Touch, I remember touch...

Pour « Siúil, a Rún », pensez-vous que Clannad ait produit la meilleure version ? Si vous savez répondre à cette question c’est peut-être que vous avez un goût pour l’Irlande et/ou que vous connaissez L’Enfant et le Maudit. Sinon c’est ti-par !

L’Enfant et le Maudit. Le blanc contre le noir. Lumière contre Ténèbres. Vie contre mort. Intérieur contre extérieur. On pourrait multiplier les oppositions tant elles abondent ici. Pourtant, et c’est là le paradoxe central, ceux qui devraient être séparés, se fuir sont réunis. Sheeva et le Professeur sont les 2 protagonistes principaux. Tout les oppose mais la solitude les a réunis. On se croirait au début de To your eternity.

Nagabe développe son récit autour d’une relation entre une enfant et un adulte qui viennent de se rencontrer. Pas de « daddy issues » ici mais une danse hésitante entre deux personnages qui se soucient l’un de l’autre, mais qui sont maladroits, doutent, ne peuvent avoir le moindre contact. Car le Professeur est un être maudit : s’il touche un humain il lui transmet la Malédiction. Comment vivre ainsi ? Comment réconforter l’autre en étant toujours à distance ? Nous sommes ainsi plongés au cœur des interactions (Erving Goffman serait heureux) et des jeux qu’elles mettent en œuvre.

Leur quotidien presque paisible pourrait nous endormir, nous ennuyer. Mais le rythme lent de la vie à deux doit aussi composer avec des menaces : celles des autres êtres maudits mais aussi celles du monde des humains ! S’ils se coupent des êtres de l’extérieur (avec des murs qui feraient rire le Mur, tmtc), des chevaliers rôdent dans les terres maudits. Quelques prédictions religieuses indiqueraient comment mettre fin à la Malédiction. Croire la parole des prêtres ? Le Roi s’y est résolu pour sauver son royaume. Ses soldats ont donc une mission à accomplir...

Ces différentes impulsions donnent au manga une noirceur que l’on croiserait volontiers avec Nausicaä, si Nagabe ne proposait pas quelques twists dont le dernier nous offre une conclusion douce amère comme on en voit peut-être trop rarement.