Marilyn Monroe, petit oiseau croqué derrière le miroir aux alouettes

Critique, bande-annonce et extraits sur: https://branchesculture.com/2016/08/02/holy-wood-marilyn-monroe-petit-oiseau-croque-derriere-le-miroir-aux-alouettes/


Cultivant l'art de la métaphore et le mythe de la forêt tant prisée par les contes, Tommy Redolfi livre avec Holy Wood, un portrait fantasmé de Marilyn Monroe, un biopic réinventé, envoûtant et onirique de la carrière de Marilyn. Une expérience de lecture qui fera votre été!


Résumé de l'éditeur: Holy wood, le «Bois Sacré», est une sombre forêt de conifères, peuplée de monstres de foire et de vieilles caravanes ; c’est là-bas que naissent les stars de cinéma qui font tant rêver les spectateurs. Dans l’espoir d’en devenir une à son tour, la fragile Norma vient s’installer dans cette étrange ville-fantôme qui lui permet, malgré l’obscurité ambiante, de se retrouver sous le feu des projecteurs. Passé les premiers échecs, la frêle jeune femme se retrouve au coeur de l’attention du couple Wilcox, énigmatique fondateur de Holy wood. Grâce à eux, Norma Jeane Baker devient Marilyn. LA Marilyn. Une femme très différente de la véritable Norma. Trop, peut-être ?


On ne va rien vous apprendre, depuis quelques mois,le thème de la forêt et des choses qui s'y cachent est dans l'air du temps. Que ce soit au cinéma (on vous parlait du retour surprise du Projet Blair Witch, la semaine passée) mais aussi en BD (Melvile, Dans les bois, Tout conte fée, Le concile des arbres...), la forêt et sa sauvagerie ont repris leurs droits. Dans l'imaginaire collectif mais aussi pour se substituer à notre monde parfois cauchemardesque. Et si A star is born, peut-être que derrière les paillettes et la chevelure platine de celle qui voulait épouser un millionnaire, le rêve tenait plutôt du cauchemar.


Betty Boop, le grand méchant loup et une grand-mère qui attend son poisson, le décor est planté dès le prologue pour mieux voyager entre fantaisie et réalité. Tommy Redolfi a du talent et du métier. Ça se sent et se ressent dès les premières planches, entrelacées dans les branches d'Holy Wood. La forêt à laquelle il donne naissance respire la peur, l'horreur mais aussi le magnétisme. Tout en élégance, l'auteur déploie son atmosphère et répand le venin hollywoodien. À l'instant, Marilyn vient d'arriver non pas en ville mais en forêt, chétive, craintive, à la démarche mal-assurée et à l'esprit peuplé par les fantômes du passé. On est loin du sex-symbol à la carrière fulgurante.


S'inspirant des grandes lignes biographiques de Marilyn, Redolfi livre une vision personnelle de celle qui fit tourner la tête, dit-on, à JFK. Mettant en relation la quête de célébrité avec l'absence de ses parents. "Le regard d'un père et d'une mère suffisent à beaucoup. Mais lorsque ceux-ci n'ont jamais été présents, auprès de qui briller? Combien de regards faut-il pour combler l'absence d'un seul. Cent? Deux cents? Mille? Jamais suffisamment en tout cas." Tristounette brune, Norma Jean n'arbore pas encore ses cheveux blonds platine et fait sans nul doute figure de petit oiseau à croquer par les vieux loups du 9ème art en recherche d'une nouvelle égérie (ou peut-être, est-ce une élégie?).


Alors certes, il y a du travail en façade, mais si Bette Davis a des yeux sensass', Norma Jean a une bouche à tomber! Peu importe les cicatrices qui disparaîtront de toute façon, voilà que Norma Jean se transforme en Marilyn, "The sex Godess, changement de timbre vocal, atouts mammaires compensés, nez refait, et le tour est joué pour un nouveau conte de fée. Et pourtant, ce ne sera pas "poupoupidou" tous les jours.


Récit de métamorphose rehaussé d'une histoire humaine au coeur d'une industrie à peu de choses près inhumaine, Holy Wood fait partie des lectures qui passionnent et transcendent leurs lecteurs. Surprenant et incertain (même en connaissant l'histoire de Marilyn Monroe), Tommy Redolfi signe, de son graphisme totalement acquis à ce qu'il raconte, une oeuvre originale au charme sensuel, fantasmatique et drôlement efficace où se nouent les regrets, la nostalgie entre factice et véritable. Sur le terrain du 7ème art, voilà une bande dessinée puissante qui bat à plates coutures le cinéma. Et en bordure de cette forêt mythique, on a vu le Cirque Freak, mais peut-être n'était-ce qu'Hollywood, glaçant, dérangeant, perturbant. Des BD's comme ça on en voudrait plus à l'ère des biopics souvent trop calculés.

Alexis_Seny
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le 4 août 2016

Critique lue 315 fois

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Alexis Seny

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