréotype, de maïeutique, de Debord, de poncifs, de narcissisme, d'hédonisme, de mythification, de paradigme, de dialectique, de catharsis, de conceptualité, de bandeaux sub-iconiques mimant les réactions supposées du lecteur, etc...

La lourdeur universitaire de ce lexique produit un effet comique dans la bouche de personnages de BD miteux, qui prouvent à suffisance que tout ce savoir n'a en rien résolu leur problème: comment être lu.

La partie sur le manga est bien trop longue, et n'apporte pas grand chose. De même que la fin, avec son procédé de répétitions de plans identiques ou presque.

Original et drôle, mais cela ne parvient guère à discréditer les petits Mickeys, qui, eux, sont bien plus amusants sans avancer tout ce baratin ennuyeux même s'il se veut parodique.
khorsabad
6
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le 23 avr. 2011

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khorsabad

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